En se laissant lier, Jésus s’abandonne aux mains des hommes et passe isolé au travers de tout pendant son procès inique, bien qu’il soit totalement sensible à la haine dont il est l’objet. Son infinie supériorité sur tous ceux qui l’interrogent éclate à chaque instant. Plus on l’humilie, plus il grandit en dignité.
Dans le but probable de mieux s’assurer de sa personne et de donner quelque crédit à leur démarche, les chefs des Juifs avaient obtenu la collaboration des Romains. Un tribun avec sa troupe et les huissiers1 arrêtent Jésus. Ils l’amènent à Anne, beau-père de Caïphe (Anne avait été lui-même souverain sacrificateur et restait un personnage très influent parmi les Juifs). Puis Jésus est mené devant Caïphe, le souverain sacrificateur en charge à ce moment-là2. Ces deux hommes, religieux mais politiquement ambitieux, auraient dû savoir que Jésus répondait en tout point au profil du Messie dessiné par les prophètes de l’A.T.
Jean (l’autre disciple3) veut suivre le procès de son Maître. Il fait jouer ses relations pour entrer dans le palais du souverain sacrificateur. Dieu permet ainsi qu’un disciple assiste en témoin à la scène. Il y en a même un second, car Jean s’arrange pour que Pierre puisse pénétrer à son tour dans le palais. Une bonne intention, comme celle de Jean, peut amener une chute. La portière repère Pierre comme disciple de Jésus à cause de son accent galiléen. Non seulement Pierre ment en affirmant ne pas être son disciple, mais il renie son Maître. Lui qui voulait combattre toute une troupe (verset 10) s’effondre devant une servante. Comment comprendre ce changement si rapide chez Pierre ? En ne s’appuyant que sur ses propres forces, il combattait selon la chair2 Corinthiens 10. 3. Cette méthode n’aboutit qu’à des échecs. Quel contraste entre la déclaration du Seigneur lors de son arrestation (“Je suis”) et celle de Pierre quand on lui demande de décliner son identité (“Je ne suis pas”) ! Autour du feu, Pierre était près du monde, mais loin du Seigneur, et son cœur restait froid.
Jean porte une part de responsabilité dans le comportement de Pierre. Pourquoi n’a-t-il pas fait taire son ami ? Il semble que Jean, comme Pierre, était connu comme disciple de Jésus, car la portière dit à Pierre : “Toi aussi (sous-entendu comme Jean), n’es-tu pas des disciples de cet homme ?” (version Segond révisée). Si la question m’avait été posée, aurais-je mieux résisté que Pierre ?
A son insu, Caïphe avait prophétisé le vrai salut de la nation en vertu de la mort d’un seul homme, Jésus (11. 50). Mais il ignore maintenant qu’il va être remplacé par Jésus lui-même, comme souverain sacrificateur pour l’éternitéHébreux 7. 24-28. Il ignore aussi que les Romains détruiront Jérusalem et la nation juive, comme jugement de Dieu, parce que les Juifs auront mis à mort leur Roi.
En charge des plus hautes fonctions religieuses, Caïphe n’hésite pas à recourir aux expédients les plus méprisables pour se débarrasser de Jésus. Il commence par l’interroger au sujet de ses disciples et de sa doctrine4. Il cherche à démontrer que Jésus est le chef d’une secte secrète et subversive. Jésus ne répond évidemment pas aux questions touchant ses disciples, lui seul est mis en accusation. Quant à son enseignement, dit Jésus, chacun savait qu’il était public. Il n’avait rien dit en secret. Son calme et son courage contrastent singulièrement avec le comportement de Pierre, soumis lui aussi à un interrogatoire dans la cour, mais beaucoup moins insidieux.
Caïphe, un usurpateur de la fonction sacerdotale, ne peut avancer aucun chef d’accusation. A bout d’arguments, il cherche à faire taire Jésus. Sur ses ordres, un des serviteurs du sanhédrin lui donne un soufflet5. Jésus répond en présentant les alternatives qui appellent chacune une réponse de son juge. S’il a dit quelque chose d’illégal, à Caïphe d’en produire les preuves ! Si, au contraire, il n’a rien dit de condamnable, pourquoi le frapper ?
Malgré la corruption du pouvoir religieux et la cruauté du pouvoir civil, Jésus n’a jamais récusé les autorités de son pays, car la loi défendait de dire du mal du chef du peuple et d’outrager ses jugesExode 22. 27.
Jésus avait dit à Pierre qu’il ne pouvait le suivre dans l’immédiat (13. 36). En faisant fi de cette parole, Pierre fait l’amère expérience de sa faiblesse. Il est assis dans la cour du palais, à la vue de son Maître. Diverses personnes le pressent de questions sur son identitéMatthieu 26. 69-75. Plutôt que de déclarer ouvertement qui il était, il continue de nier être un disciple de Jésus.
Un jour nouveau se lève. Le coq chante. Tous entendent ce cri banal, mais une seule conscience est touchée. Ce que Pierre n’avait jamais appris sur lui-même, un coq le lui révéla ! Pierre n’a pas sombré dans le désespoir absolu à ce moment-là, car le Seigneur avait prié pour luiLuc 22. 32.
Le Seigneur parle de diverses manières aux siens qui sont sur un mauvais chemin :
Dans le reniement de Pierre, il y a plus qu’un problème de caractère. Pierre montre ce que peut être la versatilité de l’être humain, quand il est confronté à une situation inattendue ou à des circonstances adverses. Un jour zélé pour une cause, l’homme est capable de faire volte-face le lendemain.