Cette scène est une parenthèse. Elle souligne que la puissance en grâce de Jésus est une preuve de la présence du Messie au milieu de son peuple.
Jean-Baptiste est en prison (3. 20). Les miracles que Jésus opère sont connus dans tout le pays et l’information en arrive jusqu’à sa celluleMatthieu 11. 1, 2. Alors Jean-Baptiste s’interroge. Il avait annoncé le double ministère du Messie : baptiser du Saint Esprit ceux qui se repentaient et croyaient, baptiser de feu ceux qui refusaient la grâce. Les fidèles en Israël attendaient le jour de ce jugement qui devait précéder l’introduction du règne d’un Messie glorieux. Même les apôtres se posaient cette questionActes 1. 6.
Apparemment Jésus « se contentait » de réaliser la première partie de sa mission. Comment pouvait-il être le Messie s’il n’exécutait pas le jugement contre Hérode et la tyrannie romaine ? De nos jours, la même question est souvent posée. Comment Jésus peut-il dire qu’il est la réponse aux problèmes de ce monde s’il n’établit pas la justice, au lieu de sauver ici et là des individus ?
Perplexe, Jean-Baptiste envoie deux disciples interroger le Seigneur : “Es-tu celui qui vient ?” Les prophètes désignaient ainsi le Messie triomphateurMalachie 3. 1, 2. Les œuvres de jugement devaient-elles être faites par un autre ? Les œuvres de compassion n’avaient-elles pas assez duré ? En fait, Jean n’avait pas compris que Jésus, le Messie, devait être rejeté avant de régner, afin d’établir – après sa mort – un nouvel ordre de choses.
Jésus ne conteste pas qu’il faudra exercer le jugement mais il attire l’attention des envoyés de Jean sur ce qui se passe. Une énumération qui rappelle ce qu’Ésaïe 35 avait annoncé : des miracles de guérison qui croissent en intensité et la prédication annoncée aux pauvresÉsaïe 61. 1. L’essence de l’évangile est là : la grâce présentée à ceux qui, dans ce monde, sont estimés les plus indignes de la recevoir. Le jour du jugement viendra malgré les critiques de ceux qui estiment qu’il tarde à venir2 Pierre 3. 3-10. Mais ce « retard » s’explique par une longue patience divineRomains 9. 22. Il nous est demandé de mettre à profit ce délai pour faire passer des hommes du domaine de Satan, vaincu à la croix, à la merveilleuse lumière de Dieu, pour sa seule gloire1 Pierre 2. 9. Pour parler à la conscience de Jean, Jésus ajoute enfin la promesse d’un bonheur (verset 23) à celui qui ne serait pas scandalisé en lui pendant le temps de son rejet.
Ceux qui ont entendu cette réponse ont pu penser que Jésus désavouait Jean-Baptiste. Il n’en est rien. Christ, le roi, rend témoignage à celui qui l’avait présenté à son peuple et parle à la conscience de ses auditeurs. Quand Jean-Baptiste a prêché, vous êtes allés l’entendre, semble-t-il leur dire (3. 7), l’avez-vous donc oublié maintenant ? Était-il un homme facilement influençable, tel le roseau agité par le vent ? Ou un élégant courtisan dans le palais du roi ? N’était-il pas plutôt un prophète ? La mission de Jean-Baptiste l’élevait au-dessus des hommes et faisait de lui le plus grand des prophètes.
Et pourtant, “le plus petit dans le royaume de Dieu est plus grand que lui” (verset 28). Jean appartenait au temps de la promesse tandis que le croyant appartient au temps de son accomplissement. Il n’est pas question ici de grandeur morale liée à quelque mérite personnel mais de grandeur de position que Dieu accorde selon l’époque où l’on vit.
Les paroles du Seigneur montraient les réactions à la prédication de Jean : les uns ont “justifié” Dieu ; ils sont d’accord avec ce que Dieu demande. Ils ont accepté le baptême de la repentance (verset 29). Les autres, pharisiens et docteurs de la loi, étudient la loi mais sans chercher à faire la volonté de Dieu. Ils se placent hors de la bénédiction. Dieu dans sa grâce est juste aussi bien en condamnantRomains 3. 4, 5 qu’en justifiantRomains 3. 26.
Jésus souligne la folie des hommes de son temps : ils rejettent à la fois l’appel de Jean à la repentance (même s’ils l’ont reconnu comme prophète), et le message de grâce du Sauveur. Ils n’ont voulu ni pleurer – c’est-à-dire accepter la solennité de la prédication de Jean – ni danser – c’est-à-dire se réjouir de la venue de Jésus. Jean est critiqué pour son ascétisme et Jésus pour avoir mangé et bu avec des gens de basse condition. Où trouver la sagesse ? Chez ceux qui reconnaissent en Jésus la sagesse de Dieu1 Corinthiens 1. 30. Leur esprit, renouvelé en connaissance, peut alors discerner ce que Dieu révèle à ses enfants.