Ce chapitre se présente sous la forme d’un serment d’innocence. Pour prouver sa droiture, Job utilise la formule : que je reçoive tel jugement, si j’ai commis tel mal. La description élogieuse qu’il fait de lui-même paraît difficile à concilier avec l’humilité du croyant qui laisse Dieu lui rendre justiceProverbes 27. 2 ; 2 Corinthiens 10. 18. Cependant certains serviteurs ont été amenés à présenter leur défense au sujet d’accusations injustes, sans que cela soit déplacé, tels Samuel1 Samuel 12. 1-5, David1 Samuel 24. 10-16, ou Paul2 Corinthiens 10-13. Ils se sont alors exprimés devant Dieu en présence de leurs accusateurs avec dignité. Notre Seigneur a su répondre à ceux qui l’outrageaient avec une noblesse et une grâce qui les surpasse tousJean 8. 49 ; 18. 23.
Nous n’avons pas à juger si Job a raison ou tort de se justifier. Mais l’Esprit de Dieu veut certainement nous apprendre à ne pas nous appuyer sur nos vertus chrétiennes ni à en faire un titre de gloire.
Job est d’une grande exigence envers lui-même. Sa vie et les sentiments qui l’animent sont un modèle. Sa moralité est exemplaire : il est marié, ne porte pas de regard de désir vers une jeune fille (verset 1), vit dans l’honnêteté dans ses affaires (verset 5), refuse toute convoitise (verset 7) et s’éloigne de toute possibilité d’adultère (verset 9). Si le chapitre 29 nous décrit le bien accompli par Job, celui-ci souligne le mal qu’il ne fait pas. La grandeur morale de Job provient surtout de l’examen intérieur auquel il se livre : il ne se contente pas de bien agir, il juge son regard, ses pensées, en fin de compte son cœur, qui est le mot clé de cet exposé (versets 7, 9, 27). Il rejoint l’enseignement de JésusMatthieu 5. 27-30. Comme David, Job se sait à nu sous le regard de Dieu, devant qui nous ne pouvons pas tricher (versets 4-6) Psaume 17. 3.
Regarder une femme avec convoitise fait perdre la communion avec Dieu (versets 1, 2). Commettre adultère (versets 9-12) 1 conduit sa propre famille à la ruine, et expose au jugement de la société ; c’est faire un pas sur le sentier qui mène à la perdition. Avertissement pour tous, à notre époque où la sexualité sans frein est banalisée, avec toutes les conséquences que cela entraîne : perte de sens moral, déchéance physiqueProverbes 6. 27 ; Osée 4. 11-14.
Job a des égards envers ses employés (versets 13-15), vient en aide aux pauvres, aux veuves ou aux orphelins (versets 16-23). Sachant que nous comparaîtrons tous devant Dieu, Job s’emploie à avoir une bonne conscience : il n’écrase pas les faibles. Pour lui, tous sont des créatures de Dieu qui ont droit au même respect (verset 15) : étonnante et magnifique déclaration pour cette époque de l’antiquité ! Job n’avait pas besoin des lumières des hommes politiques ou des philosophes pour aboutir à cette conclusion, confirmée par SalomonProverbes 14. 31 ; 22. 2. Celui qui respecte Dieu et écoute la voix de sa conscience aura un comportement social équitable. Paul en tire une exhortation pour les employeurs chrétiensÉphésiens 6. 9 : veillent-ils à la manière dont ils traitent leurs employés ?
Job répond ensuite aux insinuations accusatrices d’Éliphaz (22. 6-9), en décrivant ce que nous appellerions aujourd’hui l’aide humanitaire qu’il apporte autour de lui. Dans les situations délicates, Job n’utilise pas les appuis qu’il a parmi les juges de la ville (verset 21). Sa motivation n’est pas d’acquérir un quelconque prestige de philanthrope, mais son respect et sa crainte pour la grandeur et le jugement de Dieu (verset 23).
Job ne met pas sa confiance dans les richesses (versets 24, 25), car ce serait frustrer Dieu, le renierPsaume 52. 9. Le désir de s’enrichir est comparé par Paul à l’idolâtrieColossiens 3. 5. Job refuse aussi la fascination des astres, qui conduit à une adoration coupable (versets 26-28) 2. Il ne se réjouit pas du malheur qui atteint ses ennemis, et ne demande même pas à Dieu d’être vengé (v. 29, 30) : il suit déjà les enseignements de JésusMatthieu 5. 43-48. Il est hospitalier sans espoir de retour (versets 31-32). Sa transparence atteint un sommet quand il confesse ses erreurs sans craindre le regard des autres, et en particulier les intrigues des familles en vue (versets 33, 34) : leçon de droiture pour le peuple de Dieu où se constituent si vite des partis et des commérages peu charitables2 Corinthiens 12. 20 !
Job ne se croit pas sans faute, il vient de le dire au verset 33. Mais il s’estime net de ce dont on l’accuse. Job signe en quelque sorte un mémoire pour sa défense, qu’il porte au tribunal. Là, il en appelle à Dieu, espérant de nouveau l’intervention d’un mystérieux arbitre. Quant à un éventuel acte d’accusation, il n’en a pas peur. Pour lui, il s’agit de calomnies qui tourneront plutôt à rétablir son honneur (versets 34-37). Ni l’homme qui l’accuse, ni Dieu dont il attend la réponse, ni la terre qui l’a vu vivre et qui est le témoin de son intégrité (versets 38-40), rien ni personne ne pourront le condamner pour expliquer sa souffrance. Même si cette affirmation est vraie, n’y a-t-il pas ici de la fierté ?
D’un autre côté, qui peut comme Job présenter un tel tableau de droiture ? Paul déclare aussi avoir été un observateur zélé de la loi. Mais, à la différence de Job, il ajoute que toutes ses remarquables qualités ne peuvent en aucun cas constituer sa justice et qu’elles ne sont que des ordures. La foi en l’œuvre de Christ est le seul moyen d’être revêtu gratuitement de la justice divine, qui est nécessaire pour entrer dans la présence de DieuPhilippiens 3. 3-9. Job a d’ailleurs fait l’inventaire de toutes ses bonnes actions, mais elles sont impuissantes à lui donner le repos.
Le rédacteur du livre nous avertit que Job a fini de parler : c’est la clé de la délivrance, car le messager de Dieu (Élihu) et Dieu lui-même vont pouvoir s’exprimer. Savons-nous faire taire notre âme devant Dieu, comme DavidPsaume 131. 2 ?