Le septième et dernier malheur clôt la sentence de jugement que le Seigneur prononce sur les chefs hypocrites. Jésus, au début de son ministère, avait dépeint le caractère de ceux qui seraient bénis ; il avait prononcé des paroles de grâce en faveur de tous ces bienheureux (5. 3-12). Sa sévérité est ici d’autant plus grande à l’égard des chefs responsables qui ferment leur cœur et égarent le peuple. La grâce et la vérité s’allient toujours dans le message de l’Évangile ; mais la vérité reste sans grâce à l’adresse de ces hypocrites, qui vont combler la mesure de leur iniquité en condamnant Jésus.
En tout temps les hommes ont honoré leurs héros et leurs martyrs par des monuments ou des sépultures de belle apparence. Les Juifs faisaient de même à l’égard des prophètes et des justes qu’ils vénéraient. Mais les pharisiens étaient obligés de reconnaître que leurs propres pères avaient mis à mort les prophètes de l’Éternel. Maintenant à leur tour, avec des ruses de serpent, ils cherchaient à faire mourir le plus grand des prophètes que Dieu leur avait envoyéActes 3. 22-26. Jean le baptiseur les avait déjà traités de “race de vipères”, lorsqu’ils feignaient de fuir la colère de Dieu (3. 7, 12). Désormais la mesure de leur péché était comble ; ils ne pouvaient échapper au feu consumant (verset 33).
Relevons le contraste entre ces “malheureux” voués à la géhenne, et les “bienheureux” enfants du royaume :
Jésus annonce, comme une épreuve ultime à l’égard d’Israël responsable, l’envoi de messagers de la part de Dieu à la dernière heure : les apôtres et prophètes du début du christianisme. Ils seront traités avec mépris et cruauté, ce qui conduira la nation rebelle vers un jugement inexorable. Celle-ci sera d’autant plus coupable qu’elle aura eu un plus grand privilège que les générations précédentes2 Chroniques 36. 15, 16, et aura refusé le témoignage du Seigneur lui-même, puis celui de l’Esprit Saint. Le livre des Actes relate les décisions et les actions iniques des principaux du peuple et des pharisiens aveuglés (dont Saul de Tarse avant sa conversion) Actes 22. 4, 5 ; 26. 10-12 ; elles recevront leur rétribution.
Jésus englobe dans une même sentence de jugement tous ceux qui, au cours des siècles, ont versé le sang des justes. Celui “d’Abel le juste” crie vengeance depuis le début de l’histoire de l’hommeGenèse 4. 10 ; Hébreux 11. 4 ; 12. 24. Le sang de Zacharie2 Chroniques 24. 21 odieusement versé dans un lieu sacré sur l’ordre même du roi Joas, ne sera jamais oublié. Le sang des justes, des courageux témoins du Seigneur, a coulé en abondance au cours de l’histoire de l’Église (verset 34). Il sera répandu plus encore après la venue du Seigneur pour enlever les siens, lorsque la fausse Église, “Babylone”, s’enivrera du sang des saints de ces temps-làApocalypse 17. 6 ; 18. 20, 24 ; 19. 2. C’est pourquoi elle sera détruite en un seul jour.
La dureté du cœur des hommes s’affirme de génération en génération, et l’iniquité s’amoncelle pendant le temps de la grâce et de la patience de Dieu. Le croyant reconnaît avec honte que l’Église responsable est coupable de beaucoup de sang versé au cours des siècles ; les victimes sont encore nombreuses dans des pays christianisés en proie à des guerres religieuses. Dans les contrées où le calme semble régner, Dieu retient le mal pour l’instant selon sa grâce2 Thessaloniciens 2. 6, 7. Le chrétien fidèle peut alors, en toute liberté, témoigner pour le nom de Jésus le crucifié, le “Juste” dont le sang a coulé pour le salut du monde.
En la nommant deux fois, Jésus souligne le caractère implacable du jugement qu’il porte sur Jérusalem. Elle est appelée “la ville sainte” (4. 5 ; 27. 53), depuis que l’Éternel l’a choisie pour y faire habiter son nom. Elle conserve ce privilège, mais le Seigneur ne la reconnaît pour l’instant que comme une ville meurtrière. Les accents douloureux qu’il emploie à son égard témoignent de son amour refoulé, et de sa grâce refusée. La pensée de Dieu était de rassembler les enfants d’Israël, de former ce peuple pour sa louangeÉsaïe 43. 21 ; 49. 5, 6. Selon cette image touchante de la poule et de ses poussins (verset 37) Psaume 63. 8, Jésus était venu pour étendre ses ailes sur cette cité de Dieu en signe d’affection et de protection, mais en vain : “vous ne l’avez pas voulu”. Jérusalem ajoutera à ses crimes le meurtre de son Messie ; ce sang versé demeure sur elle et sur ses enfants (27. 25).
Dieu a sa maison dans Jérusalem. La gloire divine s’en est éloignée depuis longtemps, mais Jésus reconnaît encore le temple comme la demeure de Dieu, lors de son entrée dans la ville (21. 13). Maintenant, à cause du rejet de Christ et jusqu’à son retour en gloire, le temple est abandonné entre les mains des hommes : “votre maison”.
Cependant cette page sombre de l’Évangile se termine sur une note de lumière et d’espérance. Jésus reviendra dans la “sainte” ville au jour de son triomphe ; il sera acclamé comme le sauveur et le libérateur de son peuple. Le psalmiste a déjà donné le ton de la louange, à la gloire du Seigneur, en ce “jour” de bénédiction et de joiePsaume 118. 22-29 ; les foules ont anticipé cette scène future (21. 9).