Un docteur de la loi se lève pour éprouver le Seigneur. Son attitude, en elle-même, était déjà une violation de la loi qui disait : “Tu ne tenteras pas le Seigneur ton Dieu” Deutéronome 6. 16, parole déjà citée par le Seigneur à Satan au désert (4. 12), où le même mot est employé pour “éprouver” et “tenter”. Le docteur de la loi demande ce qu’il devait avoir fait pour hériter de la vie éternelle. La même question sera posée plus tard au Seigneur par le jeune homme riche (18. 18), lui aussi un des chefs du peuple.
Le Seigneur renvoie l’un et l’autre de ces deux hommes à la loi qu’ils connaissaient bien. Il pose ainsi deux questions au docteur de la loi :
Mais, pour l’homme naturel, aussi instruit que le docteur de la loi ou aussi riche que le chef du peuple, la loi est un livre fermé et l’homme ne sait pas lire. Lorsque le prophète invite par deux fois à lire : “Lis ceci, je te prie” Ésaïe 29. 11, 12, l’homme est bien obligé de reconnaître que le livre est scellé et qu’il ne sait pas lire.
Pourtant, le docteur de la loi connaissait le texte du commandement divin et en résume le contenu d’une manière remarquable : d’abord, l’amour pour DieuDeutéronome 6. 5, ensuite, l’amour de son prochainLévitique 19. 18. Le Seigneur lui-même cite plus tard à Jérusalem les mêmes passages au scribe qui l’interrogeaitMarc 12. 28-34 et qui lui avait répondu avec intelligence. L’amour est bien la somme de la loiRomains 13. 10, et manifester l’amour dans la vie courante serait un principe guérisseur des misères de l’humanité (6. 31).
Le docteur de la loi avait donc bien répondu ; il lui restait encore à mettre le commandement divin en pratique, non pas pour hériter de la vie éternelle selon son souhait, mais pour vivre heureux sur la terre : c’était la promesse de Dieu à son peuple s’il avait gardé la loiLévitique 18. 5, rappelée par l’apôtre Paul aux Galates pour souligner l’opposition entre la foi et la loiGalates 3. 12.
L’homme dans l’innocence n’aurait pas dû connaître la mort, mais il ne possédait pas pour autant la vie éternelle, c’est-à-dire la vie divine qui est Christ lui-même1 Jean 5. 11, 12. Après la chute, Dieu a chassé l’homme du jardin en lui fermant le chemin de l’arbre de vie afin que le monde ne soit pas peuplé de pécheurs immortels connaissant une vie sans fin de misère et de douleurs. Pour que l’homme reçoive la vie éternelle, il fallait d’abord la venue de Christ ici-bas et sa mort sur la croix ; puis Christ étant reçu dans le cœur par la foi comme SauveurJean 3. 16, la vie éternelle est communiquée au croyant comme un don de la grâce de Dieu.
Telle est la merveilleuse portée morale du récit que le Seigneur présente au docteur de la loi, pour le placer en face de sa misère et lui montrer les trésors de la grâce de Dieu.
Cet homme manifeste à son insu l’état de son cœur par sa question : “Qui est mon prochain ?” L’obligation légale était d’aimer Dieu (mais Dieu est loin des pensées de l’homme naturel) ; puis, d’aimer son prochain comme soi-même (mais la société est tout entière bâtie sur l’égoïsme et l’oubli des autres).
Par l’histoire du bon Samaritain, le Seigneur montre le changement complet apporté maintenant par sa grâce. Un homme descend de Jérusalem à
Le chemin de Jérusalem (figure de l’état de bénédiction dans lequel Dieu avait placé l’homme) à Jéricho (le lieu de la perdition et de la malédiction) est court malgré la dénivellation de mille deux cents mètres1. Les voleurs et les brigands ne manquaient pas pour dépouiller les voyageurs et les laisser blessés et à demi-morts. Tel est par nature l’état de tout homme tombé entre les mains de Satan. Un sacrificateur, puis un lévite, empruntant par hasard le même chemin, passent outre de l’autre côté. Ils avaient pourtant autrefois reçu de Dieu la mission particulière de garder la loi et d’être auprès du peuple “le messager de l’Éternel” Malachie 2. 7. Mais maintenant la parole du prophète se réalisait en eux : “Comme les troupes de voleurs guettent un homme, la bande des sacrificateurs assassine sur le chemin de Sichem” Osée 6. 9. La loi, que le docteur connaissait si bien, laissait ainsi l’homme sans force et sans secours. Il fallait une intervention extérieure de la grâce pour le sauver.
Le Samaritain, figure de Christ, n’était pas là par hasard ; il poursuivait son chemin d’amour, tracé par Dieu. Descendu d’auprès du Père et de sa demeure (Jérusalem), il se dirigeait vers la croix et sa malédiction (Jéricho), pour délivrer et guérir les hommes asservis à la puissance de Satan.
Les
Rejeté, méprisé et couvert de blasphèmes comme il l’a été, le Sauveur, vrai Samaritain, manifeste néanmoins la compassion de son cœur à l’égard de ce pauvre homme, dans lequel chacun de nous est invité à se reconnaître. Ses plaies sont ointes d’huile (image du Saint Esprit) et de vin (la joie goûtée par la grâce), puis bandées. Le blessé prend ensuite la place du Samaritain sur sa monture, dans sa compagnie, jusqu’à l’hôtellerie. Là, le blessé allait être soigné dans l’attente du retour de son bienfaiteur : image touchante de ce qu’est l’assemblée sur la terre, où sont accueillies les âmes après leur conversion pour y jouir des “secours de l’Esprit de Jésus Christ” Philippiens 1. 19, figurés par les soins de l’hôtelier.
Le Samaritain prend à sa charge toutes les dépenses des soins et de la subsistance du blessé. Il donne d’abord deux deniers (le salaire de deux journées de travail) ; en effet, le temps d’absence du Samaritain serait de courte durée. Il prend ensuite l’engagement de couvrir toutes les autres dépenses, tant il est vrai que le salut est gratuit pour tous ceux qui veulent venirÉsaïe 55. 1-3.
Ce récit expose donc l’état de l’homme devant Dieu et la grâce venue à son secours dans la personne de Jésus, le Samaritain méprisé. Le docteur de la loi est alors invité à reconnaître parmi le sacrificateur, le lévite et le Samaritain, celui qui avait été le prochain de l’homme tombé entre les mains des voleurs ; sans hésiter, il désigne celui qui avait usé de miséricorde envers lui.
La conclusion est simple, mais pourtant souvent mal comprise. Avec le docteur de la loi, nous devons tous nous reconnaître dans l’image du blessé à demi-mort, sans force et sans secours, dépendant des soins du vrai Samaritain, Jésus, le Sauveur, pour notre salut et notre guérison. “Va, et toi fais de même” (verset 37) est la réponse finale du Seigneur à la question initiale du docteur de la loi : “Que faut-il que j’aie fait ?” (verset 25).
Les œuvres de l’homme ne peuvent opérer son salut, ni même y contribuer dans la moindre mesure. Mais le croyant, sauvé gratuitement par la foi sans œuvres, montrera la réalité de sa foi par son travail d’amour et ses œuvres de foi, inséparables de l’amour selon Dieu1 Corinthiens 13. 3 ; Jacques 2. 17-26. Telle est la vraie philanthropie des chrétiens sur la terre en face de l’infinie misère humaine.