Les récits intimement unis de ces deux miracles présentent deux aspects d’une même vérité. Le salut peut être vu du côté humain, comme dans le cas de la femme ayant une perte de sang : la grâce passe devant elle, elle se l’approprie par la foi. Le côté divin du salut est présenté avec la résurrection de la fille de Jaïrus : la puissance divine s’exerce en faveur de celle qui est sans vie.
Par ailleurs, ces deux scènes ont sans doute une portée prophétique. Le verset 40 indique qu’après être allé vers les nations, le Seigneur revient vers son peuple. Il reprend avec lui des relations fondées sur la grâce après une mise à l’épreuve symbolisée par le nombre douze, commun aux deux récits. La femme a vécu douze ans dans la souffrance avant d’être guérie (verset 43), la fille de Jaïrus arrive à l’âge de douze ans et meurt (verset 42). Douze ans de peine pour l’une, douze ans de joie pour l’autre, mais quel que soit notre chemin, le Seigneur dirige les circonstances pour notre bénédiction. Toutes deux ont besoin d’un secours extérieur. Telle était la condition des douze tribus d’Israël. La femme malade évoque les croyants fidèles qui chercheront le Messie après l’enlèvement de l’ÉgliseMatthieu 28. 91. La fille de Jaïrus évoque l’état de la fille de Sion, c’est-à-dire Israël, au temps du Seigneur : elle est sans vie, elle attend le jour où le Messie enfin reconnu comme tel viendra la délivrerÉzéchiel 37. 13, 14.
Cette femme était atteinte d’une maladie qui épuisait ses forces physiques, ses moyens matériels (verset 43), et qui portait atteinte à son équilibre psychique. N’était-elle pas allée de déception en déception pour finir isolée ? En effet, d’après la loi, elle était impureLévitique 15. 25-27. Elle ne pouvait ni se rendre au temple pour adorer ni jouir du sacrifice de communion avec Dieu et les siens, ni même rendre visite à ses voisins ou à sa famille. Ce qu’elle touchait était déclaré impur… et le mal empiraitMarc 5. 26.
La maladie avait diminué ses forces, mais sa foi était intacte. Elle sait que Jésus, envoyé de Dieu, possède en lui une puissance qui peut la purifier et la réintroduire dans le peuple de Dieu. Mais comment faire ? Que d’obstacles ! Impossible de compter sur les autres, beaucoup trop préoccupés d’éviter toute souillure extérieure. Elle choisit de se fondre dans la foule pour rester dans un anonymat sécurisant. Voilà Jaïrus, un des chefs de la synagogue, image de la loi qui la condamne ! Il s’en va (verset 42) ! La loi qui révèle l’impureté fait place alors à la grâce qui sanctifie.
D’une main, elle touche le bord du vêtement de Jésus. La guérison est immédiate (verset 44). Le salut physique, psychique, spirituel est assuré. Il n’est pas un remède provisoire obtenu par un toucher superstitieux, mais la rencontre d’une Personne : le Sauveur.
Jésus a senti la puissance sortir de lui. Elle ne lui avait pas été soustraite. Non, c’était de sa part une volonté délibérée. Il voulait établir avec cette femme une relation personnelle fondée sur un plein pardon. La déclaration publique de sa guérison, comme dans le cas de la femme chez Simon, permet sa réintégration dans la société. L’affranchissement est totalJean 8. 36. Remarquons que la
Jaïrus avait une fonction officielle importante : comme chef de la synagogue, il choisissait qui devait prier, ou faire la lecture le jour du sabbat. Il bénéficie aussi d’un grand respect parmi les Juifs. Il lui en coûte sans doute de se rendre auprès de Jésus, d’autant plus que ses pairs étaient profondément hostiles à cet homme si différent des autres.
Mais sa fille unique était malade sans espoir de guérison. Il avait entendu parler des miracles que Jésus avait faits dans les synagogues du paysMarc 1. 21-28 ; 3. 1-6. Sa foi et son humilité le conduisent à supplier le Seigneur de venir guérir sa fille mourante (versets 41, 42). Mais voilà qu’en chemin Jésus est retardé par la foule et par une femme impure. Quel contretemps ! Un message arrive et annonce que tout espoir est perdu. Jésus avait guéri des malades, mais face à la mort que pourrait-il faire ? Cette épreuve n’est pas inutile. La foi de Jaïrus se révèle dans l’espoir qu’il place dans les paroles de Jésus. Malgré la nouvelle, il le laisse venir chez lui. En arrivant, le bruit des pleureuses et des joueurs de flûte leur parvient. Jésus donne l’ordre de cesser ces manifestations de chagrin inutiles puisque l’enfant “dormait” et qu’il allait l’éveiller1 Thessaloniciens 4. 13. Ses paroles ne rencontrent qu’incrédulité et moquerie. Quelle souffrance morale pour lui ! Six personnes entrent dans la maison. Pour la première fois, trois disciples sont choisis pour être témoins de sa puissance comme Sauveur. Ils sont appelés plus tard à contempler la gloire du Fils de l’homme (9. 28) et à assister à l’angoisse morale du parfait sacrifice pour le péchéMatthieu 26. 37.
Jésus entre alors dans la chambre mortuaire. Il appelle l’enfant comme le faisait sa maman au réveil en disant : “Petit agneau, je te dis de te lever !” Avec douceur il la prend par la main. Les yeux de la jeune fille s’ouvrent sur son Sauveur (2. 29, 30 ; 3. 6). Son corps, à nouveau soumis aux lois de la nature, mérite des soins attentifs. Il la confie alors à ses parents.
Jésus avait touché un mort sans se souiller et l’avait guéri. Pour Jaïrus, quelle perplexité ! Jésus semble lui dire : « Comprends-tu que la sacrificature que tu représentes est condamnée ? Comprends-tu qu’il en est une autre – celle de MelchisédecHébreux 7 – qui, seule, peut apporter la sanctification intérieure et la vie ? »
Le Seigneur avait parcouru les villes et les villages de Galilée pendant trois ans environ. Son service dans cette région s’achevait. Rejeté dans sa personne, dans ses paroles et dans ses actes, il n’était pas nécessaire de publier sa puissance (verset 56).