Abraham vient d’obéir à la parole de Dieu ; tout est en ordre dans sa maison, il est donc préparé à une admirable visite. L’Éternel apparaît pour lui confirmer la proche venue de l’héritier. L’œil du patriarche est suffisamment exercé pour reconnaître celui qui, à plusieurs reprises et en plusieurs manières, lui avait parlé dans d’importantes révélations.
Abraham discerne que la seule attitude qui convienne devant celui des trois hommes qu’il appelle Seigneur, est de se prosterner en terre. Sa déférence à l’égard des visiteurs n’a d’égale que sa réserve, d’une délicate convenance. L’honneur qu’il leur porte, et la promptitude avec laquelle il agit, ne le départit pas de sa discrétion ; il attendra qu’il plaise au Seigneur de se dévoiler lui-même. De plus, il nous donne une remarquable leçon d’hospitalité.
Comme ces étrangers célestes sont à l’aise près de la tente de ce pèlerin ! C’est un des rares lieux sur la terre où l’Éternel peut accepter de faire une halte. Abraham reçoit cordialement ses hôtes ; Sara est son aide fidèle, dans la tente où il la retrouve. C’est là sa place ; l’ordre règne dans la maison du patriarche ; sa femme lui est soumise en toute douceur d’esprit et l’appelle seigneur (verset 12) 1 Pierre 3. 4-6 ; et c’est dans la tente qu’elle recevra par la foi une précieuse promesse divine. Quelles que soient les nécessaires activités de la vie, la femme chrétienne ne doit pas oublier la valeur de son service dans la maison. C’est là qu’il doit s’accomplir en priorité et dans une parfaite communion avec le chef de famille.
Abraham avait reçu avec joie la certitude que l’enfant de la promesse naîtrait de Sara (17. 17). Le temps fixé par Dieu avait enfin été communiqué : encore une année et l’enfant serait là (17. 21) ; nous sommes ici environ trois mois après (versets 10, 14). Mais qu’en est-il de Sara elle-même ? Elle avait précédemment manqué de foi. Abraham l’a-t-il informée de la révélation du chapitre 17, ou a-t-il gardé ce grand secret jusqu’à ce que l’Éternel le dévoile (verset 10) ? Le moment est venu pour elle de recevoir la “promesse” Romains 9. 9 par la foi.
Sara a entendu, mais doute encore un instant. Elle se sait trop âgée pour concevoir, et elle le reconnaît. Elle s’interroge dans le rire du doute : Dieu pourra-t-il faire un miracle ? Non, il ne le pourrait pas sans la foi de Sara. Aussi produit-il en elle une peur salutaire (verset 15). Elle réalise enfin qui est celui qui parle ; c’est celui qui peut lire dans son cœur, il faut croire en sa parole.
Alors Sara va estimer fidèle celui qui a promis, et recevra de lui la force de fonder une postéritéHébreux 11. 11. Il lui faut cette foi-là pour que l’enfant lui soit accordé, comme il faut la foi des deux époux pour que l’Éternel puisse accomplir sa promesse. Dieu a patiemment agi en les éprouvant, pour qu’ils soient enfin unis dans la même foi en la même promesse : c’est le triomphe de la grâce divine. Époux chrétiens, c’est dans cette même communion de foi que nous devons compter sur Dieu pour qu’il nous exauce.
Au verset 16, la scène change. Le sort de Sodome va être scellé, et Abraham entre dans le secret de Dieu à cet égardPsaume 25. 14. Abraham devient le confident de Dieu ; le sort qui attend les villes de la plaine lui est révélé : jugement longtemps suspendu sur un monde dont le péché est tel que le cri en monte jusqu’aux cieux. C’est parce qu’il est séparé d’un tel monde qu’Abraham peut entrer dans les secrets de Dieu à son sujet. L’Éternel veut lui confier ses desseins en jugement, comme il l’avait fait pour ses desseins en grâce, parce que l’un et l’autre touchent à sa gloire.
Le Seigneur connaissait Abraham. A-t-il lu dans nos cœurs, comme dans celui de son serviteur, notre détermination à marcher avec nos enfants dans la droiture de ses voies (verset 19), sans rechercher une place de choix dans un monde qui va être jugé ? Abraham donc, dépositaire des promesses, transmettra fidèlement (verset 19) l’enseignement divin à toute sa descendance ; mais Dieu ne pourra s’appeler que le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, le Dieu de ceux qui vivent de foi.
Abraham est laissé seul avec l’Éternel. Il ne plaidera pas pour lui-même comme précédemment (15. 2), mais va faire une fervente intercession en faveur de ces villes coupables et des justes qui peuvent y séjourner. Dieu savait qu’en évoquant le sort de ces villes qui n’avaient pas tiré profit de leur épreuve précédente (14. 1-10), il susciterait dans le cœur de l’homme de Dieu des sentiments identiques aux siens : compassion, miséricorde, patience, désir d’arracher quelques âmes à l’épouvantable jugement.
Abraham prie pour ces villes, non pas seulement pour les justes. Il peut le faire parce qu’il se tient à l’écart de leur iniquité. Lot ne priait pas, il tourmentait son âme ; mais Abraham prie pour lui. Il est enseigné de Dieu et capable de reconnaître “une âme juste” 2 Pierre 2. 8 en cet homme perdu dans Sodome, après un chemin dévoyé et le refus de la discipline de Dieu (14. 12). Quel cœur que celui de l’homme de foi ! Aussi est-ce en réponse à l’intercession d’Abraham que l’Éternel renvoie Lot hors de la destruction (19. 29).
Remarquons la profonde humilité de cet homme devant son Dieu (verset 27) ; il reconnaît l’insignifiance de la créature, et pourtant il s’adresse avec hardiesse au juge de toute la terre. Mais il le fait avec ce très grand respect qui convient, cette persévérance, ce sentiment de la bonté et de la justice de Dieu, dans la pleine assurance de foi d’un cœur libre1 Jean 3. 21, 22. Il intercède aussi longtemps et en allant aussi loin qu’il est permis à la foi intelligente de le faire. Il s’arrêtera aux dix justes, pensant avoir épuisé le crédit dont il dispose devant son Dieu. Mais l’Éternel ira au-delà en délivrant le juste Lot. Riche leçon de la persévérance dans la prière !