Ce chapitre présente la parabole de l’esclave inutile et la guérison des dix lépreux qui n’est pas rapportée dans les autres évangiles.
Le récit solennel de Lazare et du riche s’adressait aux pharisiens moqueurs et incrédules. L’homme riche avait en fait complètement manqué sa vie. Trompé par ses richesses et aveuglé par le faste de ce monde, il avait négligé le salut de son âme, pour un jugement éternel.
Le Seigneur se tourne maintenant à nouveau vers ses disciples pour leur parler de l’esprit dans lequel ils devaient servir : grâce, humilité, foi et pardon, sans oublier la reconnaissance envers Dieu.
Dans ce monde, où se décide le sort éternel de tous les hommes, où l’on côtoie des êtres faibles et sans défense, “un de ces petits” (verset 2), la conduite des disciples devait être particulièrement prudente : éviter d’être une occasion de chute pour quelqu’un ou au contraire ne pas porter de péché à cause de lui ; mais toujours manifester un esprit de pardon.
Le monde est rempli d’occasions de chute pour tous les hommes. Tout concourt à détourner les âmes de Christ, le Sauveur rejeté, qu’on ne peut suivre qu’en portant sa croix (14. 27). La conduite des disciples alors, comme celle des chrétiens maintenant, doit être un témoignage pour amener les âmes à Christ, et non pas pour les faire tomber en dressant des obstacles sur le chemin des faibles. Le mot scandale (verset 1) implique la pensée de la détente d’un piège. Par exemple, la séduction de la chair vers la femme étrangèreProverbes 7. 23 est un piège de Satan, hélas ! trop fréquent. Et le monde est rempli de tels scandales ou occasions de chute, avant que ne sonne l’heure de la consommation du siècle, où le fils de l’homme enverra ses anges pour cueillir de son royaume tous les scandales et exercer le jugementMatthieu 13. 41.
Celui qui est une occasion de chute pour quelqu’un peut ainsi devenir à son insu un instrument de Satan. Le Seigneur aime les petits qui se confient en lui (verset 2) Matthieu 18. 6, et c’est une chose très grave de les scandaliser. Ces exhortations sont reprises par l’apôtre Paul pour inviter tous les chrétiens à marcher soigneusement pour ne pas entraîner “le frère pour lequel Christ est mort” Romains 14. 15 ; 1 Corinthiens 8. 11 en dehors du chemin de la foi.
Il faut donc veiller constamment sur soi-même, soit pour éviter d’être en scandale aux autres, soit aussi pour ne pas se laisser entraîner par de mauvais exemples ou de mauvaises compagnies1 Corinthiens 15. 33. Ce sain équilibre dans la vie chrétienne se réalise par le jugement de soi-même, associé à un esprit de grâce à l’égard des autres. Celui-ci revêt deux aspects :
Cette réponse en pardon doit s’exercer jusqu’à soixante-dix fois sept foisMatthieu 18. 22, comme Dieu en Christ nous a pardonnés, sans limite.
L’amour du prochain demandé par la loi invitait déjà :
Le Seigneur nous a appris à nous aimer les uns les autres comme lui nous a aimésJean 13. 34 et non plus comme chacun s’aime soi-mêmeLévitique 19. 18. Quel prix doit avoir pour nos cœurs l’appel du Seigneur à réaliser cet esprit de support mutuel et de pardon dans l’amourÉphésiens 4. 32 ; Colossiens 3. 13 !
Il est touchant de voir que les disciples sont sensibles aux paroles de leur Maître et lui demandent d’augmenter leur foi. Le Seigneur répond, comme toujours, selon les vrais besoins des siens ; il ne s’agit pas de la mesure de la foi, mais de sa source et de sa vigueur. Le grain de moutarde (la plus petite semenceMatthieu 13. 32) possède le principe de vie en lui-même pour croître et devenir un grand arbre. Si notre foi trouve sa source en Dieu, alors “toutes choses sont possibles à celui qui croit” Marc 9. 23 et “rien ne nous serait impossible” Matthieu 17. 20.
L’exercice pratique de la foi et du service pour Christ implique la prière et le jeûne (ce que les disciples avaient oublié en descendant de la montagne de la transfigurationMatthieu 17. 21) mais aussi l’humilité et l’obéissance.
Le Seigneur envisage le cas d’un homme qui possède un esclave envoyé dans les champs pour labourer (la figure de l’évangéliste) ou paître le bétail (figure du pasteur et du docteur). En rentrant des champs, l’esclave ne cesse pas d’appartenir à son maître pour le servir ; son service continue pour lui préparer et servir le repas ; ensuite il prendra soin de lui-même. C’est ainsi que pour le croyant, la foi qui dispose de la puissance de Dieu pour accomplir sa volonté ne peut se séparer de l’obéissance à la Parole.
Nous sommes invités à servir le Seigneur joyeusement, de cœur. Dieu n’a pas besoin de nous ; mais, s’il se plaît à nous engager à son service, c’est un honneur qui nous est accordé. Notre propre estimation de nous-mêmes et de notre service doit être celle-ci : nous n’avons fait que ce que nous étions obligés de faire selon le commandement du maître à qui nous appartenons (verset 10) ; en définitive, nous sommes des esclaves inutiles (mais pas paresseux).
Le Seigneur nous donne cet enseignement nécessaire pour le temps de notre service sur la terre. Dans le ciel, il se plaira toutefois à récompenser ses esclaves de ce que sa propre grâce avait produit par eux. “Bien, bon et fidèle esclave… entre dans la joie de ton maître” Matthieu 25. 21.
Lui, Seigneur et Maître, conservera alors, et pour l’éternité, sa place d’esclave volontaire, pour faire mettre ses serviteurs à table et les servir dans la maison de son Père (12. 37).