La période décrite dans ces passages n’a duré que dix ans ; mais elle est d’une grande importance du double point de vue historique et prophétique. Les événements annoncés se sont accomplis à la lettre ; mais ils préfigurent aussi d’autres scènes, encore futures pour nous.
Déjà annoncé par le symbole de la petite corne orientale (8. 9), un autre personnage apparaît sur la scène, qui marquera profondément l’histoire du peuple d’Israël ; l’histoire de cet “homme méprisé”, donnée avec tant de détails dans les trois paragraphes des versets 21 à 35, préfigure celle de l’Assyrien, le roi du Nord des jours de la fin, le dernier ennemi de Christ et du peuple de Dieu.
Sans droit légal à la couronne du royaume de Syrie, cet homme vil et méprisable, appelé Antiochus (comme ceux de sa dynastie) se saisit du pouvoir par la flatterie. Sa fraude, ses tromperies et ses largesses insensées lui ont valu le nom d’Épiphane (l’illustre), changé par son propre peuple en Epimane (l’insensé). Dans sa haine contre le peuple de Dieu, il décide de s’emparer de la terre d’Israël. Il se fait aider par le frère du souverain sacrificateur à Jérusalem et distribue ses faveurs aux Juifs infidèles (versets 23, 24).
Antiochus Épiphane part ensuite en guerre contre l’Égypte et contre son roi, Ptolémée VII Evergète II (le roi du midi). Plusieurs expéditions militaires lui assurent la victoire ; mais, plutôt que de mettre à mort son ennemi, il le convoque à la table des négociations, et signe avec lui une paix factice (“ils diront des mensonges à une même table” : verset 27). Sur le chemin du retour, comblé des richesses volées à l’Égypte, il s’en prend à Jérusalem dont il s’empare avec traîtrise ; sa rage se déchaîne déjà contre les Juifs (“la sainte alliance”).
L’action se poursuit “au temps déterminé”, le terme (ordonné par Dieu) de cette alliance trompeuse entre les deux rois du Nord et du Midi (verset 27). Mais les choses ont changé, car Rome et sa flotte armée (“les navires de Kittim”) s’allient à l’Égypte contre la Syrie.
Au moment où Antiochus se prépare à faire le siège d’Alexandrie, un représentant du Sénat de Rome lui intime l’ordre de quitter l’Égypte sur-le-champ. Devant un plus fort que lui, “il sera découragé, et retournera” (verset 30). Humilié et furieux, il rentre dans son pays ; en chemin, il se retourne à nouveau contre les Juifs, sur lesquels il déverse sa haine (“il sera courroucé contre la sainte alliance”). C’est un moment terrible pour le peuple de Dieu.
Ce temps de détresse est celui des Macchabées1. Leurs livres qui ne sont pas inspirés donnent toutefois des détails saisissants sur leurs épreuves. L’apôtre les placera dans la nuée des témoins de la foiHébreux 11. 34-38.
Antiochus s’appuie d’abord sur les Juifs incrédules : “ceux qui abandonnent la sainte alliance” (verset 30), et “ceux qui agissent méchamment à l’égard de l’alliance” (verset 32). Il réussit à les corrompre par son arme favorite, la flatterie. Apollonius, un de ses généraux, ordonne alors de sa part le massacre de plusieurs dizaines de milliers d’habitants de Jérusalem, suivi de la profanation du temple. Après avoir ôté les ustensiles du sanctuaire, il place une idole dans le lieu saint et offre une truie (animal impur et abominable pour les Juifs) sur l’autel ; tous les sacrifices sont alors interrompus (8. 11, 12). C’est ’est “l’abomination qui cause la désolation” (verset 31) 2
A travers cette scène abominable, Dieu préserve pour lui un résidu fidèle au milieu de la masse (la multitude) : c’est “le peuple qui connaît son Dieu”, qui est fort et qui agit. Et parmi ce résidu, une autre classe plus restreinte est distinguée : “les sages du peuple” (versets 33, 35 ; 12. 3). Ce sont les “Maskilim”, ceux qui ont l’intelligence pour enseigner la multitude, malgré les pièges subtils de l’ennemi. L’épreuve opère leur purification spirituelle, mais plusieurs d’entre eux y laisseront la vie, comme témoins fidèles pour Dieu.
Cette partie de la prophétie se termine par la mention de la résistance victorieuse des Macchabées, qui prennent les armes contre leurs oppresseurs (verset 34). La conduite de ce résidu zélé pour Dieu n’est pas la même que celle du résidu de la fin ; celui-ci devra, au contraire, s’enfuir, pour sa vie, sans prendre l’épéeMatthieu 24. 16-21.
Les Macchabées réussirent à purifier le temple et à chasser l’envahisseur pour un temps. Le sanctuaire fut rendu au culte divin au mois de Kislev (en hiver) de l’année -165 ; c’est l’origine de la fête de la dédicace, célébrée encore parmi les Juifs au temps du SeigneurJean 10. 22. Il s’était donc bien écoulé une période d’environ six ans et demi entre la profanation du sanctuaire par Antiochus et sa purification par les Juifs fidèles, soit les “deux mille trois cents soirs et matins”, conformément à la prophétie (8. 14).
A la même époque (-170 environ), une alliance conclue avec Rome avait scellé l’asservissement du peuple de Dieu au quatrième empire des nations.
La dernière prophétie de l’A.T., Malachie, avait été écrite en -397 environ, c’est-à-dire quatre cents ans avant la venue de Christ qui ouvre le N.T. La prophétie de Daniel conduit les pensées de la foi tout le long de cette période de silence.
Parmi les prisonniers de l’espérance qui ont longtemps attendu le salut et la délivrance, la Parole signale Anne (grâce ou supplication), fille de Phanuel (face de Dieu), de la tribu d’Aser (bienheureux) Luc 2. 36, 37. Phanuel est né quelques dizaines d’années seulement après les événements relatés plus haut. Avec sa fille, Anne, ils vivaient ces temps sombres et difficiles, où les sages étaient éprouvés, “pour les purifier et les blanchir” (verset 35).