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Le livre de Job
Sondez les Écritures - 3e année

Job 4

Éliphaz, l’homme d’expérience

1. Exhortation et sympathie : versets 1-6

Après le discours amer de Job, il était difficile d’ouvrir la bouche, et on comprend l’hésitation d’Éliphaz (verset 2). Il se sent comme obligé de réagir, parce qu’il est un homme d’expérience. Il parle de ce qu’il a vu et examiné attentivement dans sa vie (4. 8 ; 5. 3, 27 ; 15. 17), et partage une révélation personnelle qu’il a reçue (4. 12-21). Ce caractère le rend sympathique, d’autant qu’il commence par rappeler les vertus et le dévouement de Job (versets 3, 4). Malheureusement sa sympathie se limite à ces trois premiers versets. Éliphaz a des accents de dignité et d’authenticité, mais présente une vérité qui n’est pas adaptée à la situation de Job. Il déclare que la souffrance est une conséquence du péché, insinuant que Job a des fautes à confesser. Ses reproches voilés vont devenir, au fur et à mesure de ses discours, de véritables accusations, qui sont reprises avec plus de virulence encore par les deux autres amis. Jamais Éliphaz ne reconnaît la foi dont Job a fait preuve, et que Dieu n’a pas ignorée (1. 22 ; 2. 10). Jamais il ne dit à son ami qu’il souffre sincèrement avec lui.

Éliphaz rappelle l’aide que Job a pu apporter aux découragés (versets 3, 4). Mais il s’étonne (verset 5) de ce qu’après avoir prêché aux autres, et les avoir secourus, il succombe. Veut-il le stimuler ou est-ce un reproche d’hypocrisie ? Il lui suggère de se rassurer en considérant sa vie antérieure exemplaire (verset 6), incitant Job à s’appuyer sur sa piété et non sur Dieu, ce qui sera pour lui un piège. C’est comme s’il lui proposait de se confier dans la religion. Il est difficile de comprendre la question d’Éliphaz au verset 6 :

  • 1. S’il estime la fidélité de son ami à ce point, pourquoi insinue-t-il ensuite que la cause de son malheur pourrait être un péché ?
  • 2. Veut-il dire, comme Satan dans les premiers chapitres, que la piété de Job est intéressée ?

En tout cas, quelle douleur pour Job d’entendre cette question, qui évoque pour nous la moquerie adressée au Sauveur sur la croix : “Il a sauvé les autres, il ne peut se sauver lui-même” Marc 15. 31.

2. Rétribution des injustes : versets 7-11

Pour Éliphaz, le péché donne naissance à la souffrance. Cette thèse est présentée ici succinctement, et sera détaillée plus tard, ainsi que dans d’autres portions de l’Écriture (verset 8) Osée 8. 7 ; 10. 13 ; Galates 6. 7-8. Mais Éliphaz fait ici deux erreurs :

  • 1. Semer est une activité délibérée et non une chose faite par hasard. La vérité qu’il énonce s’applique à celui qui a le péché pour objet et non à un manquement occasionnel. Elle suppose une révolte ouverte ; or il vient d’affirmer que ce n’était pas le cas de Job (verset 6). Pourquoi alors le comparer au lion (versets 10, 11), qui est parfois une image du diable dans la Bible1 Pierre 5. 8 ?
  • 2. Il est vrai que la souffrance apparaît dans la Parole après le péché d’Adam et ÈveGenèse 3. 16, 17. Mais, dans le détail de nos vies, nos maux et nos peines ne sont pas toujours engendrés par nos péchés.

Retenons une leçon du comportement d’Éliphaz, ce croyant qui pourtant avait “vu” beaucoup de choses dans sa vie : si nous voulons à tout prix appliquer aux autres l’expérience que nous avons faite personnellement avec Dieu, nous risquons de n’apporter aucun secours, et même de blesser. Seule la consolation divine que nous avons reçue peut être partagée2 Corinthiens 1. 4.

3. Une révélation : versets 12-21

Éliphaz raconte ici une vision qu’il a eue, probablement pour renforcer le point de vue qu’il vient d’exprimer. Dieu a révélé sa pensée à plusieurs hommes par des rêves qu’eux-mêmes ou d’autres ont eus. Citons entre autres AbrahamGenèse 15. 12, JosephGenèse 37. 5, 9, GédéonJuges 7. 13, NebucadnetsarDaniel 2. 28, Joseph le mari de MarieMatthieu 2. 13 ; Élihu (33. 15) le considère comme un mode habituel de communication de Dieu. Aujourd’hui Dieu s’en sert toujours, mais dans nos pays la grande majorité des hommes savent lire, et sont responsables de se laisser instruire par l’Écriture, qui n’était ni complète ni répandue dans ces temps anciens.

