Judas n’avait pas pu être démasqué par ses condisciples. Son comportement ne laissait pas voir l’état de son cœur, mais le Seigneur le connaissait et il avait déjà dit, en une autre occasion : “L’un d’entre vous est un diable” Jean 6. 70. Judas avait donc masqué son réel état intérieur. Le discernait-il lui-même ? Rien n’est moins sûr, car le diable est celui qui aveugle les pensées des incrédules2 Corinthiens 4. 4. Le pire des aveuglements est celui qui nous cache notre état de perdition et Satan s’y applique avec ardeur. A l’occasion du souper de Béthanie, une circonstance avait levé un peu le voile sur l’état moral de Judas : il était voleur, nous dit Jean, et prenait ce qu’on mettait dans la bourseJean 12. 6. L’amour de l’argent a donc été la porte d’entrée par laquelle Satan a pu pénétrer dans son cœur, là où l’amour de Jésus n’avait pas pu prendre place. Le processus dramatique était dorénavant enclenché, irrésistible et irréversible. Un verset des Proverbes va se vérifier tragiquement : “L’homme chargé du sang d’une âme fuira jusqu’à la fosse… qu’on ne le retienne pas !” Proverbes 28. 17
Les sacrificateurs manifestent une joie cynique en concluant avec le traître un abominable marché. Instruments dociles aveuglés par Satan, ils sont menés par lui. Quant à Judas, l’occasion favorable sera trouvée aisément, car dès ce moment, le Seigneur se laissera prendre, son heure étant venue.
Il est inutile d’argumenter sur les raisons qui ont conduit le Seigneur à choisir Judas. Les Écritures le prévoyaient, mais cela ne diminue en rien la responsabilité de cet homme. Son sort tragique est révélé pour nous montrer que les plus grands privilèges ne peuvent donner la vie. Seule la grâce de Dieu, saisie par la foi, nous assure le salut éternel.
Quel lieu fallait-il choisir pour sacrifier la Pâque ? Les disciples le demandent à Jésus, car ce sera son logis (verset 14). Tout était préparé à l’avance, même le signe indicatif de cet homme portant une cruche d’eau. Ce n’est pas le hasard qui dirige les événements, même lorsque tout nous paraît aléatoire. La providence divine est au-dessus de la scène et tout concourt à l’accomplissement de la volonté du Seigneur. Ne tombons cependant pas dans le piège du fatalisme, mais soyons conscients qu’il y a des choses qui sont à notre entière responsabilité, tandis que d’autres, qui nous échappent, doivent être laissées au Seigneur en lui faisant confiance. Les deux disciples en question ont cru la parole de Jésus, ils ont obéi et ont eu la joie de trouver “tout comme il leur avait dit” (verset 16).
Cet épisode de la recherche du lieu convenable comporte un enseignement pour nous. Que désirons-nous d’abord dans notre recherche d’un lieu de culte ? Si c’est la présence du Seigneur, il nous montrera où elle peut être goûtée. Nous réaliserons alors que nous sommes chez lui : “mon logis”. Dans notre recherche, nous nous laisserons guider par “l’homme portant une cruche d’eau” représentant le Saint Esprit qui veut toujours nous conduire à Christ.
Les détails du souper de la Pâque ne sont pas indiqués dans les évangiles. Luc seul signale le grand désir du Seigneur de réunir les siens avec lui à cette occasionLuc 22. 15. Ce qui est mis en évidence lors de ce souper, c’est d’une part la désignation de Judas comme traître et d’autre part, en Jean, le lavage des pieds des disciples par le Seigneur. La Pâque elle-même n’est pas relatée avec précision, car seule comptait sa réalisation parfaite à la croix. Lorsqu’on a la réalité, on ne s’attache plus aux images. Elles gardent toutefois leur valeur pour nous montrer des aspects particuliers de la réalité que nous possédons.
Judas était donc là, à table avec Jésus. L’hypocrisie caractérisait cet homme pervers qui ira jusqu’à demander lui aussi : “Est-ce moi, Rabbi ?” Matthieu 26. 25 Pour les onze autres disciples, poser cette question est un signe de vraie humilité et d’absence de confiance en soi ; c’est une heureuse disposition. Le signe donné par Jésus pour désigner le traître est l’accomplissement d’une parole prophétique : “Mon intime ami aussi, en qui je me confiais, qui mangeait mon pain, a levé le talon contre moi” Psaume 41. 10. En effet, le Seigneur avait traité Judas en ami intime, comme chacun des onze autres ; il lui avait aussi fait confiance en lui remettant la bourse commune. Maintenant, par ce geste symbolique, Jésus montre à Judas qu’il aurait pu partager la joie de la communion avec lui-même et les siens. Mais c’était trop tard : son cœur était resté vide de l’amour de Jésus et maintenant il sera rempli par Satan lui-mêmeJean 13. 27. Solennel avertissement pour tous ceux qui, jusqu’ici, ont fermé leur cœur à Jésus : la place sera, tôt ou tard, occupée par Satan ou ses agents.