Dans son conflit personnel avec les Philistins, Samson rencontre maintenant un nouvel ennemi, le peuple d’Israël, ou au moins, la tribu de Juda.
Trois mille hommes de Juda descendent à la caverne d’Étam auprès de Samson pour prendre le parti des ennemis contre le sauveur d’Israël. On est loin des temps de Barak ou de Gédéon, où un peuple de franche volonté s’était joint aux juges pour les combats.
C’est une chose douloureuse pour un chrétien fidèle d’être méprisé par le monde et rejeté par lui. Paul avait accepté de devenir comme les balayures du monde1 Corinthiens 4. 13, ce qui est tout autre chose que de considérer pour soi-même les choses du monde comme des orduresPhilippiens 3. 8. Mais avons-nous suffisamment pensé à la douleur de l’apôtre de se voir abandonné par la plupart des frères, à la fin de sa vie, au cours de ses deux captivités notammentPhilippiens 2. 20 ; 2 Timothée 4. 16 ? L’exemple de Samson nous parle ici de cet aspect des souffrances du chrétien fidèle au milieu d’une chrétienté devenue infidèle. Malgré ses égarements, Samson gardait encore son caractère de nazaréen, alors que le peuple d’Israël l’avait complètement perdu.
Dans les temps de ruine, la masse se retourne contre les témoins de Christ, en prenant le parti du monde. Les souffrances pour Christ de la part du monde sont échangées contre la tranquillité apparente sous l’esclavage du monde, dans la communion avec lui : “Ne sais-tu pas que les Philistins dominent sur nous ? Et que nous as-tu fait ?” (verset 11).
C’est l’état moral le plus affligeant décrit dans le livre. Israël n’aspire même plus à être délivré de ses ennemis ; il s’associe aux Philistins contre Samson, le libérateur envoyé par Dieu, pour se débarrasser de lui.
Les hommes de Juda livrent donc Samson aux Philistins, lié de deux cordes neuves. Moralement, c’est ce que la chrétienté professante a fait : elle a réduit au silence les témoins de Dieu, elle a entravé la liberté du Saint Esprit, en abandonnant l’autorité de la Bible. Que le Seigneur nous donne au contraire d’écouter ce que son Esprit nous dit par sa Parole et par ses serviteurs !
Toutefois, la force de Samson demeure : l’Esprit de Dieu le saisit (pour la quatrième et dernière fois dans son histoire) ; brisant ses liens, il se retourne contre les Philistins et remporte une très grande victoire. L’ampleur de celle-ci contraste avec le caractère dérisoire de l’arme employée, une mâchoire d’âne fraîche.
Le lieu de la victoire (Ramath-Lékhi, la colline de la mâchoire) garde néanmoins le souvenir de cet instrument méprisable.
Samson, saisi d’une soif ardente, adresse à Dieu une courte mais ardente requête (verset 18). C’est la première prière que l’Écriture nous rapporte pendant la vie du juge. La seconde, au moment de sa mort, sera un appel à la vengeance (16. 28). Dieu répond en fendant le rocher, d’où s’écoule l’eau qui sauve la vie de Samson. Le rocher est toujours un beau type de Christ ; et le rocher frappé évoque l’œuvre de la croix, source de la vie et de la bénédictionExode 17. 6 ; 1 Corinthiens 10. 4 ; Jean 7. 37. Après l’activité extérieure dans le combat, Samson fait donc intérieurement l’expérience de la fidélité de Dieu.
Il en est ainsi dans la vie chrétienne. Les combats extérieurs ne rafraîchissent pas l’âme. La Parole de Dieu est l’épée de l’Esprit contre nos ennemis spirituels ; mais elle répond aussi parfaitement à la soif intérieure de nos âmes. Après les combats, si nous ne revenons pas immédiatement à Christ, la source des eaux vives, nous risquons de retomber entre les mains des incirconcis, c’est-à-dire de nos ennemis.
C’est là que se termine l’histoire générale de Samson, au terme de ces vingt années où il avait jugé Israël (verset 20).
Les Philistins dominaient sur Israël en ce temps-là. On ne voit pas de délivrances générales ou durables opérées par Dieu pour son peuple, comme dans les réveils antérieurs (Barak et Gédéon notamment). Aucune période de repos et de prospérité n’est signalée.
La dernière phase du déclin du peuple est atteinte, avant son relèvement sous la royauté de David. Dieu ne s’est-il donc conservé aucun témoin pour lui ? Au contraire, la position du nazaréen, séparé du monde pour Dieu, est d’une importance spéciale. C’était la vraie mission de Samson, mis à part avant même sa naissance dans ce but. Malgré ses manquements, Dieu était avec lui dans sa carrière publique. Le couronnement de celle-ci est atteint lorsque Dieu accomplit le miracle du rocher fendu pour rafraîchir son serviteur, après sa victoire sur les ennemis.
Mais, personnellement, Samson montre toutes les imperfections et l’abandon progressif d’un nazaréat confié à un homme faillible. Jérémie en parle : au commencement “ses nazaréens étaient plus purs que la neige” ; mais, à la fin, “on ne les connaît pas dans les rues” Lamentations de Jérémie 4. 7, 8. Ce qui désolait le cœur du prophète ne devrait-il pas aussi toucher notre cœur ?
Seul le Sauveur a été le vrai nazaréen pour Dieu : « séparé des hommes par sa parfaite communion avec son Père, et l’obéissance d’un Fils qui n’avait pas d’autre volonté que d’accomplir le bon plaisir de son Père », a écrit un de nos frères. Personne n’a jamais sondé la source de la puissance de l’homme Christ Jésus, ni percé le secret de sa nature. Incompris de tous, même de ses disciples, il a été entièrement seul ici-basPsaume 69. 9, mais le Père était avec luiJean 16. 32. Il n’a rencontré aucune sympathie pour ses souffrancesPsaume 69. 21, mais n’a refusé aucune de ses consolations à ceux qui étaient dans la détresse. Après une rencontre avec lui, jamais personne n’est reparti à vide. Le Seigneur Jésus demeure ainsi l’exemple parfait.