Dieu avait préparé moralement Daniel à recevoir les communications divines (chapitre 10) ; celles-ci lui sont maintenant révélées (chapitres 11 et 12). L’extraordinaire précision des détails de ces prophéties a même fourni l’occasion à certains critiques de mettre en cause l’authenticité du livre de Daniel.
Tous les événements prédits étaient encore futurs pour Daniel. Pour nous, au contraire, tout ce qui est annoncé jusqu’au verset 35 appartient au passé ; seule, la signification prophétique demeure. Mais la fin de la prophétie (11. 36 à 12. 13) appartient encore au futur. La période dans laquelle nous vivons (l’Église sur la terre) s’inscrit entre les versets 35 et 36 du chapitre 11.
L’ange révèle à Daniel qu’il s’était tenu à l’époque auprès de Darius, pour l’aider à résister à ceux qui complotaient contre le prophète à la cour royale (6. 5-10). Dieu veillait ainsi sur son serviteur par une intervention angélique, à l’insu même du roi. C’est encore une révélation des activités mystérieuses du bien dans le monde invisible.
La mention de la première année du règne de Darius le Mède doit être rapprochée de la prophétie des soixante-dix semaines, révélée à Daniel par l’ange Gabriel (9. 1, 21). On peut penser que Gabriel est à nouveau le messager angélique parlant à Daniel, qui se présente ainsi : “Et moi” (verset 1), pour continuer par : “je te déclarerai la vérité” (verset 2). S’il en est bien ainsi, l’ange déjà envoyé auprès de Daniel pour le fortifier (10. 11, 18) était donc Gabriel.
L’ange présente alors un tableau historique qui va former la trame des événements touchant le peuple de Daniel au milieu des nations.
Quatre rois de Perse sont annoncés et devaient succéder à Cyrus1 :
Alexandre le Grand entre alors en scène, ce “roi vaillant” (verset 3), qui a formé l’empire grec. A l’issue de son règne éphémère, son immense empire a été déchiré entre les mains de ses quatre généraux (8. 8).
Toute la suite de la prophétie est relative aux conflits et aux alliances entre les rois qui ont surgi de cet empire grec.
Deux des quatre généraux ont joué un rôle important en rapport avec Israël : Séleucos en Syrie et Ptolémée en Égypte. Leur dynastie3 se rattache respectivement aux royaumes du nord et du midi, vus dans leur position géographique par rapport à la terre de beauté, le pays d’IsraëlDeutéronome 32. 8. La prophétie est d’une stupéfiante précision.
Le premier “roi du Midi” (verset 5) est Ptolémée I Sôtêr, général d’Alexandre.
“Un autre… plus fort que lui” est Séleucos Nikatôr, premier roi du nord, dont le royaume s’étendait de la Macédoine (au nord de la Grèce) aux confins des Indes.
La lutte a été continuelle entre ces deux royaumes du Nord et du Midi. Pour essayer d’y mettre un terme, une alliance par mariage a été conclue (“un arrangement droit” : verset 6). Bérénice, fille du roi du Midi Ptolémée II Philadelphe (le fils de Ptolémée Soter), a été offerte en mariage à Antiochus II Théos, roi de Syrie. Mais, à la mort de son père, Bérénice a été emprisonnée (“elle ne conservera pas la force de son bras”), tandis que son mari était empoisonné par sa première femme Laodice (“il ne subsistera pas, ni son bras”).
Ptolémée III Evergète (“le rejeton” : verset 7), fils de Ptolémée II Philadelphe, a alors tout mis en œuvre pour délivrer sa sœur Bérénice. Levant une forte armée, il envahit la Syrie (allant même jusqu’à Babylone) ; mais il trouve sa sœur, et le fils de celle-ci, déjà mis à mort. Sa vengeance s’exerce alors contre les meurtriers, et il s’empare de grandes richesses qu’il ramène en Égypte (verset 8).
Un nouveau roi du Midi (verset 11), Ptolémée IV Philopatôr (fils de Ptolémée Evergètes) fait alors la guerre au roi du Nord, Antiochus le Grand, et remporte la victoire sur lui.
Ce dernier, cherchant sa revanche, réunit alors une grande armée. Ses campagnes contre Ptolémée V Epiphane (fils de Philopatôr) sont annoncées en détail (versets 13-19). Pour la première fois, apparaissent des Juifs se mêlant aux conflits des nations. Les “violents de ton peuple” (le peuple de Daniel ; verset 14) sont des Juifs apostats qui s’unissent au roi du Midi pour combattre le roi du Nord. Ils tomberont sous la vengeance du vainqueur, Antiochus III le Grand. Ces affrontements militaires se déroulent maintenant sur la terre d’Israël (“le pays de beauté” verset 16).
Devant l’impuissance des armes à régler leurs conflits, les rois recourent, une fois encore, au stratagème du mariage (verset 17). Le roi du Nord donne sa fille Cléopâtre4 en mariage au roi du Midi, dans le but de le subjuguer par la trahison de sa femme (“la pervertir”) ; mais le complot échoue.
Le roi du Nord (Antiochus III le Grand) tourne alors ses armées vers l’archipel grec (“les îles” ; versets 17, 18). Il se heurte à Scipion, consul romain5, qui le chasse. De retour dans son pays, il trouve sa fin.
Son fils, Séleucos Philopatôr, consacre son règne à lever les impôts pour le compte de Rome (“l’exacteur”) ; il pillera même le temple de Jérusalem pour y voler ses richesses. Mais il meurt bientôt, trahi par un ami, et non par une sédition de son peuple (“non par colère”) ou par les armes (“ni par guerre”).
Ainsi se terminent ces temps troublés, d’une durée de 130 ans, qui ont suivi le règne d’Alexandre (de -305 à -175 environ). Le tableau annexé permettra de suivre la succession des deux dynasties pendant cette période.