Après une longue parenthèse sur la propagation de l’évangile du milieu juif au monde païen, Luc reprend le récit interrompu au verset 4 du chapitre 8. Le verset 19 ouvre une nouvelle section du livre des Actes car l’on voit apparaître un nouveau centre de diffusion de l’évangile. Une assemblée se forme spontanément hors du pays d’Israël à Antioche de Syrie1, au milieu d’un monde païen. Par la libre action de l’Esprit Saint, Dieu agit dans cette ville d’une manière souveraine, indépendamment de la présence d’un apôtre. Dieu y conduit de simples croyants pour commencer cette œuvre nouvelle. Antioche, la troisième ville de l’empire romain, pas plus que Rome, la capitale, ne pourra jamais s’enorgueillir d’avoir été fondée par un apôtre.
Dieu a permis que les disciples à Jérusalem soient dispersés lors de la persécution survenue après la mort d’Étienne (8. 1). La porte de la grâce fermée aux Juifs par le martyre d’Étienne s’ouvre aux nations. Dieu commence cette œuvre de grâce en utilisant divers relais. La méthode divine pour prévenir le choc des cultures et des traditions est admirable ! Ceux de Judée n’annoncent l’évangile qu’aux Juifs. Certains d’entre eux, originaires de Chypre et d’Afrique du Nord, sont plus ouverts. Un nouveau relais entre alors en jeu : arrivés à Antioche, ils n’hésitent pas à parler du Seigneur aux païens grecs. La substance de leur prédication est simple : ils annoncent le Seigneur Jésus. Le Seigneur bénit ces pionniers qui n’ont pas reculé devant les barrières culturelles : un grand nombre de Grecs se tournent vers le Seigneur et une assemblée se forme. Tel est le fruit de la persécution, de la fidélité et de l’amour du prochain.
La nouvelle de la conversion des païens arrive à Jérusalem. Et la grâce continue d’agir. Barnabas, le fils de consolation (4. 36, 37), est délégué à Antioche. Il a la confiance des frères de Jérusalem. De plus il est originaire de Chypre, comme certains pionniers juifs d’Antioche. Que le Seigneur suscite aujourd’hui des hommes et des femmes aussi disponibles que Barnabas, prêts à être envoyés pour l’évangile en terres étrangères !
L’assemblée à Jérusalem est un autre exemple de disponibilité. Elle n’hésite pas à se séparer de Barnabas, l’un de ses meilleurs éléments, pour le service du Seigneur. Il était “homme de bien, plein de l’Esprit Saint et de foi”.
Barnabas n’arrive pas à Antioche en inquisiteur ou pour simplement voir si tout est en ordre. Il y vient dans un état d’esprit entièrement positif pour constater ce que la grâce de Dieu a produit indépendamment des apôtres. En voyant le grand nombre de païens convertis, Barnabas se réjouit et les exhorte à demeurer attachés au Seigneur de tout leur cœur. Dieu bénit son ministère et multiplie les conversions à tel point qu’une grande foule est ajoutée au Seigneur. L’influence bénie de Barnabas n’est pas due à ses propres mérites mais à l’action du Saint Esprit en lui, dans sa sphère d’activité et de responsabilité. Rappelons-nous toujours le magnifique exemple de Barnabas quand nous désirons aider de nouveaux convertis.
Conscient de ses limites en face d’une œuvre toute nouvelle, Barnabas va chercher Saul à Tarse pour l’aider à enseigner ces nouveaux convertis. Barnabas manifeste dans ce geste beaucoup d’humilité car il aurait pu facilement profiter de sa popularité à Antioche. Il sait que Saul ne sera jamais son adjoint car Dieu lui a confié une mission particulièreGalates 1. 15, 16. Dans une heureuse communion, ils enseignent ensemble l’assemblée pendant un an. C’est là qu’en voyant vivre les disciples on leur donne le nom de chrétiens, peut-être un sobriquet appliqué aux disciples du Christ ou simplement une étiquette pour classer ce nouveau groupe. Mais par leur témoignage de fidélité, les premiers chrétiens donnèrent à ce surnom un sens honorable. Ils en firent même un titre de gloire car il contient le nom de Christ. Remarquez que les disciples ne furent pas nommés d’après Paul ou Barnabas. Ce sont les hommes qui aiment à se réclamer de leurs conducteurs. Le surnom de chrétien démontre, d’une part, que les serviteurs de Dieu n’attiraient pas l’attention sur eux-mêmes mais sur Christ et, d’autre part, que les disciples, si différents par leurs origines, suivaient Christ et non des hommes. Seul Christ les unissait, non leur culture, leur race ou même leur langue. Un nouvel étalon est introduit. Ce n’est plus qui ils sont comme précédemment (des disciples, des nazaréens) mais de qui ils sont (de Christ).
L’assemblée à Antioche est une assemblée modèle par son zèle et son équilibre. Les frères enseignent la doctrine, évangélisent dans leur milieu ou partent en mission. Elle est aussi remarquable par sa croissance : quelques disciples annoncent d’abord l’évangile, puis un grand nombre se tourne vers le Seigneur, enfin une grande foule est ajoutée au Seigneur.
Aux yeux du Seigneur, l’assemblée forme un tout. Il était donc important que l’assemblée d’Antioche ne se développe pas d’une manière indépendante. Rien n’est plus éloigné de l’esprit de l’évangile qu’un esprit d’indépendance car comme membres du corps de Christ nous avons tous besoin les uns des autres et nous devons avoir un égal soin les uns des autres1 Corinthiens 12. 25.
Les contacts avec l’assemblée de Jérusalem sont entretenus. Des prophètes descendent de Jérusalem à Antioche. Ainsi “l’unité de l’Esprit par le lien de la paix” est maintenueÉphésiens 4. 3, tout en préservant la liberté en Christ. Cette unité se manifeste d’une manière concrète par l’envoi d’un don pour les chrétiens de Judée qui, selon une prophétie d’Agabus, vont connaître une grande famine. Agabus est
Pour manifester leur sympathie envers des membres du corps de Christ1 Corinthiens 12. 26 et subvenir à leurs besoins d’une manière tangible, les frères d’Antioche font parvenir un don aux
Dieu n’épargne pas les difficultés mais donne le moyen de les surmonter. Les frères de Jérusalem en font l’expérience. La foi et la sagesse prévoyante des frères d’Antioche est exemplaire. Anticipant la famine annoncée, ils envoient des ressources à Jérusalem. Ceci est d’autant plus remarquable qu’ils ne seraient eux-mêmes probablement pas épargnés à Antioche. Sous l’empereur Claude (41-54 ap. J.-C.), on sait qu’une grande partie de l’empire connut la sécheresse pendant plusieurs années et qu’elle causa de sérieuses restrictions alimentaires.