Abram part de Béthel vers le midi de Juda, vers le désert. Il s’éloigne du lieu privilégié de Béthel (maison de Dieu), et la famine survient. Qui n’a pas quelquefois éprouvé une disette spirituelle ? N’a-t-elle pas été liée à la trop grande importance donnée aux choses de la vie courante ? Lorsqu’il en est ainsi, il faut, sans plus attendre, rallier le voisinage de Béthel.
Quoiqu’il en soit, tant que nous serons dans le pays où “le Cananéen habite”, il y aura des épreuves. Si le ciel était toujours serein, le sentier toujours uni, le croyant n’aurait pas la connaissance des soins du Dieu auquel il a affaire. Si nous nous appuyons sur les circonstances favorables plutôt que sur lui, il est fidèle en nous enlevant nos appuis.
Abram était dans un pays où Dieu l’avait appelé pour y séjourner, non pas pour le quitter à la première épreuve. Mais il ne se tourne pas vers Dieu pour rechercher ses directions, et s’attendre à lui pour ses besoins. Il va donc descendre, car le chemin qui conduit au monde, à l’Égypte, est un chemin facile, ce n’est pas le chemin de la foi. Toutefois ce n’est pas l’amour du monde qui conduit Abram en Égypte, mais la crainte de manquer de pain. Un cœur inquiet et mal affermi croit trouver des ressources pour la vie présente dans ce que le monde offre de meilleur, sans pour cela l’aimer vraiment. C’est peut-être de nos jours la plus courante des pressions du monde sur un chrétien. Il faut reconnaître avec sincérité, après peut-être bien des expériences malheureuses, que le monde ne peut offrir au croyant, même dans ce qu’il a de meilleur, que des ressources vaines. Il vaut mieux souffrir et être heureux dans la voie de Dieu, que de chercher de l’aise auprès d’un monde qui nous ôtera notre joie.
A l’approche de l’Égypte, Abram commence à avoir peur. Les Égyptiens étaient-ils plus mauvais que les Cananéens ? Certainement pas, mais il avait pu jusque-là en toute bonne conscience compter sur la protection divine. Sa confiance semble disparaître désormais, et la chair se montre de bien triste façon par cette entente avec son épouse, basée sur la tromperie. Son devoir était de protéger Saraï ; mais il semble prêt à la compromettre pour se protéger lui-même. Il aurait dû veiller avec un soin jaloux à ce que Saraï restât fidèle à sa relation et la déclarât clairement, mais il n’avait pas la force d’en assumer les conséquences dans un chemin de propre volonté. Quelle déchéance après avoir connu Béthel, maison de Dieu, de se retrouver dans la maison du Pharaon ! Prenons garde qu’en nous trouvant au milieu des gens de ce monde, nous ne soyons conduits à renier notre Maître, comme Pierre l’a fait.
Abram avait dit : “Afin qu’il m’arrive du bien en considération de toi”. Le prince de ce monde ne demande pas mieux que de favoriser ceux qui retournent sur son terrain. De ce côté-là, Abram est comblé, bien traité par le monde, mais il perd sa joie en Dieu et sa communion : pas d’autel en Égypte, pas de témoignage vivant, pas de service efficace. Il reçoit des honneurs et des richesses, mais cela met en évidence sa servitude, et rappelle le prix payé : il a vendu sa femme pour des troupeaux ; quel déshonneur !
Quelle leçon aussi pour nous ! Le Seigneur nous enjointMatthieu 6. 33 à chercher premièrement le royaume de Dieu et sa justice, et toutes les choses nécessaires pour la vie présente nous seront données par dessus. Nous n’avons pas à les rechercher, Dieu saura y pourvoir. Si nous acceptons des avantages mondains (verset 16), l’ennemi saura, en échange, nous ravir notre dignité de croyant et de témoin du Christ. Nous perdrons aussi notre paix, notre joie dans le Seigneur. Mieux vaut être pauvre avec Christ que riche sans lui.
Des plaies tombent sur le Pharaon et sur sa maison ; il n’était pourtant pas coupable envers Abram qui l’avait trompé, mais il l’était envers Dieu, et Dieu le frappe. En revendiquant ses droits sur les siens, Christ revendique ses droits sur son Église, qu’il a choisie et rachetée pour qu’elle soit à lui seul.
Si les chrétiens se compromettent, le monde ne les adopte pas pour autant. Nous ne sommes pas vraiment estimés du monde en descendant vers lui ; et c’est une grâce de Dieu si, un jour ou l’autre, le monde nous met dehors. Mais quel déshonneur pour un croyant et pour son Maître, lorsque le monde lui fait des reproches et le chasse ! Quel contraste entre ce “Va-t’en”, du Pharaon, et le “Va-t’en” de Dieu au verset 1, qui était le véritable appel du Dieu de gloire.
Maintenant Abram va monter. Il semble qu’étant sorti du milieu de l’iniquité, il juge sa voie passée dans la lumière de Dieu, qui le conduit dans le chemin de la restauration. C’est un chemin éprouvant certes, mais béni pour l’âme de notre patriarche.
Le séjour en Égypte laissera des traces : ces richesses acquises dans le monde, qui seront bientôt une source de conflit, cette servante égyptienne qui monte avec lui, ce neveu qui reste fort éloigné des exercices de foi de son oncle, ce déshonneur porté sur son épouse et qui, longtemps, ne sera pas jugé à fond, tout cela n’est pas à la gloire de Dieu.
Néanmoins les traites successives le ramènent à Béthel, lieu du commencement du pèlerinage, de la clarté de la présence divine, et de l’adoration en vérité. Le temps passé en Égypte a été du temps perdu, mais, grâce à Dieu, Abram retrouve le point de départ.
Rebrousser chemin et reprendre sa place devant Dieu, est en tout temps chose pénible à réaliser. Mais si nous le faisons avec courage et humiliation, nous pouvons compter sur le secours de Dieu. C’est son désir de nous faire revenir à la grandeur de notre appel et de nos privilèges. Il nous restaure de manière à exalter les richesses de sa grâce. Puis il sollicite notre vigilance, pour que nous nous maintenions dans un sentier de justice, à cause de son nomPsaume 23. 3.