Éliphaz est effrayé (versets 14, 15), comme plusieurs qui ont eu des visions de Dieu, tels Abraham, Manoah ou Ésaïe. Certains d’entre eux comme Éliphaz (verset 16), ManoahJuges 13. 16 ou les femmes devant le Christ ressuscité, n’ont pas reconnu d’emblée de qui il s’agissait. C’est par sa voix que le messager divin se révèle, “léger murmure” pour Éliphaz, “voix douce, subtile” pour Élie dans la caverne1 Rois 19. 12. N’est-ce pas touchant que ce Dieu si grand et terrible s’approche avec tant de douceur pour parler avec les siens ? Lui laissons-nous la possibilité de le faire au milieu de notre vie agitée ?

Éliphaz a retenu de cette vision le message suivant : l’homme est pécheur et ne peut atteindre la pureté divine par lui-même (verset 17). N’est-ce pas un message essentiel, que nous avons parfois tendance à oublier au cours de la vie ? Si même les anges ne peuvent prétendre à la perfection vis-à-vis de leur Créateur, à combien plus forte raison l’homme (versets 18, 19).

La fragilité de la condition humaine est rappelée par plusieurs expressions :

  • 1. L’argile, que Job, puis Élihu (10. 9 ; 33. 6) évoqueront à leur tour pour suggérer la manière dont Dieu nous façonne au cours de la vieÉsaïe 45. 9 ; Jérémie 18. 4, 6 ; Romains 9. 21.
  • 2. La poussière, allusion à la création de l’homme et à son destinGenèse 2. 7 ; 1 Corinthiens 15. 47.
  • 3. Les cordes, qui font penser au fil de la vieEcclésiaste 12. 6 ; Ésaïe 38. 12, ou aux cordages de cette tente à laquelle la vie humaine est également comparée dans d’autres textes2 Corinthiens 5. 1 ; 2 Pierre 1. 13.

Nous reconnaissons la valeur de ces affirmations bibliques, et Éliphaz y avait certainement réfléchi attentivement. Mais Job souffrait d’un ulcère douloureux et avait perdu en une journée tous ses biens et ses enfants : avait-il besoin d’une dissertation sur le caractère éphémère de notre vie ?

Job 4

1Et Éliphaz, le Thémanite, répondit et dit :

2Si nous essayons de t’adresser une parole, en seras-tu irrité ? Mais qui pourrait se retenir de parler ?

3Voici, tu en as enseigné beaucoup, et tu as fortifié les mains languissantes ;

4Tes paroles ont tenu droit celui qui chancelait, et tu as affermi les genoux qui ployaient ;

5Mais maintenant [le malheur] est venu sur toi, et tu es irrité ; il t’atteint, et tu es troublé.

6Ta crainte [de Dieu] n’est-elle pas ta confiance, et l’intégritéa de tes voies, ton espérance ?

7Souviens-toi, je te prie, qui a péri étant innocent ? et où les hommes droits ont-ils été détruits ?

8Selon ce que j’ai vu, ceux qui labourent l’iniquité et qui sèment la misère, la moissonnent.

9Ils périssent par le souffle de †Dieu, et sont consumés par le souffle de ses narines.

10Le rugissement du lion et la voix du [lion] rugissant [sont étouffés], et les dents des jeunes lions sont brisées ;

11Le lion fort périt faute de proie, et les petits de la lionne sont dispersés.

12Une parole vint à moi secrètement, et mon oreille en saisit la susurration,

13Au milieu des pensées que font naître les visions de la nuit, quand un sommeil profond tombe sur les hommes ;

14La frayeur vint sur moi, et le frisson, et elle fit trembler la multitude de mes os ;

15Et un esprit passa devant moi : les cheveux de ma chair se dressèrent.

16Il se tint là ; je ne reconnus pas son apparence : une forme était devant mes yeux. J’entendis un léger murmure et une voix :

17Un mortel sera-t-il plus juste que †Dieu, l’homme sera-t-il plus pur que celui qui l’a fait ?

18Voici, il ne se fie pas à ses serviteurs, et ses anges il les charge de folie ;

19Combien plus à ceux qui habitent dans des maisons d’argile dont le fondement est dans la poussière, qui sont écrasés comme la teigne !

20Du matin au soir, ils sont frappés ; ils périssent pour toujours sans qu’on y fasse attention.

21Leurs cordesb ne leur sont-elles pas arrachées ? Ils meurent, et sans sagesse.

Notes

alitt. : perfection.
bles cordes qui retiennent une tente ; comp. Ésaïe 33. 20.

(La Bible - Traduction J.N. Darby)