Un nouvel événement dramatique allait secouer le peuple : après les murmures et la convoitise (chapitre 11), la jalousie et la médisance (chapitre 12) puis l’incrédulité (chapitre 13, 14), voici l’orgueil et la révolte, incarnés par trois hommes, Coré d’un côté, Dathan et Abiram de l’autre.
Dès le premier verset, la cause profonde de la rébellion est mise à nu. Coré jouissait d’une place privilégiée (verset 9) ; il était un KehathiteExode 6. 18, 21, de la famille chargée de s’occuper des objets les plus saints du tabernacle (4. 4-15). Pourtant, il “s’éleva dans son esprit” (verset 1). L’orgueil, la “faute du diable” 1 Timothée 3. 6, le poussa à ambitionner une place plus élevée, celle d’Aaron lui-même (verset 10). Avec des efforts touchants pour le ramener à la raison, Moïse dévoila les intentions de Coré et la gravité de la mise en cause : derrière Aaron, qui n’était qu’un homme, c’était “contre l’Éternel” que s’élevait la révolte (verset 11). Coré et ses hommes voulaient s’emparer du pouvoir religieux.
D’autres personnes se joignirent à Coré, des “hommes de renom” (verset 2), menés par deux fils de Ruben1. Forts sans doute du rang de leur ancêtre, premier né de Jacob, ils contestèrent le pouvoir civil de Moïse en le qualifiant de dominateur. Ils osèrent même appliquer à l’Égypte les expressions que l’Éternel avait utilisées pour décrire le pays promisExode 3. 8, 17 ; Lévitique 20. 24 ! On est stupéfait par la démesure de leurs propos.
La réaction de Moïse fut exemplaire : tout d’abord, il tomba sur sa face (verset 4). “L’ardente colère” qui le saisit face aux accusations injustes des fils de Ruben (verset 15) ne l’amena nullement à répondre à la contestation par la contestation ; au contraire, il s’adressa à son Dieu, lui laissant le soin de répondrePsaume 37. 5, 6 ; 38. 15 ; Romains 12. 19.
Nous retrouvons aujourd’hui ce même esprit contestataire : sous couvert de préserver la liberté et les droits des autres (verset 14), certains remettent en cause les institutions établies par Dieu, cherchant en fait à assouvir leur propre soif de pouvoir. Toute l’histoire de ce monde ne cesse d’en faire la preuve, comme, hélas, l’histoire de la chrétienté.
De fait, la contestation religieuse (celle de Coré) est plus dangereuse que la contestation politique (celle de Dathan et Abiram). Aaron est une figure de Christ dans son service de souverain sacrificateur. Toute prétention consistant à s’arroger des droits qui n’appartiennent qu’au Seigneur seul, est un soulèvement ouvert contre Dieu. En particulier, si, dans le christianisme, tous les croyants sont sacrificateurs, Jésus Christ est le seul médiateur1 Timothée 2. 5 et tout clergé qui s’interpose entre Dieu et les chrétiens tombe dans la même faute que Coré. Au lieu d’amener au Seigneur, on attire les hommes vers soi2. Et ce risque concerne en premier lieu des personnes douées, dont le service est particulièrement en vue.
L’épître de Jude dresse un sombre tableau de la décadence de la chrétienté ; elle parle de mauvais docteurs, “glissés parmi les fidèles” qui sont tombés dans “la contradiction de Coré” Jude 4, 11 ; à l’image de ce Lévite rebelle, ils rejettent l’autorité de Christ pour se l’attribuer.
Soyons gardés de contester le service de “ceux qui sont à la tête” 1 Thessaloniciens 5. 12 ; la Parole nous recommande au contraire de leur être soumis1 Thessaloniciens 5. 12 et de les estimer très haut en amour3.
Même si nous avons été préservés de ces excès, veillons à ne pas ambitionner la fonction que Dieu a confiée à un autre.
Moïse, devant l’obstination et l’outrance des rebelles, proposa un test pour le lendemain au lieu de les consumer immédiatement (versets 5-7, 16-19) : Dieu ne se hâte pas de juger ; sa longue patience laisse du temps aux opposants pour se repentir – même si elle a un terme.
L’Éternel, contesté dans sa gloire et sa souveraineté, prit la défense de Moïse (verset 19). Sa gloire apparut pour la deuxième fois dans ce livre. Il annonça sa volonté de consumer le peuple, mais Moïse et Aaron, fidèles intercesseurs, firent appel à sa justice pour éviter un jugement total. Dieu fut ainsi davantage glorifié par cette intercession en grâce qu’il ne l’aurait été par le jugement.
Aux yeux de tous, Coré et les siens, ces “méchants hommes” (verset 26) 4, murés dans leur opposition, “descendirent vivants dans le shéol” (verset 33). C’était une “chose nouvelle” (verset 30), que Dieu n’avait jamais faite auparavant5 ; mais le jugement était à la mesure de la gravité de la faute. Terrifiant spectacle pour tout le peuple ! “C’est une chose terrible que de tomber entre les mains du Dieu vivant ! Car notre Dieu est un feu consumant” Hébreux 10. 31 ; 12. 29 et “l’orgueil va devant la ruine” Proverbes 16. 18.
Les encensoirs de ces hommes, au nombre de 250, furent conservés (versets 1-5). Ils devaient servir pour plaquer l’autel sous forme de lames aplaties. Elles rappelleraient aux fils d’Israël cette circonstance douloureuse et honteuse.
Lors de la période apocalyptique, Satan incitera deux hommes à contester le pouvoir du Seigneur : l’un sera la bête, chef de l’empire romain, détenteur du pouvoir politique ; l’autre sera le faux prophète, usurpateur du pouvoir religieux. Dathan et Abiram d’un côté, Coré de l’autre, sont une image de ces deux hommes.
De la même manière, associés dans une même haine de Dieu, ces deux séducteurs seront “jetés vifs dans l’étang de feu embrasé par le soufre” Apocalypse 19. 20.
Le N.T. distingue clairement :