Avec ces chapitres commence, à proprement parler, le sujet de la prophétie. Nous y trouvons l’iniquité de l’ensemble du peuple, les jugements qui y répondent et le salut d’un petit résidu, représenté par Ésaïe.
Dans ce cantique du bien-aimé sur sa vigne, image d’Israël, souvent employée dans l’Écriture, le prophète exprime la bonté et les soins de l’Éternel pour elle. Toutes les conditions étaient réunies pour que Dieu puisse espérer en récolter de bons raisins : il avait choisi pour elle un emplacement qui évoque le pays donné à Israël, un pays sur lequel il a continuellement les yeuxDeutéronome 11. 11, 12. Il avait veillé à sa protection et à la préparation du sol, pour que les ceps choisis par lui y prospèrent. Il y avait construit une tour pour veiller sur elle et creusé un pressoir. Que faire alors si les raisins n’étaient pas bons, sinon abandonner cette vigne à la destruction. Devant les anciens du peuple, le Seigneur développa plus complètement cette parabole et expliqua, par la mention de la mise à mort du fils du maître de maison, l’effusion de sang au lieu du juste jugement, le cri au lieu de la justice (5. 7), c’est-à-dire sa propre mort sur la croixMatthieu 21. 33-41.
Six malheurs sont alors prononcés, répondant à l’injustice qui vient d’être exposée.
Les deux premiers trouvent leur sentence dans leur caractère même.
Les quatre autres malheurs concernent :
La colère de l’Éternel ne serait-elle pas alors justifiée contre son peuple ? Le maître de la maison ne fera-t-il pas périr misérablement ces méchants, comme nous le dit la parabole de Matthieu 21 ? Certes, “pour tout cela, sa colère ne s’est pas détournée et sa main est encore étendue” (verset 25).
La fin du chapitre nous montre la manifestation de cette colère : nous y voyons une description très vivante de l’activité et de la rapidité de l’Assyrien destructeur, verge de la colère de l’Éternel (voir 10. 5).
Figure, sans doute, de l’état moral du peuple d’Israël, le roi Ozias venait de mourir, lépreux, car il s’était élevé contre l’Éternel2 Chroniques 26. Ésaïe venait de voir l’iniquité du peuple ; il contemple maintenant la sainteté absolue, la puissance, la majesté et la gloire de l’Éternel. Son propre état lui apparaît aussitôt et il s’écrie : “Malheur à moi ! Car je suis perdu…” (verset 5). Mais dès qu’il a confessé l’impureté de ses lèvres qui transmettent ce qui vient du cœur et souille l’hommeMatthieu 15. 18-20, il lui est donné de voir l’autel et d’y trouver la réponse à sa détresse. Car l’autel où brûlent les charbons ardents qui ont consumé le sacrifice, est un type de la croix où “Christ a souffert une fois pour les péchés, le juste pour les injustes, afin qu’il nous amenât à Dieu” 1 Pierre 3. 18. L’un des séraphins touche les lèvres d’Ésaïe avec un charbon de l’autel, ôtant ainsi son impureté par la valeur du sacrifice de Christ.
Ésaïe est désormais un homme purifié, condition indispensable pour servir Dieu. Son iniquité est ôtée ; il peut répondre : “Me voici, envoie-moi”, à la question du Seigneur : “Qui enverrai-je, et qui ira pour nous ?” (verset 8).
Remarquons ici que, dans ses conseils éternels, le Dieu saint n’a pas eu à poser une telle question. Son Fils unique, le Seigneur Jésus, dans sa parfaite et insondable communion avec son Père, a dit : “Je viens ; il est écrit de moi…” Psaume 40. 8
En résumé, Ésaïe avait besoin d’être purifié ; Christ, personnellement et éternellement saint, est celui qui purifie. Et tandis qu’Ésaïe va annoncer au peuple le terrible jugement que constituent son endurcissement de cœur et son aveuglement, sa dévastation et sa désolation, le Fils de Dieu vient annoncer de bonnes nouvelles aux pauvres et l’an agréable du SeigneurLuc 4. 18, 19.
La parole d’Ésaïe (6. 9, 10) fut accomplie quand, malgré les miracles du Seigneur, les Juifs ne crurent pas en luiJean 12. 37-40. Mais en rappelant “qu’Ésaïe dit ces choses parce qu’il vit sa gloire et qu’il parla de lui” Jean 12. 41, Jean établit que l’humble Jésus de Nazareth est “le Seigneur” (6. 1), “l’Éternel des armées” (verset 5), dans sa gloire et sa majesté.
Cependant Ésaïe intercède : c’est le “jusques à quand ?” (verset 11) du résidu prophétique dans les Psaumes, expression de la foi en la miséricorde finale du Seigneur. En effet, après la désolation, un tout petit reste du peuple, un “dixième” reviendra ; il sera encore “brouté”. Mais une semence sainte, un tronc demeurera : ce sera le résidu croyant, noyau d’un peuple nouveau.
Ainsi, la foi compte sur la fidélité de Dieu, et Dieu répond : il y aura un résidu.