Le dernier tableau moral des nations se déroule à Babylone, à la cour du nouvel empereur Darius, le Mède. Si Belshatsar est un exemple de l’impiété qui s’élève contre Dieu, Darius montre maintenant l’exaltation de l’homme qui prétend se substituer à Dieu.
Darius, le Mède, était fils d’Assuérus (9. 1). Daniel avait été nommé troisième gouverneur de Babylone par Belshatsar, la nuit même de la mort de ce dernier. Dans le nouveau gouvernement, Darius lui donne une place encore plus élevée, immédiatement au-dessous de lui.
Les cent vingt satrapes, nommés par l’histoire “les yeux du royaume”, veillaient à l’ordre dans le vaste empire. Ils rendaient compte à trois présidents (dont Daniel), qui représentaient le roi. Daniel, doué par Dieu d’un “esprit extraordinaire”, depuis son arrivée à Babylone (1. 17, 20), surpasse les présidents et les satrapes aux yeux de Darius qui pense à l’établir sur tout le royaume.
La position d’honneur et de responsabilité de cet étranger, Juif de surcroît, à la cour du roi, était intolérable aux yeux des intrigants qui l’entouraient. Poussés par l’envie et la jalousie, ils usent de flatterie et de mensonges pour provoquer la perte de Daniel. Il s’agissait pour les ennemis de détruire tout témoignage juif à Babylone, et de condamner celui qui en était le porteur.
Or Daniel était fidèle dans son administration, s’appliquant à plaire à son Dieu. Sa conduite irréprochable ne prêtait le flanc à aucune critique (ni faute, ni manquement : verset 6). Appliquons-nous à imiter son exemple. L’apôtre Paul nous rappelle que la fidélité est requise dans toute administration1 Corinthiens 4. 2. Le premier témoignage que les chrétiens doivent rendre devant le monde est celui d’une honnêteté scrupuleuse ; ainsi, ils manifesteront la lumière morale au milieu des ténèbres du mondePhilippiens 2. 15.
Ne trouvant aucun motif d’attaquer Daniel sur sa conduite dans le monde politique, ses ennemis fomentent un complot contre lui dans le domaine religieux (verset 6). Quelle bassesse ! D’inspiration diabolique, leur conspiration était d’une subtilité et d’une efficacité remarquables. Ils éviteraient d’attaquer Daniel en face sur le terrain de l’adoration du vrai Dieu, eux qui n’étaient que des idolâtres, comme leur souverain ; ils suggéreraient plutôt à Darius de prendre la place de suprématie, dans le ciel et sur la terre, en se substituant de fait au vrai Dieu. Daniel, qu’ils savaient fidèle à son Dieu, ne pourrait échapper à la condamnation. Il suffisait de flatter suffisamment le roi pour l’amener à signer le décret.
Cette scène est un modèle historique de celle des derniers jours, après l’enlèvement de l’Église. Alors, l’Antichrist, “le roi” (11. 36), poussé par Satan, se présentera comme étant Dieu2 Thessaloniciens 2. 4. Associé au pouvoir politique, il cherchera à mettre à mort les fidèles qui lui résisterontApocalypse 13. 7, 15.
Finalement, Darius tombe dans le piège, et signe l’écrit et la défense, selon une loi qui ne pouvait être abrogée (versets 9, 10).
L’heure de l’épreuve suprême sonne pour ce fidèle serviteur de Dieu, arrivé près du terme de sa carrière terrestre (il avait probablement quatre-vingts ans à cette époque). Dans l’épisode de la statue (chapitre 3), ses trois compagnons avaient été seuls pour affronter la fournaise de feu. Maintenant, Daniel reste seul en face de la fosse aux lions, promise à ceux qui désobéissaient à l’écrit du roi. Dans les deux cas, un même principe moral était en jeu : obéir à Dieu, plutôt qu’aux hommes. Or Nebucadnetsar et Darius, avaient bien, l’un et l’autre outrepassé leurs droits pour opprimer les consciences.
Daniel retourne à sa maison pour prier et rendre grâces. Sans ostentation (il est dans sa maison), mais sans se cacher (ses fenêtres sont ouvertes), il poursuit sa vie de piété habituelle. Trois fois le jour, il prie et rend grâces, la face tournée vers Jérusalem. Lors de la dédicace du temple, Salomon avait bien prévu que le peuple en captivité pourrait se tourner vers le pays et la ville de Jérusalem1 Rois 8. 48. Et Dieu avait répondu, en promettant de laisser “ses yeux et son cœur” dans cette maison1 Rois 9. 3. Aussi, pour la foi de Daniel, la ville de Jérusalem en ruineNéhémie 2. 13, et le temple détruit au milieu d’elle2 Chroniques 36. 19, avaient la même valeur qu’au temps de la splendeur de Salomon.
La piété pratique de Daniel devient l’occasion pour ses ennemis d’obtenir sa condamnation (versets 13, 14). Darius était tombé dans le piège que ses courtisans lui avaient tendu pour l’obliger, légalement mais injustement, à jeter Daniel dans la fosse aux lions. Réalisant trop tard sa folie, le roi tente tout pour sauver celui qu’il tenait en grande estime. Toutefois, ni la touchante, mais impuissante sollicitude de Darius pour Daniel, ni ses remords et ses regrets, ne réduisent sa responsabilité en quoi que ce soit.
En définitive, Daniel est jeté dans la fosse, obturée par une pierre et scellée du cachet royal.
Mais si Dieu devait délivrer plus tard son saint serviteur Jésus des liens de la mort par la puissance de la résurrection, il saura dès maintenant sauver son fidèle serviteur Daniel de la mort cruelle à laquelle ses ennemis l’avaient voué. Dieu ferme la gueule des lions (verset 23) ; cet acte de puissance divine est aussi l’expression de l’énergie de la foi, imputée à ses témoinsHébreux 11. 33.
Le décret du roi portait que tout désobéissant serait jeté dans la fosse aux lions (sans être nécessairement dévoré par eux) (versets 9, 13). Il avait été appliqué dans toute sa rigueur (verset 17), de sorte que le roi pouvait légalement faire sortir Daniel de la fosse. Il s’était confié en Dieu et avait été délivré, selon la promesse faite aux pèresPsaume 22. 5. Tout le secret de sa protection et de sa délivrance est contenu dans l’expression : “Il s’était confié en son Dieu” (verset 24).
La guerre entreprise contre Daniel par ses ennemis était en fait une guerre contre Dieu lui-même, qui revendique maintenant sa gloire par le jugement.
L’instrument du jugement est le roi lui-même, investi de son pouvoir (c’est lui-même qui donne des ordres ; verset 25). Les méchants hommes qui avaient conspiré contre Daniel connaissent, eux et leurs familles, la mort affreuse qu’ils lui avaient souhaitée.
La scène se termine sur une proclamation de Darius, invitant tous les peuples de son empire à craindre le “Dieu de Daniel”, le “Dieu vivant” (verset 27). Avec la même autorité despotique par laquelle il s’était investi du pouvoir de dieu sur les autres, il donne l’ordre maintenant de trembler devant Dieu. Ce décret n’aura aucune suite durable dans l’histoire des nations, car personne ne peut changer le cœur des hommes.
Néanmoins, la disposition de cœur du roi est remarquable : il reconnaît l’intervention de Dieu pour sauver Daniel. Prophétiquement, l’attitude de Darius préfigure la soumission des nations à Christ, à la suite de la délivrance du résidu pieux et du jugement de ses ennemisPsaume 18. 42 ; 2 Samuel 22. 44.