Jésus vient de donner ses ordres à ses disciples, mais il poursuit lui-même avec patience son ministère à l’égard d’Israël (4. 23 ; 9. 35). Dans l’intervalle, Jean le baptiseur a été mis en prison pour un motif mentionné plus loin (14. 3, 4). La captivité est une dure épreuve pour lui ; il avait rendu un remarquable témoignage au sujet de celui qui venait après lui, exaltant sa grandeur et sa dignité. Il avait pu dire : “Il faut que lui croisse et que moi je diminue” Jean 3. 30. Il réalise maintenant que cette parole est plus éprouvante qu’il ne l’avait pensé. Le découragement le conduit à la perplexité et au doute, mais son hésitation momentanée quant à la personne du Seigneur n’altère pas sa confiance en sa parole : il s’inclinera devant la réponse de Jésus.
Jean n’avait pas vu le royaume s’instaurer en gloire, ni le Messie paraître en libérateur. Qu’attendait-il, entouré encore d’un noyau de disciples (verset 2 ; 9. 14) ? Il lui était dur de s’effacer, alors qu’il estimait sans doute avoir sa place dans ce glorieux royaume. Que fallait-il penser de ces “œuvres du Christ” ? Ne pouvait-il pas bénéficier de l’une d’elles, pour être délivré de cette injustice qui l’avait jeté au fond d’une prison ?
Mais, “ayant ouï parler des œuvres du Christ”, comment pouvait-il “en attendre un autre” ? Non, il ne s’était pas trompé, celui qui devait venirMalachie 3. 1 était bien là, mais il ne pouvait entrer en gloire dans son temple, car son peuple ne voulait pas se repentir avant de le recevoir. Cependant ses œuvres le faisaient reconnaître (verset 5) Ésaïe 29. 18 ; 35. 5 ; cette miséricorde manifestée dans la délivrance de tous ces malheureux était certes plus glorieuse encore que l’accession au trône de David.
Les disciples de Jean sont chargés d’une bien belle mission en retour. Ils rapporteront à leur maître les choses entendues, l’évangile annoncé aux pauvres. Ils témoigneront des choses vues de leurs yeuxLuc 7. 21 : ces miracles extraordinaires qui confirmaient la parole divine. Cependant, ce témoignage doit être accompagné d’une parole secrète pour la conscience de Jean : “Bienheureux est quiconque n’aura pas été scandalisé en moi” ! Jésus nous parle aussi ; ne perdons jamais confiance, lors même que nos circonstances ne sembleraient pas en accord avec ce que nous avons déjà éprouvé de son amour.
Les disciples de Jean sont partis ; les foules ont pu s’interroger sur leur étrange mission. Jésus, dans sa réponse à la perplexité de son serviteur, a placé sa répréhension sous le voile de la grâce ; il va maintenant parler de lui devant les foules, et rendre un témoignage remarquable à sa personne et à son service. Dans le désert, Jean avait été cette voix forte qui ne s’était pas tue, malgré le danger (3. 3, 4). Il ne s’était pas paré du vêtement des cours royales, mais avait revêtu celui des prophètes qui avaient été persécutés. Dans une profonde humilité, il avait manifesté la grandeur d’un prophète, et la foule le savait bien (21. 26).
“Qu’êtes-vous allés voir” ? répète Jésus avec insistance. Vous avez reconnu en lui un prophète, et vous vous êtes attachés à lui, sans discerner que son message tout entier était concentré sur celui qui venait après lui. Oui, il est plus qu’un prophète, car lui seul entre tous a eu l’honneur de préparer le chemin du Messie, puis de le voir de ses yeux et de le présenter à son peuple. Au reste, il est le seul prophète (à part Jésus le fils de Dieu) dont la venue a été annoncéeÉsaïe 40. 3 ; Malachie 3. 1 ; 4. 5.
En attendant que les desseins de Dieu se réalisent (verset 13), une voie s’ouvre pour l’entrée dans le royaume des cieux “depuis les jours de Jean le baptiseur” (verset 12). Le Seigneur dans son enseignement, indique les conditions d’entrée dans son royaume ; celui-ci ne peut être pris que par violenceLuc 13. 24. Il l’est par ceux qui, renonçant à eux-mêmes et aux espérances juives, prennent l’énergique décision de franchir toutes les oppositions pour suivre un Roi rejeté.
Aujourd’hui, le roi est dans le ciel ; mais sur la terre l’opposition est toujours la même, et les “timides” Apocalypse 21. 8 n’entrent pas dans le royaume. Bienheureux ceux qui s’y trouvent maintenant : ils sont dans un domaine de bénédictions spirituelles que n’ont pas connues les plus grands prophètes (verset 11).
Jésus avait fait entendre les doux sons de la grâce divine, comme ceux d’une flûte pastorale harmonieuse et pleine de charme. Jean avait “chanté des complaintes”, une mélodie grave et austère pour susciter la contrition, en vue de la repentance. Les oreilles étaient restées fermées (verset 15), les cœurs et les consciences aussi. Jésus compare ce peuple à des enfants qui refusent toutes les propositions de leurs camarades.
De toute manière, les hommes ont toujours trouvé des prétextes pour tourner le dos à la prédication de l’évangile. La sagesse de Dieu a trouvé bon de le faire parvenir aux “petits enfants” (versets 19, 25), à ceux qui croient sans discuter et ne se prévalent pas de leur propre justice. Ils justifient Dieu en acceptant sa grâce révélée en Jésus ; tels sont les enfants de la sagesse.