L’épreuve des frères de Joseph est terminée ; elle a produit son plein résultat. Leur péché commun a été secrètement jugé dans leurs cœurs sans que Joseph ait eu besoin d’y faire allusion, ni qu’aucune parole dure ne soit sortie de sa bouche à ce sujet. Mais en alliant l’amour avec la vérité, il les a conduits à ce jugement d’eux-mêmes en vue de leur restauration.
Il peut maintenant ouvrir librement son cœur ; mais il le fait sans témoins, car il n’aurait pas été convenable que les Égyptiens assistent à cette effusion d’affection, ni peut-être qu’ils soient mis au courant du péché de ces hommes qui avaient vendu leur frère. Seuls devant Joseph, les dix coupables vont être libérés dans leur conscience. “Je suis Joseph” : quel coup de foudre pour ces hommes tremblants, qui attendent un verdict redouté, mais qu’ils espèrent tempéré par l’émouvante plaidoirie de Juda.
C’est en pleurant que Joseph parle et se révèle à eux. Il place devant eux la personne du père (verset 3) qu’ils aiment tous maintenant d’un amour vrai et qui les lie entre eux. La question de Joseph : “Mon père vit-il encore ?” a déjà amplement reçu sa réponse, mais elle est rassurante.
Joseph va maintenant s’employer à dissiper le trouble, et à parler au cœur. Il désire que ses frères s’approchent, et puissent se tenir à l’aise dans sa proximité. Quel moment unique que cette réunion des douze frères enfin retrouvés, “tous fils d’un seul homme”, ancêtres de ce peuple qui se rassemblera un jour dans ses terres, dans l’unité nationale enfin manifestée.
Joseph (verset 4) rappelle encore une fois son nom pour bien se replacer dans le cercle de famille. Il n’a pas honte d’être appelé le frère de ces hommes qui l’ont vendu ; leur péché est évoqué avec le sentiment d’une pleine grâce qui a pardonné. Plus encore, Joseph va insister sur le bien que Dieu a tiré du mal qu’ils ont commis. Il se présente comme le conservateur de la vie de la part de Dieu, ici pour sa famille, et plus loin pour le monde (47. 25 ; 50. 20) ; le nom que le Pharaon lui a donné est ainsi confirmé (41. 45).
Il est beau de voir Joseph évoquer par trois fois ce chemin tracé par Dieu lui-même dans ses voies mystérieuses mais fidèles : “Dieu m’a envoyé devant vous” (versets 5, 7, 8) ; il devait précéder sa famille, et le psalmiste le confirmePsaume 105. 17, en vue d’un long séjour de la maison d’Israël “dans un pays qui n’est pas le sien”.
Nous connaissons l’homme qui a été envoyé devant ses frères, Jésus, maintenant élevé dans la gloire (versets 8, 9).
Relevons maintenant (versets 9-13) l’honneur et l’affection que Joseph porte à son père ; il n’a rien oublié des dix sept années d’intimité et d’amour vécues dans sa jeunesse. Il faut se hâter d’aller le consoler, de changer sa tristesse en joie et son deuil en allégressePsaume 30. 12 ; Jérémie 31. 13. Que Jacob descende vers son fils sans s’arrêter, qu’il vive heureux loin de la misère, qu’il voie la gloire que Dieu a donnée à Joseph. En vérité quel empressement, quelles prévenances, quels égards, quel amour profond ! Enfants, vous reconnaissez-vous dans cette tendresse à l’égard d’un père, d’une mère aux cheveux blancs (42. 38) ?
Les frères de Joseph se tiennent là (verset 12) ; ils ouvrent leurs yeux pour contempler leur frère, et leurs oreilles pour écouter les paroles de grâce qu’il prononce ; la gloire qu’ils pourront raconter à leur père sera peut-être et avant tout celle de sa grâce.
Joseph laisse maintenant (verset 14) son cœur s’épancher sans réserve, à l’adresse de Benjamin d’abord, le fils de sa mère, auquel son amour prodigue tant d’égards (43. 34 ; 45. 14, 22). Il se tourne ensuite vers ses autres frères coupables, mais pardonnés. Il leur a parlé avec amour pour chasser leur crainte, il les embrasse maintenant d’un baiser de pardon, de réconciliation et de paixLuc 15. 20. La communion est retrouvée et ses frères peuvent désormais parler paisiblement avec lui (verset 15 ; 37. 4).
