Nebucadnetsar avait publiquement reconnu Dieu comme le Dieu de Daniel après l’interprétation de la vision de la statue (chapitre 2). C’était là un premier avertissement divin à renoncer à son orgueil.
Ensuite, l’épisode de sa statue d’or dans la plaine de Dura et la délivrance des trois martyrs Hébreux hors de la fournaise avaient tourné à la confusion du roi et l’avaient obligé à accepter la souveraineté et la puissance du vrai Dieu. Tel était le deuxième avertissement.
Dans quelle mesure la conscience de Nebucadnetsar avait-elle été touchée par ces deux épisodes ? Le récit du chapitre 4 répond à cette question et montre que l’empereur du monde avait encore de plus profondes leçons à apprendre.
Nebucadnetsar fait une proclamation à toutes les nations de la terre, pour raconter rétrospectivement l’extraordinaire expérience qu’il avait vécue. Lui, le souverain universel, a été réduit pendant sept ans1 à l’état d’une bête des champs. Après avoir perdu toute conscience de sa relation avec Dieu, il a retrouvé son intelligence, contraint à déclarer devant tous, à la fin, les signes et prodiges du Dieu Très-Haut.
Mais, avant tout jugement, Dieu avertit un homme, une nation ou l’humanité tout entière. Aux jours de Noé, prédicateur de justice, Dieu, dans sa patience, avait longtemps attendu avant de détruire le monde par le déluge1 Pierre 3. 20 ; 2 Pierre 2. 5. Plus tard, le Pharaon a été averti abondamment, mais en vain, avant que les jugements ne fondent sur l’ÉgypteJérémie 46. 17. Jérémie et les prophètes ont annoncé par avance, à Juda et Jérusalem, l’arrivée des Chaldéens. Et maintenant, Dieu avertit encore le monde de la colère qui vient1 Thessaloniciens 1. 10.
Par une nouvelle vision, Nebucadnetsar est averti pour la troisième fois. “Car Dieu parle une fois, et deux fois – et l’on n’y prend pas garde – Dans un songe, dans une vision de nuit”. “Voilà, Dieu opère toutes ces choses deux fois, trois fois, avec l’homme, pour détourner son âme de la fosse” Job 33. 14, 29.
Un songe terrifiant trouble et effraye le roi. Comme pour le premier songe, il fait appel à tous les sages de Babylone, pour en avoir l’interprétation. Il ne s’agissait plus de retrouver le songe, dont le roi gardait encore un souvenir précis, mais seulement de l’expliquer. Les sages de ce siècle en sont incapables, comme la première fois. On peut s’étonner que Nebucadnetsar n’ait pas consulté Daniel immédiatement. Mais l’homme naturel pense à la terre, et n’a aucune affinité avec ce qui est spirituel. Ce n’est qu’à la fin que Daniel, appelé Belteshatsar, entre devant le roi (verset 5).
L’exposé détaillé du songe par le roi à Daniel se divise en trois parties :
Le début et la fin du récit du roi signalent Daniel comme ayant “l’esprit des dieux saints” (versets 5, 6, 18). Nebucadnetsar ne connaissait pas encore le seul vrai Dieu, le Dieu des cieux, le Dieu Très-Haut. Ce même témoignage à l’esprit des dieux avait déjà été rendu par le Pharaon à Joseph, qui avait interprété son songeGenèse 41. 38.
Nebucadnetsar rapporte alors les “visions de ma tête” (versets 7, 10), expression remarquable, qu’il faut rapprocher de celle employée par Daniel à l’occasion de révélations prophétiques futures (7. 15). C’est la seule fois où un homme de Dieu se réfère à sa tête, siège de l’intelligence. Habituellement, la source de la connaissance est reconnue comme étant en Dieu et en Christ seulsColossiens 2. 3 ; les prophètes ne sont qu’un canal pour la révéler aux hommes.
Un grand arbre est le symbole d’une puissance terrestre humaine, employé souvent dans l’Écriture pour désigner son opposition à DieuÉsaïe 2. 12, 13. Le prophète Ézéchiel décrit ainsi la puissance de l’AssyrienÉzéchiel 31. 3-9. Christ, dans la gloire de son royaume, sera, plus tard, “un cèdre magnifique” Ézéchiel 17. 23, 24, qui remplacera cette vigne de peu de hauteur, image de Sédécias, dernier roi infidèle en Juda.
L’image de l’arbre est reprise par le Seigneur pour décrire le développement extérieur du royaume des cieux (et de la profession chrétienne) devenu une puissance protectrice qui abrite les oiseaux du cielMatthieu 13. 32. Toutes sortes de personnes y cherchent refuge et protection. L’arbre, dans la vision du roi, est “au milieu de la terre” ; il est de grande hauteur et projette son image sur la terre entière. Il abrite, protège et nourrit les bêtes et les oiseaux2. Le symbole est donc en rapport avec la terre (par opposition à la mer) pour désigner le système organisé par l’homme loin de Dieu (et non la masse confuse des peuples). C’est de la terre que surgira aussi la seconde bête de l’Apocalypse, l’AntichristApocalypse 13. 11, qui exercera sur les fidèles de la fin la même oppression religieuse que Nebucadnetsar dans la Babylone historique idolâtre.
Le jugement est annoncé par un messager venu du ciel : “un veillant, un saint”. La Parole indique clairement que les exécuteurs du jugement divin sont des angesPsaume 104. 4 ; Hébreux 1. 7, 14. Mais le jugement procède du trône de Dieu, qui “veille sur sa parole pour l’exécuter” Jérémie 1. 12.
L’arbre, symbole d’un homme puissant, doit être abattu : branches, feuillage et fruit. Il cesse désormais d’offrir sa protection et sa nourriture aux hommes. Toutefois, les racines en terre et le tronc subsistent, car le jugement ne doit pas détruire la personne elle-même. Mais celle-ci doit être réduite pour une certaine période (sept temps, probablement sept années) au niveau d’une bête. L’être humain est animé d’une intelligence (l’esprit) par laquelle il peut être en relation avec Dieu, s’il regarde vers lui. Le jugement annoncé annihile cette capacité morale, de sorte que l’homme est ramené au niveau d’un animal des champs, tirant sa nourriture de la terre. Devant Dieu, l’homme pécheur n’est encore aujourd’hui qu’un homme animal1 Corinthiens 2. 14 ; Jude 193.
La sentence de jugement est solennellement attestée par Dieu devant “les vivants” (c’est-à-dire tous les hommes). Le Très-Haut doit être reconnu par eux comme le dominateur suprême. On notera avec intérêt que toute cette scène est commentée par le prophète Habakuk, qui déclare en particulier : “L’Éternel est dans le palais de sa sainteté… que toute la terre fasse silence devant lui !” Habakuk 2. 20
Nebucadnetsar, au terme de la description de son rêve, en appelle à Daniel, seul capable de lui en donner l’interprétation.