Porcius Festus, le successeur de Félix, ne perd pas de temps pour se rendre à Jérusalem. Il lui est indispensable de gagner la faveur des dirigeants religieux de la capitale. Ils tentent de profiter de son inexpérience et lui parlent immédiatement de Paul qu’ils veulent faire venir à Jérusalem pour le tuer. Leur haine ne s’est nullement assoupie en deux ans. Festus comprend immédiatement la manœuvre et l’avantage qu’il peut tirer de la situation en montrant de la bonne volonté. Certes, il ne peut confier le sort de Paul, un citoyen romain, au tribunal d’un peuple asservi. Il commencerait son mandat par un déni de justice ! Paul restera donc à Césarée. Mais Festus accepte que Paul soit réexaminé en présence de Juifs influents.
De retour à Césarée peu de jours après, Festus donne ordre que Paul comparaisse devant lui. L’apôtre aurait pu se sentir frustré. Lysias, puis Félix, avaient déjà reconnu son innocence. Qu’en serait-il de Festus ?
Les mêmes accusations recommencent, les mêmes mensonges sont proférés. Paul se défend une nouvelle fois mais rien n’y fait. Quoique Festus soit convaincu de l’innocence de Paul, il sait que son avenir politique dépend des Juifs. Maintenant qu’il a démontré qui est le maître, il peut se montrer un peu plus conciliant envers les Juifs et propose à Paul de monter à Jérusalem afin d’y être jugé. A-t-il déjà oublié que Paul est citoyen romain et non un simple sujet de l’empire ? Une nouvelle fois, la justice est travestie au bénéfice d’intérêts personnels.
Mais une bombe éclate : Paul en appelle à César ! Festus n’avait jamais pensé à cette éventualité. Il est à la fois soulagé et piégé : soulagé, parce qu’il peut se débarrasser d’un cas gênant ; piégé, car comment peut-il envoyer un détenu à César sans chef d’accusation (verset 27) ? Après avoir conféré avec le conseil, Festus ne peut qu’accéder à la demande de Paul. (La demande d’être jugé par César ne pouvait être invalidée que pour un meurtrier, un pirate ou un bandit attrapé en flagrant délit.) Paul fait ainsi un nouveau pas en direction de Rome. S’il en appelle à César et refuse d’aller se faire juger à Jérusalem, ce n’est pas parce qu’il a davantage confiance dans le tribunal de l’empereur. Sans doute en appelle-t-il à César parce qu’il s’est rendu compte que son ministère est terminé à Jérusalem, d’autant plus qu’il a depuis longtemps un ardent désir d’aller à RomeRomains 1. 10. Autant y aller prisonnier que pas du tout !
Dans cette affaire, Festus, à son insu, est un instrument utilisé par le Seigneur pour accomplir la promesse qu’il avait faite à l’apôtre (23. 11). Une nouvelle fois, on réalise que toutes choses servent DieuPsaume 119. 91 et travaillent ensemble pour le bien de ceux qui l’aimentRomains 8. 28.
Le roi Agrippa II était le dernier représentant de la couvée de serpents des Hérode. Son père Agrippa I avait fait tuer l’apôtre Jacques et arrêter Pierre. Quand celui-ci mourut (12. 23), Agrippa II avait 17 ans. Bien qu’Édomite de race, il était Juif de profession et connaissait le judaïsme.
Le roi descend à Césarée pour présenter ses hommages au nouveau gouverneur. Il vient accompagné de sa sœur Bérénice qui était également la sœur aînée de Drusille, la femme de Félix. Festus pense que le roi peut l’aider à trouver une solution au problème de Paul (Agrippa passait pour un expert en matière religieuse). Mais le gouverneur ignore qu’il maintient dans le prétoire un des plus grands ambassadeurs du Dieu des cieux, plus grand que l’empereur à Rome parce qu’il est un enfant de Dieu, plus sage que tous les philosophes parce qu’il possède la seule vraie sagesse.
Festus explique au roi la situation d’une manière qui peut paraître parfaitement correcte à première vue. Mais, à l’examen, il bafoue en fait la justice pour gagner la faveur du peuple. S’il avait été réellement intéressé par le cas, il aurait trouvé nombre de personnes pour témoigner de la conduite irréprochable de Paul. Aucun chrétien ne s’est présenté spontanément pour défendre Paul pendant toutes les audiences et personne n’a été appelé à la barre pour témoigner en faveur de l’apôtre. Telle est souvent la justice de ce monde envers les chrétiens.
Festus parle de la religion juive comme d’un culte religieux, (litt. : une “superstition”, ou “la crainte des dieux”). Cette façon de s’exprimer montre son mépris et son ignorance de cette religion. On peut se demander comment le roi Agrippa a pu accepter pareille insulte vis-à-vis de sa religion car le judaïsme est monothéiste. De plus, il existait bien avant toutes les superstitions des Romains et des Grecs.
Festus parle aussi d’un certain Jésus mort mais que Paul affirme être vivant. Cela montre que Paul a réussi à dégager un point essentiel : la mort et la résurrection de Jésus. Malgré son ignorance au sujet de la nation qu’il devait gouverner, Festus a saisi quelques éléments du message de l’apôtre mais il ne se doute pas que ce Jésus dont il parle si légèrement sera un jour son juge.
Agrippa demande d’entendre Paul. Le gouverneur a atteint son but : il a réussi à intéresser Agrippa au cas de Paul en vue de se décharger d’une partie de sa responsabilité. L’audience est accordée, mais elle n’a pas de caractère officiel car le roi n’a aucun droit pour conduire un procès en Judée, hors de son territoire. De toute manière, le prisonnier a fait appel à César.
L’apôtre est amené le lendemain dans une salle d’audience. Quel contraste entre l’humilité de l’apôtre et le grand apparat d’Agrippa et de Bérénice qui n’ont que le désir de paraître ! Paul n’est nullement ébloui par tant de faste. Pour tous les notables assemblés, Paul n’a que peu d’importance mais pour Dieu qui veille sur toute la scène, c’est son serviteur qui a la plus grande valeur.
Durant le débat, l’embarras de Festus est visible. Il ne sait quel parti prendre. (De toute manière, il n’avait pas à prendre parti, car son devoir était de libérer Paul.)
Pour Festus, il s’agit d’un problème religieux qu’il n’arrive pas à comprendre, encore moins à résumer dans une lettre destinée à l’empereur. Il ne veut pas perdre la face. Lui qui se veut le maître de la Judée, doit chercher de l’aide auprès de ses sujets pour rédiger le chef d’accusation. La situation est complètement retournée ! Autrefois, comme aujourd’hui, les intérêts politiques l’emportent souvent sur la justice objective.