Le début de ce psaume (versets 1-12) présente les sentiments d’un croyant mal à l’aise devant Dieu et qui s’inquiète de le rencontrer à toutes les étapes de son chemin, sans jamais pouvoir l’éviter. Il réalise qu’ “il n’y a aucune créature qui soit cachée devant Dieu, car toutes choses sont nues et découvertes aux yeux de celui à qui nous avons affaire” Hébreux 4. 13.
Il en arrive à reconnaître (versets 13-18) que cette rencontre, enfin acceptée de plein gré, est bien nécessaire pour acquérir une meilleure connaissance de soi-même et celle d’un Dieu plein de grâce ; elle le conduit désormais à sonder continuellement sa conscience et son cœur. Sérieuse, mais profitable leçon.
Adam, à l’état d’innocence, n’avait pas à faire cette expérience, car il n’était pas confronté au problème du bien et du mal. La désobéissance et la chute ont bien ouvert ses yeux, mais pour lui faire prendre conscience que le péché venait de le souiller et de le rendre coupable devant Dieu.
Depuis que le péché est entré dans le monde, tout homme possède en lui cette petite lampe, la conscience. Elle peut l’éclairer sur ce qui est bien et ce qui est mal, mais comme l’œil de notre corps est aveugle dans les ténèbres, ainsi la conscience de l’homme n’apporte pas de juste appréciation du bien et du mal si elle refuse la vraie source de lumière morale révélée dans la parole de Dieu. Il faut s’en approcher avec un cœur sincère et droit, sinon la lampe intérieure (la conscience) reste éteinte ou voilée.
Rappelons-nous la rencontre du jeune homme riche avec le SeigneurMarc 10. 17-22 ; il croyait avoir gardé scrupuleusement tous les commandements de la loi de Moïse, et pourtant il éprouvait que quelque chose lui manquait encore. La réponse de Jésus est sans équivoque, elle sonde sa conscience et son cœur : “Vends tout ce que tu as et donne aux pauvres… et viens, suis-moi, ayant chargé la croix”. Cet homme s’en va “tout triste, car il avait de grands biens”. Il était bien venu à la source de la lumière mais il n’était pas prêt à ce qu’elle modifie les mobiles de sa vie.
Que Dieu connaisse tout, sonde tout, enregistre tout dans la vie d’un homme, quelle pensée effrayante pour le pécheur, mais combien salutaire pour le croyant !
Un premier réflexe, après cette prise de conscience que Dieu connaît tout de ma vie, pourrait être de chercher à échapper à son regard ; démarche inutile : si haut que l’on veuille s’élever, Dieu est là (les cieux) ; si bas que l’on descende chercher un refuge ou l’oubli (le shéol) il est encore là ; aux extrémités de la mer (orient ou occident) il est toujours là ; rien ne lui échappe. Reste le royaume des ténèbres ; là encore, son œil, comme un faisceau de lumière, balaie les recoins les plus cachés. Impossible de se soustraire au regard divin. Pensons à la fuite inutile de Caïn, meurtrier de son frère. Pensons à Jonas, le prophète désobéissant, face à face avec Dieu, au cœur des mers, dans les entrailles d’un poisson, sombres comme le shéol. Quand le prophète crie à Dieu, celui-ci vient à lui et le sauve. On peut, parfois, perdre des années de sa vie à se cacher à soi-même les vrais mobiles de son existence (vanité, ambition, amour des richesses…) parce que l’on redoute le verdict de Dieu, et l’on repousse toujours plus loin l’échéance d’une vraie rencontre avec lui. Regardez Jacob (un homme de Dieu pourtant), cheminant de ruse en ruse toute une partie de sa vie. À Peniel, Dieu l’arrête ; en une nuit il en fait un nouvel homme : son âme est délivrée d’avoir vu Dieu face à face. Il marchera à cette lumière le reste de ses joursGenèse 32. 31.
Celui qui s’est laissé trouver par Dieu – Dieu qui sonde mais pour faire grâce et sauver – est amené à une nouvelle découverte : Dieu n’est pas seulement omniscient et omniprésent ; il remonte tout mon passé jusqu’au jour de ma conception pour se révéler comme créateur. Que Dieu connaisse tout de mon être, que je le trouve partout dans mon chemin, devient pour moi une évidence, puisqu’il a tout créé, tout formé ; c’est lui qui m’a “tissé” dans le sein de ma mère. “Tu m’as revêtu de peau et de chair, tu m’as tissé d’os et de nerfs ; tu m’as donné la vie”, complète le patriarcheJob 10. 11, 12. “Façonné dans les lieux bas de la terre” (que le ventre soit la poussière d’où Adam a été tiré ou la mère qui a enfanté), il m’a tiré de rien. Je suis son œuvre et dans son livre il a tout enregistré. Merveille du divin Créateur1 ! L’expression : “Où fuirai-je loin de ta face ?” (verset 7) devient : “Combien me sont précieuses tes pensées, ô Dieu !” (verset 17). Désormais, j’ai hâte de retrouver chaque matin, à mon réveil, cette présence de Dieu qui protège et accompagne son enfant (verset 18).
Mon cœur désire être désormais en accord avec Dieu : aimer ce qu’il aime, fuir ce qu’il a en horreur. Mais je trouve, sur mon chemin, deux ennemis :
Quelle tache que la présence constante sur la terre du méchant et de l’homme de sangPsaume 5. 7 ! Ils ne font que corrompre et détruire. Leur attitude à l’égard de Dieu provoque mon indignation : “N’assemble pas mon âme avec eux” Psaume 26. 9, demande le fidèle. Le cri du résidu opprimé des derniers jours ira plus loin : “O Dieu ! si tu voulais tuer le méchant”. Le chrétien, comme son Maître, ne demande pas la mort du pécheur, fût-il son ennemi, mais sa conversion et sa vie. L’enseignement du Seigneur va très loin : “Aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent, faites du bien à ceux qui vous haïssent, et priez pour ceux qui vous font du tort et vous persécutent” Matthieu 5. 44. La mesure de l’amour chrétien pour le prochain est donnée là : c‘est un esprit de prière pour tous les hommes.
Le fidèle de l’A.T. avait moins de connaissance que le croyant chrétien ; mais nous voyons ici son intégrité de cœur devant Dieu et son désir d’être sondé, éprouvé en permanence pour être gardé de chute morale. Ainsi, une rencontre personnelle avec Dieu a-t-elle fait passer cet homme du constat effrayant du : “Tu m’as sondé” au désir profond de son âme : “Sonde-moi” ; sonde, non seulement mes actes, mes paroles, mes pensées, mes sentiments, mais aussi mon cœur, là où tout trouve son origine.
L’enseignement, pour l’époque chrétienne, va plus loin encore : depuis ma “nouvelle naissance” l’Esprit de Dieu habite en moi et me conduit. Mais la chair, qui est toujours là, pourrait m’entraîner dans une “voie de chagrin”. Par l’Esprit, je dis à Dieu : « Je ne sais pas apprécier les premiers signes de ce qui pourrait me conduire à la chute si tu ne me sondes pas continuellement. Tu es plus grand que mon cœur, tu discernes toutes choses ; tiens-moi fermement par la main droite »Psaume 73. 2, 23. Cette attitude, semblable à celle d’un malade qui décrit au médecin de famille les symptômes qui l’inquiètent, fait agir le divin médecin. Lui seul peut prévenir ou guérir les plaies de l’âme. Tout est alors remis en ordre dans ma relation avec Dieu. Devant le croyant rassuré s’ouvre alors la “voie éternelle” où il peut marcher avec confiance.