Jésus monte à Jérusalem ; il gravit le chemin de “l’homme de douleurs”. C’est vers cette ville qu’il a “résolument dressé sa face”. Le lieu du sacrifice n’est plus loin maintenant, et Jésus tient encore à entretenir ses disciples de l’heure de sa mort ; mais il n’éveillera guère d’écho dans leur cœur. Plus tard le Saint Esprit leur rappellera ses paroles, et ils les comprendrontJean 14. 26 ; 16. 13, 14.
Une première fois, Jésus leur a montré la nécessité de ses souffrances et de sa mort, pour établir son royaume et bâtir son assemblée (16. 21) ; il affirme alors la responsabilité de la nation d’Israël, représentée par les principaux du peuple, dans le rejet et la mort de son Messie. A la deuxième annonce (17. 22, 23), la culpabilité des hommes dans leur ensemble est soulignée. Dans cette troisième prédiction, Le Seigneur ajoute que les nations s’associeront à ce forfait, et seront englobées dans la responsabilité de ce crimeActes 2. 23 ; 4. 26-28.
Jésus prend les disciples à part ; eux seuls recevront les confidences du Maître, qui se nomme ici le Fils de l’homme. Dieu l’a choisi pour la domination universellePsaume 8. 5-7, lui le second homme venu du ciel pour recevoir l’héritage dont le premier homme est déchu ; mais pour le racheter, il faut qu’il souffre, meure, puis ressuscite. Jésus, dans une poignante sobriété, annonce les outrages et les sévices que les hommes vont lui infliger. Il évoque d’abord la trahison de Judas, puis sa condamnation inique par le sanhédrin, enfin la cruauté des gens des nations. Sur l’ordre de Pilate, Jésus sera fouetté ; les soldats romains se moqueront cruellement de lui. Le supplice de la croix est annoncé ici pour la première fois ; seul le gouverneur de Rome pouvait l’autoriser ; mais Dieu l’avait prévu pour l’accomplissement des ÉcrituresPsaume 22. 16 ; Galates 3. 13. Enfin Jésus annonce chaque fois sa résurrection au troisième jour. Les disciples seront “lents de cœur à croire” cette vérité fondamentale de l’évangile, mais elle sera plus tard à la base de leur prédicationActes 2. 23, 26 ; 3. 15 ; 4. 10, 33 ; 10. 39.
Le Seigneur vient d’évoquer devant ses disciples les souffrances indicibles qui l’attendent, mais deux d’entre eux sont préoccupés de tout autre chose ; ils viennent à JésusMarc 10. 35 en compagnie de leur mère dont la présence ici paraît surprenante. Mais nous savons quelles sont les ambitions multiples de beaucoup de parents pour leurs enfants, et leur secret désir de se glorifier en eux. La démarche de cette mère semble plaider en sa faveur : elle rend hommage à Jésus comme au souverain du royaume ; elle le sollicite avec respect ; elle ne fait pas de demande pour elle mais pour ses fils, non pour le temps présent mais pour un temps futur. Tout contredit ce glorieux avenir, seule la foi peut l’envisager ; mais à cette foi s’ajoute une note d’égoïsme et de vanité : ces caractères n’ont pas leur place dans le royaume des cieux. Jésus avait parlé précédemment de douze trônes pour ses disciples (19. 28) ; les fils de Zébédée désirent être assis sur les plus proches du roi !
Le Seigneur reprend alors la mère avec les fils : “Vous ne savez ce que vous demandez”. Puisque vous désirez une place d’honneur à mes côtés, pouvez-vous endurer les souffrances avec moi ? Le royaume est au-delà. Cette coupe que le Seigneur évoque, lui seul devra la boire. Elle ne contient pas seulement les tourments cruels qu’il endurera de la part des hommes ; en cela les disciples partageront plus tard cette coupe avec lui ; mais elle est pleine aussi de la colère de Dieu contre le péché, et Jésus seul boira cette coupe amère à l’heure de l’expiation.
Le Seigneur montre ainsi à ses disciples que, pour eux comme pour lui, le chemin de la gloire passe par les souffrancesLuc 24. 26 ; 1 Pierre 1. 11 ; 4. 13 ; ce chemin est le nôtre aussi2 Timothée 2. 12. Il donnera à ces deux disciples la force d’endurer la prison, l’exil, le martyre ; mais il laisse à son Père, en toute dépendance, le soin d’attribuer les places dans le royaume (verset 23) ; elles sont “préparées” pour ceux qui l’aiment1 Corinthiens 2. 9. Jésus lui-même recevra le royaume de la main de son Père, car il est le Fils de son amourPsaume 2. 8 ; Jean 3. 35.
Les dix autres disciples sont indignés à l’égard des deux frères ; peut-être partagent-ils la même ambition. Alors Jésus les appelle tous auprès de lui ; il veut graver dans leur esprit un enseignement que seule la foi peut saisir, car il est en contraste absolu avec l’esprit du monde. Les nations sont dominées par des chefs ambitieux, autoritaires, usurpateurs souvent. Chacun dans ce monde cherche à s’élever pour occuper une meilleure place ; dans l’assemblée aussi, cela peut se voir2 Corinthiens 11. 18 ; 3 Jean 9. La grandeur dans le royaume des cieux est faite d’humilité (18. 4), de renoncement, d’acceptation du mépris de la part des méchants. Elle réside aussi dans l’abaissement pour le service ; la première place sera réservée à l’esclave, celui qui ne s’appartient plus et qui n’est là que pour servir les autres ; les apôtres se prévaudront de ce titre de gloire dans l’en-tête de leurs épîtres.
Jésus termine en se présentant comme l’exemple suprême : il s’est d’abord anéanti, lui le Fils de Dieu, en devenant un homme ; puis il s’est abaissé lui-même en prenant la position d’esclave. Dans ce service méprisé, il est maintenant obéissant jusqu’à la mort (verset 28) Philippiens 2. 5-11. Il offrira sa vie en rançon pour tous les hommes1 Timothée 2. 6, lui seul pourra le fairePsaume 49. 8. Il payera pour la libération de tous ceux qui croiront en lui (verset 28). Cet abaissement va au devant de la gloire ; la grandeur future du Fils de l’homme sera à la mesure du prix payé pour la rançon de tous les rachetésÉsaïe 53. 12.