Job ne peut plus supporter le regard de ses amis qui observent sa douleur depuis sept jours. Ses premières paroles expriment la profondeur de ses souffrances. Dans son accablement, Job maudit le jour de sa naissance (versets 4, 5) et la nuit où il fut conçu (versets 6-10). Il se laisse envahir par une idée négative de lui-même, déclarant que sa naissance a été un malheur, et il souhaite qu’on supprime ce jour du calendrier (verset 6). Jérémie, découragé par l’opposition et par l’état spirituel affligeant de ses concitoyens, prononcera des paroles analoguesJérémie 20. 14-18. Job “maudit son jour”, mais ne maudit pas Dieu, contrairement à la recommandation de sa femme (2. 9). Il a de la peine à faire face à la réalité : nous imaginons parfois ce que la vie aurait pu être sans telle ou telle difficulté. Cela accroît notre désespoir, comme ce chapitre le montre. Le croyant peut connaître le désarroi et les “pourquoi”, mais la foi le conduit peu à peu à se rejeter entièrement sur DieuPsaume 42. 6, 12.
L’irritation de Job contraste avec l’esprit de Christ. Rejeté dans les villes où il avait tant prêché et fait tant de miracles, Jésus prend connaissance des questions de Jean Baptiste. Et dans cet instant douloureux, sa prière s’élève dans une soumission confiante : “Je te loue, ô Père,… c’est ce que tu as trouvé bon devant toi” Matthieu 11. 25, 26. Il nous est difficile de conserver de bonnes pensées sur Dieu en toutes circonstances. Paul confesse qu’il avait dû apprendre à être contentPhilippiens 4. 11.
Le léviathan (verset 8) est un monstre marin1, appelé ailleurs le serpent fuyard et tortueuxÉsaïe 27. 1. Désignerait-il ici la puissance maléfique ? Job en arriverait donc à souhaiter que des personnes aux pouvoirs occultes maudissent son jour de naissance. Ses paroles n’allaient-elles pas au-delà de ce qu’il pensait ?
Job prend en dégoût la vie présente et dit qu’il aurait mieux valu pour lui mourir dès sa naissance (versets 11-15), ou pendant que sa mère le portait (verset 16). Il pense au repos et à la tranquillité dont il pourrait jouir, alors qu’il ne connaît que l’agitation et la souffrance. Il évoque la mort comme ce lieu où tous se retrouvent sur un pied d’égalité, qu’il s’agisse :
Les paroles de Job s’inscrivent bien dans la pensée générale de l’A.T. au sujet du
Le “pourquoi” du verset 20, après ceux des versets 11 et 12, introduit un nouveau souhait de Job : la mort. D’autres serviteurs de Dieu expriment ce désir dans un moment de découragement :
Nous pourrions vite accuser ces quatre hommes d’avoir voulu la mort pour échapper à une réalité difficile, mais notons que chacun d’eux s’en est remis à Dieu dans la prière en attendant la mort de sa main. La foi en Dieu n’empêche pas les hommes d’être faillibles, mais leur permet de se relever. Le stoïcisme est une pensée étrangère à la Bible, et Job, malgré sa constance, n’est pas un stoïque. Il sait exprimer son désespoir. Malheureusement ses amis ne sont pas prêts à l’entendre.
Dans le N.T., l’espérance du fidèle n’est jamais la mort, mais le retour du Seigneur. Job compare la lumière à la vie (verset 20), comme le fera plus tard JeanJean 1. 4, avec cette immense différence qu’il s’agit ici de la vie terrestre et non de la vie éternelle. Pour Job, pour Élihu (33. 28, 30) ou DavidPsaume 56. 14, voir la lumière veut simplement dire être vivant sur la terre.
Job est rempli d’amertume, et il devra découvrir le divin remède : la grâce, dont nous sommes appelés à ne pas manquerHébreux 12. 15. Quand notre chemin est “caché” (verset 23) – quand nous ne savons que faire ou décider, quand l’horizon paraît bouché – sachons alors dépendre davantage de DieuProverbes 20. 24 ; Jérémie 10. 23.
Mais dans sa douleur Job se voit en prison. Job révèle qu’il a été et est encore la proie de peurs irraisonnées (versets 25, 26). A-t-il cru qu’il avait trop de bonheur, et a-t-il appréhendé le malheur comme conséquence ? Pourtant jamais Dieu n’agit ainsiProverbes 10. 22. Craignait-il le temps de l’épreuve ? La peur n’est pas une bonne conseillère, et elle surgit parfois parce qu’une partie de nos pensées n’est pas soumise à la crainte de Dieu. Job craignait de succomber, comme Paul qui estima un moment avoir été chargé “au-delà” de sa force2 Corinthiens 1. 8. Paul reçut la délivrance en bannissant toute confiance en lui-même et en la plaçant en “Dieu qui ressuscite les morts” 2 Corinthiens 1. 9.
Le discours de Job, cet homme pieux, se termine sur une note d’angoisse, nous rappelant ainsi la faiblesse de notre nature humaine.