Le scribe qui s’approche de Jésus pour le questionner à son tour semble animé de meilleurs sentiments que les autres. Déjà convaincu de la sagesse de Jésus par la réponse donnée aux sadducéens, il s’adresse à Jésus en lui reconnaissant le titre de maître (verset 32). N’ayant aucunement la pensée de contester, ce scribe veut connaître la parole du Seigneur à l’égard de la prééminence d’un commandement de la loi. Il ne pensait certainement pas à des ordonnances de la loi cérémonielle, ni même exclusivement aux dix articles du décalogue. Sa réflexion qui suit démontre le caractère éminemment spirituel de la question posée.
Quel contraste avec les pharisiens que nous avons vus à plusieurs reprises dans cet évangile et qui ne s’attachaient qu’aux formes et à ce qui a de l’apparence ! Combien le Seigneur a dû être encouragé à cette occasion ; c’était un rafraîchissement dans sa dernière étape vers le Calvaire. Oui, le premier de tous les commandements, c’est l’amour, et le second, c’est encore l’amour : d’abord l’amour pour Dieu, ensuite, l’amour pour nos semblables. Les deux sont liés et forment un tout solide et équilibré, ayant leur source dans le cœur même de Dieu. L’amour est la somme de la loi, il en est la plénitudeRomains 13. 10, et “toute la loi est accomplie dans une seule parole, dans celle-ci : Tu aimeras ton prochain comme toi-même” Galates 5. 14. L’apôtre Jacques aussi cite ce verset : “Tu aimeras ton prochain comme toi-même”, en l’appelant “la loi royale” Jacques 2. 8.
Appliquons-nous à garder les commandements du Seigneur, “car c’est ici l’amour de Dieu, que nous gardions ses commandements” 1 Jean 5. 3, mais n’en négligeons surtout pas le premier, sans quoi notre obéissance même deviendrait du légalisme.
La réponse du scribe rejoint la parole du prophète Osée lorsqu’il dit : “J’ai aimé la bonté, et non le sacrifice, et la connaissance de Dieu plus que les holocaustes” Osée 6. 6. Le Seigneur exprime ouvertement son approbation à la réponse de cet homme en lui disant : “Tu n’es pas loin du royaume de Dieu” (verset 34). Pour entrer dans le royaume de Dieu, il faut être né de nouveauJean 3. 3-5 ; cela ne se peut que par l’opération de la grâce de Dieu dans le cœur. La porte qui nous permet d’y entrer, c’est l’amour, mais celui de Jésus pour nous. Nous y répondons par notre obéissance à sa Parole. Le scribe du récit n’était pas encore arrivé à ce point, mais tout porte à croire qu’il aura pu être l’un des convertis après la prédication de Pierre à la Pentecôte.
Tous les scribes n’avaient pas la noblesse de celui que nous avons vu dans les versets précédents. Le texte similaire de l’évangile selon Matthieu dit que ces scribes étaient du parti des pharisiensMatthieu 22. 41. Le Seigneur soulève donc d’emblée le paradoxe présenté par le psaume 110 : comment David peut-il appeler le Christ son Seigneur, alors qu’il est l’un de ses descendants ? Il n’y a qu’une solution, c’est que le Christ soit plus qu’un descendant de David, donc réellement Fils de Dieu. Refuser au Messie ce caractère divin conduit les scribes à achopper inévitablement sur la parole de Dieu. Ses détracteurs se trouvent donc confondus, mais les foules prennent plaisir à l’entendre (verset 37). On aimerait que ce désir d’entendre le Seigneur soit motivé par la foi, mais il n’y paraît pas, vu ce qui s’est passé quelques jours plus tard.
Réalisant combien l’enseignement des scribes pouvait être pernicieux, le Seigneur avertit la foule. Matthieu est beaucoup plus complet lorsqu’il rapporte les paroles de Jésus. Tout le chapitre 23 de son évangile est un véritable réquisitoire contre les scribes et les pharisiens. Marc, lui, ne souligne que l’orgueil et l’hypocrisie de ces personnes qui cachent par de longues prières leur amour des honneurs et de l’argent. Ils dépouillent et méprisent les faibles, contrairement à l’enseignement de la loi qu’ils connaissaient pourtant bien. Ce langage de Jésus, peu habituel dans la bouche de notre Sauveur, montre combien l’orgueil religieux est abominable pour notre Dieu.
A nouveau, un contraste est placé devant nos yeux par cette pauvre veuve. Les scribes et les pharisiens hypocrites sont laissés à la préparation de leur complot et le cœur du Seigneur trouve sa joie à signaler la richesse de cette pauvre veuve. N’est-ce pas ce que dira Jacques quand il parlera des riches et des pauvres : “Dieu n’a-t-il pas choisi les pauvres quant au monde, riches en foi et héritiers du royaume qu’il a promis à ceux qui l’aiment” Jacques 2. 5 ?
Assis vis-à-vis du temple, Jésus regarde ceux qui jettent la monnaie dans le tronc. Précédemment, il avait vu ceux qui trafiquaient dans sa maison et il les en avait chassés. Maintenant, il regarde comment on entre chez lui et ce qu’on apporte pour Dieu. Le Seigneur apprécie ce que l’homme aurait tendance à mépriser : deux pites, car il regarde au cœur.
Ce regard du Seigneur se pose aussi sur nous lorsque nous allons dans le lieu où nous rendons culte. Il ne s’arrête pas trop à ce que nous donnons pour la collecte, car il regarde plutôt à ce que nous gardons pour nous. Mais avant tout, il considère ce qui est dans notre cœur.
Venons-nous au culte pour y apporter de belles mélodies et des prières éloquentes, ou venons-nous dire à notre Dieu la reconnaissance qui remplit nos cœurs, le louer pour la multitude de ses bienfaits et par-dessus tout pour le don de son cher Fils ? Ce sera peut-être avec des mots tout simples, mais avec un cœur brûlant.
Sur le plan matériel, cette veuve est pour nous un exemple. Nous arrive-t-il de donner de notre pénurie ? Dans nos pays nantis, nos ressources sont souvent bien au-dessus de la pénurie. Il y a néanmoins des cas de réelle difficulté financière, et ceci peut arriver à chacun. Allons-nous alors diminuer de façon draconienne ce que nous avions prévu pour le service du Seigneur ? Non, pensons à la veuve de notre récit, et comme elle, faisons confiance au Seigneur en lui donnant la primauté sur toutes choses.