Jacob se dirige vers le pays de ses pères à Charan, pour y séjourner, selon les voies de Dieu en discipline (24. 6, 8). L’Éternel prendra soin de lui selon sa promesse et sa providence, mais il ne voudra se révéler de nouveau à lui que 21 ans plus tard. Pendant ce temps, Jacob ne jouira pas de sa communion ; nous ne le voyons pas prier ni adorer ; il se courbe seulement sous la main de Dieu en attendant la délivrance promise.
Il parvient rapidement à Charan, et Dieu le dirige vers le puits recherché. Mais nous ne le voyons pas prier, comme l’avait fait le serviteur d’Abraham précédemment ; il est plutôt l’homme d’action (versets 7, 10). Il voit Rachel, celle que l’Éternel lui destine et qu’il aimera. Il semble en avoir le profond sentiment dès la première entrevue ; mais il n’a rien à lui offrir. Rebecca avait pu être sur-le-champ couverte d’ornements, Jacob n’a que son courage à offrir. Il se soumettra pour elle à un dur labeur, à la sueur de son visage, et il l’entreprend ce jour mêmeOsée 12. 13.
Laban, alerté par Rachel, accourt auprès de Jacob et se confond en manifestations sentimentales empressées. Mais qu’y a-t-il au fond de son cœur ? Peut-être s’est-il souvenu de ce serviteur chargé d’or qui était venu de la maison d’Abraham ; voici certainement un héritier ! Mais Jacob n’a rien, pas de richesses à déployer. Qu’à cela ne tienne ! Laban va employer comme esclave “celui qui est son os et sa chair”, pendant 21 ans. Tel est l’homme de Charan ; il ne faudra pas plus d’un mois pour qu’il se dévoile. Jacob semble muet en face d’un Laban qui, cette fois, ne prononce plus le nom de l’Éternel (24. 31, 50). Jacob est tout aussi gêné pour le faire, à la différence du serviteur d’Abraham. Il ne peut parler de la manière dont l’Éternel a béni la famille et dirigé les circonstances ; il ne parlera pas de Béthel non plus. Peut-être avons-nous connu ces situations humiliantes, où nous ne pouvions que garder la bouche fermée.
Laban sait calculer : tout en mettant en avant les bonnes relations familiales (verset 15), il a compris la démarche de Jacob dictée par Isaac son père (28. 2) ; il va en tirer parti, car il n’a en vue que son propre intérêt. Il le pourra d’autant mieux que son neveu est prêt à tout sacrifier, pour celle qu’il aime déjà d’un amour qui ne se démentira jamais. Là, Jacob (versets 18, 20) s’élève à la note la plus heureuse de ces chapitres. Il évoque en type Jésus Christ qui est devenu serviteur et a consumé sa force, pour acquérir celle qu’il aimaitÉsaïe 19. 4 ; Exode 21. 5, 6.
Mais voici qu’après sept années, c’est Léa qui lui est donnée ; quelle déception ! Jacob avait trompé son père, lui le plus jeune, en se faisant passer pour l’aîné ; il est maintenant en face d’un père qui le trompe en faisant passer l’aînée pour la plus jeune. Dieu permet quelquefois que nous fassions l’expérience des douloureuses conséquences de nos propres façons d’agir, lorsque nous devenons victimes de comportements identiques. Après un court reproche, Jacob s’inclineHébreux 12. 5. Il accepte de poursuivre ce service éprouvant, parce que c’est la volonté de Dieu. Cette semaine d’années (verset 27) lui paraîtra certainement plus longue que la première, mais il se soumet. Telle est de même la noble attitude du croyant repris par le SeigneurApocalypse 3. 19.
Dans notre récit, Dieu agit avec compassion envers Léa. Elle aussi est victime de la tromperie de son père, mais elle a selon toute évidence porté sa peine devant l’Éternel, attitude remarquable pour une fille de Laban. Elle reçoit tout de la main de Dieu, et lorsqu’il l’a comblée dans ses affections frustrées, elle le loue (verset 35). On discerne en elle la naissance d’une foi divinement enseignée malgré l’environnement contraire. Léa porte donc un fruit abondant pendant la mise de côté de Rachel. C’est, en type, ce qui se réalise pendant le temps des nations qui se poursuit aujourd’hui encore. Ensuite le peuple d’Israël, symbolisé par Rachel aimée en premier, sera restaurée et portera enfin du fruit pour son DieuJérémie 31. 15-17.
Le chapitre 30 nous ramène au niveau du triste caractère de cette famille : jalousie, querelles, et expédients peu avouables. Rachel est jalouse à en mourir (verset 1) : pourquoi Jacob qui l’aime pourtant au point qu’il délaissera Léa, ne prie-t-il pas pour elle ? Isaac avait prié pour Rebecca aussi longtemps que nécessaire. Assurément la foi des deux époux n’est pas à la hauteur de l’épreuve, et Léa les devance en cela. Pour Rachel, les luttes de Dieu sont en réalité des luttes avec sa sœur (verset 8), et la victoire dont elle fait état n’est pas plus glorieuse que la naissance d’Ismaël.
Puis vient la scène la plus navrante : Rachel convoite les mandragores (plantes servant de drogue) que Ruben a trouvées dans les champs, et Rachel louera en quelque sorte son mari à Léa pour satisfaire sa convoitise (verset 16) ! C’est ainsi que naîtra le cinquième fils de Léa. Nous sommes heureusement parvenus au temps de la monogamie1 Corinthiens 7. 2, mais nous devons veiller à ne pas laisser s’introduire dans l’intimité de nos foyers des sources de tentations.
Malgré cela, Dieu veille ; au-delà de ces scènes affligeantes et selon son propos, il conduira Jacob et sa descendance vers la bénédictionRuth 4. 11 ; Rachel va maintenant y contribuer. Elle a probablement fait taire ses jalousies et cessé ses provocations ; elle s’est soumise, puis s’est rappelée à la mémoire de Dieu par la prière (verset 23) ; il peut enfin l’exaucer. Rachel donne naissance à Joseph ; sa foi est récompensée et va s’en trouver fortifiée : “qu’il ajoute” ; et Dieu le fera.
La naissance de ce fils attendu est pour Jacob un vrai signal ; même si le départ est quelque peu retardé, il est réellement signifié. Joseph est le vrai fils de la promesse (49. 26), type de Christ ; il annonce la fin de la servitude et le retour au pays promis.