Les deux récits du centurion et de la veuve de Naïn ont montré que le salut ne reposait pas sur les œuvres mais sur la grâce divine. Maintenant, le Saint Esprit conduit Luc à présenter deux épisodes qui soulignent que les bonnes œuvres découlent nécessairement du salut reçu. Le « faire » provient de « l’être ».
Les circonstances dans lesquelles cette femme découvre Jésus pour la première fois ne sont pas clairement indiquées. A-t-elle entendu l’appel de la grâce : “Venez à moi vous tous qui vous fatiguez et qui êtes chargés, et moi, je vous donnerai du repos” Matthieu 11. 28 ? Une chose est certaine : la grâce qui rayonnait du Sauveur attirait celle qui sentait le poids de ses péchés. Cette scène montre la reconnaissance d’un cœur qui s’est attaché à son Sauveur et veut lui rendre hommage1.
Jésus est chez Simon le pharisien. À cette époque, quand un docteur de renom était invité chez un Juif, on pouvait venir écouter librement son enseignement. Cette femme s’avance avec courage, sans craindre l’opprobre lié à sa réputation. Lors de tels repas, les invités, allongés sur un divan, repliaient leurs pieds nus derrière eux. Ce détail explique la scène. Elle s’approche discrètement par derrière, verse le parfum2 sur les pieds du Seigneur. En tout cas, la conscience de son indignité et des compassions de Jésus qui accepte son hommage lui font verser des larmes abondantes.
Avec la spontanéité de l’amour, elle ose défaire ses cheveux en public et essuyer les pieds du Seigneur dans un geste d’adoration qui rappelle celui de MarieJean 12. 3. Simon observe la scène et raisonne dans son cœur (verset 39). Il met en doute le caractère de prophète de Jésus qui semble incapable de discerner l’état moral de cette femme. Il se trompe. Sa réflexion intérieure n’a pas échappé au SeigneurPsaume 139. 2. Avec une délicatesse divine il lui propose d’avoir une rencontre personnelle avec le Sauveur.
Il s’adresse d’abord à son intelligence par une courte parabole qu’il l’invite à bien écouter, car il doit trouver la solution au problème posé (versets 40-43). Simon trouve la bonne réponse. Alors Jésus établit le parallèle et s’adresse à sa conscience en disant : “Vois-tu cette femme ?” Question en apparence inutile ! Il la voyait bien, mais avec ses yeux de pharisien, aveugle à la gloire du Seigneur et inconscient de sa propre indignité. Alors Simon est placé dans la lumière divine. Jésus n’a pas reçu chez lui les marques ordinaires de l’hospitalité orientale : point de baiser de salutation quand il est entré, pas d’eau fraîche pour rafraîchir ses pieds, pas d’huile pour oindre sa tête. En contraste, cette femme avait dépassé la “norme”. Le baiser n’était pas une formalité mais l’expression d’un amour vrai, l’eau était ses larmes ; l’huile ordinaire était remplacée par un parfum précieux répandu humblement sur les pieds du Seigneur.
Jésus ne passe pas sous silence son passé misérable, même si elle entend quelqu’un qui s’adresse à elle avec amour et compréhension. Quelqu’un qui peut lui annoncer une libération complète : “Tes péchés sont pardonnés”. Sa foi, relevée publiquement, la sauve de la condamnation divine et l’introduit dans une paix à laquelle elle aspirait sans doute depuis longtemps.
Ce chapitre s’ouvre sur une scène que seul Luc nous rapporte. Voir Jésus parcourir la Galilée suivi de ses disciples n’avait rien d’étonnant. Le voir accepter dans son entourage plusieurs femmes choquait d’autant plus qu’à cette époque les prescriptions des rabbins allaient jusqu’à interdire à un homme de s’adresser en public à une femme. Ces femmes venaient d’horizons bien différents. Marie de Magdala avait été affranchie d’une puissance démoniaque presque illimitée. Jeanne, épouse de Chuzas, avait vécu jusqu’ici dans une atmosphère corrompue. Issue d’un milieu social aisé, elle avait mis ses biens au service de Jésus.
Elles éprouvaient toutes du bonheur à montrer leur amour envers leur libérateur en le suivant, l’écoutant et le servant.
Dans sa grande humilité, dépourvu de revenus personnels, Jésus dépendait de la générosité de ceux qui le servaient2 Corinthiens 8. 9. La consécration de ces femmes est entière : elles “l’assistaient” de leurs biens. On pourrait traduire ce mot par : « elles rendaient un service chrétien d’ordre pratique exigeant l’engagement total de la personne ». C’est ainsi qu’on peut suivre Jésus ! Remarquons aussi que le Seigneur ne leur avait pas confié un service particulier comme aux apôtres. Il ne leur demandait pas de prêcher, guérir les malades ou chasser les démons. Non, il leur laissait simplement exercer ce service d’amour dont il relève ici ou là le prix pour son cœurMarc 12. 44 ; 14. 6, 9….