Les Égyptiens et la maison du Pharaon sont maintenant avertis de la venue des frères de Joseph. Ils n’auront sans doute jamais connaissance de leur forfait. Le Pharaon les traite comme la famille du seigneur de toute l’Égypte. Les chariots (verset 21) sont là, offerts par le Pharaon et Joseph, pour transporter la famille de Jacob dans ces bons lieux du pays de Goshen (verset 10). En Canaan, tout doit être laissé sans regret ; le meilleur est devant eux.
Comme eux, nous n’avons pas à “regretter nos meubles” (verset 20), dans lesquels nous serions tentés de nous installer à l’aise sur la terre. Dans le voyage qui nous conduit vers la maison du Père, toutes les ressources sont en Christ (verset 21).
Joseph recommande à ses frères de ne pas se quereller en chemin. Il connaît leur cœur, comme le Seigneur connaît le nôtre. S’il peut y avoir un sujet de plainte, ils devront se souvenir comment Joseph leur a pardonnéColossiens 3. 13. Les Égyptiens observeront la manière dont ils marchent au pas lent de leurs montures richement chargées (verset 23). Abraham avait déjà saisi combien les querelles entre frères étaient en mauvais témoignage devant les gens du pays (13. 7).
La Parole nous met en garde contre les jalousies et les querelles, qui conduisent au désordre et aux mauvaises actionsJacques 3. 16 ; 1 Corinthiens 3. 3 ; Galates 5. 15, 20. Si, le long du chemin, nous nous entretenons de celui qui nous a pardonnés, qui a usé de miséricorde envers nous, de celui vers qui nous nous rendons et qui nous aime, nous pourrons réaliser une heureuse communion d’amour et de paix entre nous.
Les fils de Jacob (verset 25) retrouvent leur père et lui rapportent cette bonne nouvelle : Joseph vit ; c’est lui le seigneur de l’Égypte. Mais Jacob garde encore devant ses yeux la tunique ensanglantée de son bien-aimé. Sans doute les frères de Joseph auront-ils avoué d’autres choses, avant de rapporter ses paroles (verset 27) qui étaient pleines de pardon. Jacob reçoit donc le message de Joseph, voit les chariots qu’il lui envoie ; il est alors convaincu et il croit.
L’élan de son cœur ranime son esprit, et le fait se lever malgré sa vieillesse pour aller vers son fils. C’est l’amour de Jacob qui l’a fait se mettre en marche, mais c’est la dépendance et l’obéissance d’Israël qui lui demandent de s’arrêter à la limite du pays. Il offre des sacrifices au Dieu de son père, là où Isaac avait adoré (26. 25) et il attend ses directions. Elles ne tardent pas ; “Jacob, Jacob” : le Dieu miséricordieux, le “berger de Jacob” s’adresse à lui pour la septième fois.
A la différence d’Abraham (12. 10) qui n’aurait pas dû aller en Égypte, et d’Isaac (26. 2) qui en a été empêché, Jacob est invité à y descendre sans crainte, car c’est selon la volonté de Dieu maintenant. Dans le chemin d’un croyant, même lorsque les circonstances paraissent se reproduire d’une manière semblable ou s’apparentent à celles d’un autre croyant, seul Dieu peut donner la vraie marche à suivre. Il faut chaque fois lui demander avec prière et patience “le vrai chemin” Esdras 8. 21.
Les promesses divines sont renouvelées à Jacob (15. 13-16 ; 35. 11) ; elles le concernent lui et sa descendance. Il s’en emparera avec foi (47. 29, 30) et Dieu tiendra parole (50. 1, 13) envers Jacob, comme plus tard à l’égard des fils d’IsraëlExode 12. 51.
Toute la famille de Jacob, rassemblée autour du patriarche, s’engage maintenant dans le chemin de la foi à la rencontre de Joseph. Manquerait-il quelqu’un de nos enfants ou de nos petits-enfants (verset 7) pour nous accompagner dans ce chemin qui mène à la vie, à la rencontre de notre Seigneur ? Vraiment, le laisserions-nous ?