Dans ces circonstances, David fait preuve tantôt de la sagesse d’en haut, tantôt de la sagesse humaine, manifestant ainsi un manque de perspicacité spirituelle. Il sent la main de Dieu sur lui, et ne conteste pas sa justice. Soumis à son gouvernement, il compte en même temps sur sa miséricorde. Pourtant il n’écoute pas toujours la voix de l’Éternel. S’il est un modèle, il l’est imparfaitement. C’est son intégrité et sa droiture que nous devons imiter.
Dans sa confession et son humiliation, par l’abandon de toute confiance en lui-même et par son recours à la grâce souveraine de Dieu, David est un type du résidu d’Israël quand celui-ci reconnaîtra son péché d’avoir crucifié le Seigneur de gloire.
Sous la conduite de Tsadok le sacrificateur, les Lévites portent l’arche auprès de David. Abiathar, l’autre sacrificateur, semble avoir hésité à rejoindre le roi. Était-ce déjà l’indice de son futur abandon, quand il choisira de suivre Adonija plutôt que Salomon1 Rois 1. 7 ?
Les sacrificateurs étaient au milieu du peuple les dépositaires de la pensée de DieuMalachie 2. 7. Pour eux, l’arche et le roi, l’oint de l’Éternel, devaient être ensemble. Mais David comprend que l’arche avait commencé à entrer dans son repos et que le temps de ses pérégrinations était terminé. Certainement, il se juge indigne d’être accompagné par l’arche alors qu’il est en fuite. Elle doit rester avec le peuple tant que celui-ci est encore reconnu comme le peuple de Dieu. Peut-être David gardait-il le souvenir de la folie des anciens d’Israël qui, au temps d’Éli1 Samuel 4. 3, en prenant l’arche avec eux, avaient pensé forcer l’Éternel à leur donner la victoire. David est totalement soumis à la volonté de son Dieu : “qu’il fasse de moi ce qui est bon à ses yeux” (verset 26). Il persiste dans sa confiance en Dieu et refuse de céder au désespoir, tout en sentant tout le poids du jugement qui l’atteint. Une incertitude subsistait néanmoins dans le cœur du roi, lorsqu’il dit : “Si je trouve grâce aux yeux de l’Éternel” (verset 25). Au contraire, pour nous, chrétiens, le “si” fait place maintenant à une certitude. Notre privilège est de pouvoir dire avec l’apôtre : “Nous avons la paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus Christ, par lequel nous avons aussi trouvé accès par la foi à cette faveur dans laquelle nous sommes” Romains 5. 1, 2.
David renvoie donc l’arche à Jérusalem, par la main des deux sacrificateurs Tsadok et Abiathar (versets 25, 29). Mais voilà que tout à coup apparaît la sagesse naturelle de David qui engage à son propre service les sacrificateurs et leurs fils pour qu’ils le tiennent au courant de l’évolution de la conjuration d’Absalom. Ne suffisait-il pas de laisser Dieu seul agir, sans intervention humaine ?
David gravit la montée des Oliviers avec toutes les marques du deuil et de l’humiliation : la tête couverte ou plus exactement voilée1 et les pieds nus, signe d’une peine exceptionnelle.
Une détresse de plus s’abat sur David : la trahison d’Akhitophel, son ami, son confidentPsaume 41. 9 ; 55. 13-15. Il connaissait son discernement et son efficacité, maintenant mis au service d’Absalom. Douleur, honte et danger s’abattent ainsi sur son âme. Son recours est alors à l’unique mais suffisante ressource qui lui reste : la prière. Il est de toute beauté de voir ce mouvement habituel du cœur de David vers Dieu dans les moments d’extrême détresse.
Comment ne pas penser au Fils de Dieu, notre Seigneur qui, dix siècles plus tard, sera aussi trahi par le baiser de celui qu’il appelle encore : “ami” Matthieu 26. 50 ? En ces mêmes lieux, au jardin de Gethsémané, sur les pentes du mont des Oliviers, il offrira à Dieu, avec de grands cris et avec larmes, des prières et des supplicationsHébreux 5. 7.
David demande que le conseil d’Akhitophel soit rendu vain. Il sait que la sagesse de Dieu surpasse infiniment celle de ce traître. Encore prosterné devant Dieu, David reçoit l’exaucement de sa prière, en la personne d’Hushaï, cet ami fidèle. Il comprend que Dieu le lui envoie pour annuler le conseil d’Akhitophel ; il lui demande donc de retourner à Jérusalem. Hushaï accepte sans discussion ce rôle ingrat et périlleux qu’il n’avait pas choisi, et il mènera à bien sa mission (17. 14). Nous, non plus, n’avons pas à choisir la place où le Seigneur nous envoie. N’a-t-il pas dit à ses disciples : “Voici je vous envoie comme des brebis au milieu des loups” Matthieu 10. 16 ? Il est parfois des lieux que nous n’aurions pas désirés, où nous avons à déjouer les ruses de Satan. Mais lutter contre les ennemis de Christ (symbolisés par Akhitophel) pour faire triompher son Nom est toujours une chose solennelle.
Hushaï retourne donc à Jérusalem, dans le lieu où sont l’arche et la sacrificature. Il devait observer Absalom et rendre compte de tout à David par le relais des sacrificateurs et de leurs fils. David pensait peut-être qu’une conspiration en justifiait une autre.
Absalom, lui aussi, entre à Jérusalem, la ville royale, pour mener à terme son dessein de renverser le royaume de son père (verset 37). Mais là, un noyau de fidèles reste attaché au vrai roi. Autour de l’arche, les sacrificateurs et tous les Lévites continuent leur service, et les deux fils des sacrificateurs, Akhimaats et Jonathan, sont prêts à remplir une fonction difficile mais utile.
La fuite de David, chassé de Jérusalem, est une image de celle du résidu juif de la fin, qui devra souffrir des conséquences du crime du peuple, la crucifixion du Seigneur de gloire. C’est la portée prophétique du deuxième livre des Psaumes, et particulièrement du psaume 51, déjà mentionné à l’occasion du péché de David.
Mais, de même que David dans son intégrité et par sa confession a été restauré, le résidu, après s’être lamenté avec sincérité et droiture devant Dieu, se tournera enfin vers son Roi et son SauveurZacharie 12. 10.
Alors le chant de David sera aussi celui du peuple : “De l’Éternel est le salut. Ta bénédiction est sur ton peuple” Psaume 3. 9.