Le jour arriva où les jugements que Dieu avait tant de fois annoncés, avec des détails de plus en plus précis, s’abattirent sur Jérusalem qui ne s’était pas repentie. En janvier 588 av. J.-C., les armées babyloniennes commencèrent le siège définitif de Jérusalem2 Rois 25. 1 ; Jérémie 39. 1 ; 52. 4.
Ce même jour (verset 2) 1, Dieu commanda à Ézéchiel de proposer une nouvelle parabole en la représentant matériellement (verset 3). Pour une fois, prophétie et réalisation, symbole et acte étaient simultanés. Dieu accréditait son serviteur en accomplissant les jugements qu’il était en train d’annoncer à des centaines de kilomètres de là.
La parabole (versets 3-5) est interprétée (versets 6-8), puis de nouvelles indications sont ajoutées (versets 9-14) 2.
La marmite (11. 1-13) symbolise Jérusalem ; la viande et les os, ses habitants3. Au commencement du siège, la marmite serait mise à bouillir sur le feu qui représente la guerre. La “rouille” parle du péché inséparablement attaché à la ville.
Le jugement serait dur (versets 10-12) et complet (verset 6) 4, parce que les moyens plus doux n’avaient pas produit de résultats positifs (verset 12) 2 Chroniques 36. 15, 16. Le sang des meurtriers était “sur le roc nu” (verset 7) : les traces des crimes commis dans Jérusalem étaient visibles de tous et réclamaient l’intervention divine en jugement, car, contrairement à la terre, le roc n’absorbe pas le sang. Le mal de Jérusalem avait alors atteint un tel degré de scandale public que Dieu ne pouvait plus retarder la vengeance.
Ce même jour, début du siège final de Jérusalem, fut un jour de deuil profond pour le prophète. L’Éternel lui annonça que sa femme bien-aimée allait mourir subitement (versets 15, 16) ; cette prophétie s’accomplit le soir même (verset 18). Selon l’ordre divin, Ézéchiel dut mener deuil en silence. Dieu lui commanda de contrevenir à toutes les coutumes de l’époque : se lamenter à haute voix2 Samuel 19. 1 ; 19. 5, ôter son turban pour mettre des cendres sur sa têteÉsaïe 61. 3, aller pieds nus2 Samuel 15. 30, se couvrir la barbe (c’est-à-dire masquer le bas de son visage à partir du nez) Michée 3. 7, manger la nourriture apportée par ceux qui venaient montrer de la sympathieJérémie 16. 6, 7 (versets 16, 17).
La conduite inhabituelle d’Ézéchiel avait pour but de faire réfléchir ses contemporains. Ceux-ci ne manquèrent pas de lui poser des questions, se doutant que sa manière de faire avait une signification profonde (verset 19). Dans un message solennel, Ézéchiel leur expliqua l’enseignement que Dieu avait en vue (versets 20-24). Son épouse, dont il appréciait la beauté (elle était “le désir de ses yeux”), représentait le magnifique temple de Salomon à Jérusalem, fierté du peuple juif (versets 21, 25). Comme la femme d’Ézéchiel fut enlevée par une intervention divine, le temple serait détruit par le jugement. De plus, “l’affection de leur âme” (verset 21), c’est-à-dire les fils et les filles que les exilés avaient laissés dans le pays, tomberaient au cours de la guerre.
Comme Ézéchiel, les exilés se lamenteraient alors en silence (versets 22, 23). Les signes extérieurs de tristesse servent à attirer l’attention des autres afin de susciter leur sympathie. Mais la perte du temple et la destruction de Jérusalem toucheraient tous les exilés. A quoi bon attirer l’attention par des signes ? Les exilés n’étaient entourés que des Babyloniens, qui auraient d’autant moins de sympathie pour ces Juifs qu’ils étaient les exécuteurs du jugement. Plus encore, ils y trouveraient même leur satisfaction.
Nous voyons une fois de plus que le serviteur de Dieu s’associe aux épreuves du peuple de Dieu, même lorsqu’il est obligé de le reprendre. Voyez cet homme qui connaît la plus dure séparation qu’on puisse vivre sur terre, qui souffre sans dire un mot, par obéissance à son Dieu et par amour pour son peuple. Même si Dieu ne nous appelle pas à des sacrifices aussi extrêmes, soyons des instruments dociles et des serviteurs soumis.
Il est remarquable que la femme d’Ézéchiel ait été choisie pour symboliser le temple de Dieu. Le N.T. éclaire cette analogie entre un être humain et la maison de Dieu. Il nous révèle que le corps du croyant est le temple de Dieu et que l’Esprit de Dieu l’honore en l’habitant1 Corinthiens 6. 19, 20. Il nous révèle aussi que l’Église est collectivement la maison de Dieu sur la terre et qu’elle sera bientôt présentée au Seigneur Jésus comme “l’épouse de l’Agneau” 1 Corinthiens 3. 16 ; Apocalypse 19. 7 ; 21. 2. Sommes-nous conscients de l’honneur qui nous est fait d’être en quelque sorte la suite du superbe temple du seul vrai Dieu qui était autrefois à Jérusalem ?
La destruction du temple marqua un tournant dans la mission d’Ézéchiel. Au début de son ministère (3. 26, 27), Dieu lui avait ordonné de ne parler que lorsqu’il avait un message à transmettre de la part de Dieu ; autrement il était condamné au mutisme. Mais dès qu’un messager viendrait pour annoncer en Babylonie la destruction du temple, Ézéchiel pourrait de nouveau parler normalement (versets 26, 27 ; 33. 21, 22). Ce changement montrerait aux exilés que son mutisme précédent était aussi un signe divin pour les amener à mieux écouter la parole de Dieu (verset 27b). Ce signe, qui dura 7 ans (de 593 à 586 av. J.-C.), devait les aider à venir à la connaissance de Dieu : “et ils sauront que je suis l’Éternel”.
Avec ce chapitre 24 finissent à la fois la première partie du livre d’Ézéchiel (chapitres 1 à 24) et l’explication du jugement (chapitres 12 à 24).
Ces chapitres auront peut-être paru à plusieurs difficiles à lire et bien noirs ; cependant ils parlent à notre conscience et nous donnent des avertissements utiles, car facilement transposables à notre époque.
Nous y voyons aussi la patience de notre Dieu, qui attend avant de juger (chapitres 16, 20, 23). Et bien que le jugement soit annoncé et imminent, déjà s’y discernent les premières lueurs du rétablissement en grâce du peuple. Ézéchiel développera ce sujet dans la troisième partie de son livre (chapitres 33 à 48), après la parenthèse des chapitres 25 à 32 qui concerne les nations.