David avait remporté une grande victoire sur Amalek et recueilli un grand butin. Pour autant, il ne manifeste ni confiance en lui-même, ni esprit d’initiative. Il s’interrogeait certainement sur l’issue de la bataille entre Israël, conduit par Saül, et les Philistins ; mais il a la patience d’attendre, ce que n’avait pas su faire Saül1 Samuel 13. 8, 9.
David n’apprend pas la mort de Saül par un rescapé du combat, mais par celui qui se disait être le propre meurtrier du roi, un Amalékite. Trois jours après la défaite d’Israël et la victoire de David, ce messager arrive à Tsiklag pour l’informer d’une manière mensongère. Mais David ne se laisse pas tromper. Notons la tactique de Satan. Après une éclatante victoire remportée sur lui, le croyant peut se faire circonvenir par cet ennemi rusé qui se présente comme un allié.
Cet homme Amalékite vient avec toutes les apparences de la sympathie (ses vêtements déchirés et de la terre sur la tête) pour se prosterner devant David et lui annoncer la défaite d’Israël. Mais le message de l’Amalékite contenait un détail essentiel qui était censé être une bonne nouvelle pour David : la mort de Saül, son ennemi, le dernier obstacle pour son accession au trône. Bien que ne connaissant pas cet homme, David fait preuve d’une grande prudence. Les honneurs et les marques de faveur (la couronne et le bracelet) ne font pas fléchir son jugement. Il pose à l’homme cinq questions simples, mais pertinentes. Ceux qui ont les sens exercés à discerner le bien et le mal se méfient de l’adversaire et s’enquièrent, afin que tout soit amené à la lumière. Combien de fois le Seigneur n’a-t-il pas fermé la bouche à ses détracteurs par une question pertinente !
Le messager se présentait donc comme quelqu’un de neutre, étranger au combat, de passage sur les lieux “par aventure”. Pourquoi cet inconnu était-il donc au courant avant tous les autres de la mort du roi Saül ? Celui-ci, répond-il, avait été blessé par les archers et s’appuyait sur sa lance (verset 6). Après sa “chute” (verset 10) c’est-à-dire sa “défaite”, il s’était rendu compte qu’il était blessé à mort et avait demandé à être achevé. La Parole elle-même contredit le récit de l’Amalékite pour le convaincre de mensonge1 Samuel 31. 3, 4. Devant la menace des archers (et non des chars et des gens de cheval), Saül s’était jeté lui-même sur son épée, et n’avait pas demandé à l’Amalékite de le mettre à mort.
En fait, l’Amalékite se glorifiait devant David du meurtre de Saül dans l’espérance de recevoir une récompense. Il voulait surtout amener David à recevoir de sa propre main la couronne de Saül.
David est profondément affligé par la nouvelle de la mort de Saül ; il réalise pleinement ce que Salomon écrira plus tard : “Si ton ennemi tombe, ne te réjouis pas” Proverbes 24. 17. Même les compagnons de David comprennent sa peine et partagent sa douleur. Il ne nourrissait ni rancune ni aucune pensée de vengeance. Pour lui, il s’agissait de la perte de Saül, de Jonathan et de la défaite du peuple de l’Éternel.
David ici nous sert d’exemple et aura servi d’exemple à tous les vrais chrétiens persécutés dans les siècles passés. A son image, soyons gardés de toute pensée de jugement ou de désir de vengeance ; menons plutôt deuil et pleurons sur le triste état actuel de la chrétienté.
David se tourne alors vers cet Amalékite et continue de l’interroger. Après les trois premières questions : “d’où viens-tu ?” (verset 3), “que s’est-il passé ?” (verset 4) et : “comment sais-tu ?” (verset 5), David lui demande : “d’où es-tu ?” (verset 13) et “comment n’as-tu pas craint ?” (verset 14). Descendant d’une race ennemie du peuple élu, cet homme était complètement ignorant des pensées de Dieu. Il serait jugé par ses propres paroles, s’étant glorifié d’avoir mis à mort “l’oint de l’Éternel”. David souligne la gravité de ce crime et décrète le jugement immédiat du meurtrier (versets 15, 16). Il pouvait y avoir miséricorde pour le peuple infidèle, mais pas pour l’émissaire de Satan.
David recevrait-il la couronne de la part de cette race ennemie depuis toujours ? Non, il ne pouvait accepter le royaume que de la part de l’Éternel qui l’avait oint. Le Prince des rois de la terre, lui non plus, n’a pas accepté l’autorité ni la gloire de la part de Satan, lors de la tentation au désertLuc 4. 6, mais uniquement par le décret divin : “Demande-moi et je te donnerai les nations pour héritage et pour ta possession les bouts de la terre” Psaume 2. 8.
C’est une complainte de toute beauté, empreinte de pensées élevées et de sentiments profonds. Elle devait être écrite à l’intention des fils de Juda (sur lesquels David régnera au début) dans le livre de Jashar (ou du juste) qui contenait déjà le récit de la victoire de Josué contre les AmoréensJosué 10. 13. Là, par un acte de puissance souveraine, Dieu avait arrêté le soleil. Maintenant, sa miséricorde insondable allait être exaltée, ainsi que la douceur de ses compassions.
Saül avait été vaincu, car les archers de la tribu de Benjamin s’étaient ralliés à David1 Chroniques 12. 1-8. L’arc, emblème de la force, lui avait donc fait totalement défaut. L’Esprit de Dieu veut rappeler cette nécessité absolue de la force acquise dans la dépendance de Dieu pour celui qui doit combattre1. Une formation est nécessaire pour maîtriser le maniement de l’arcPsaume 18. 34, cette arme qui tient l’ennemi en respect et à distance.
“Comment les hommes forts sont-ils tombés !” A la manière d’un refrain, cette exclamation revient trois fois, (versets 19, 25, 27), à chacune des trois strophes de ce cantique.
La douleur, le dépit et la honte se mêlent pour désirer que cette triste nouvelle soit cachée dans les villes de Philistie où était conservé le souvenir des danses qui avaient célébré les victoires passées : “Saül a frappé ses mille et David ses dix mille” 1 Samuel 29. 5. Guilboa, le lieu de la défaite présente, est poétiquement personnifié, rendu responsable et voué à la malédiction.
C’est l’éloge de ceux qui sont tombés, exprimé en un tendre et affectueux souvenir. Saül, le pire ennemi de David et Jonathan, son plus cher ami, sont morts ensemble dans la bataille et sont honorés ensemble. Tout exprime la bienveillance, la bonté, la fidélité du cœur de David. Seul, le passé glorieux est retenu (versets 22, 23) et les heureuses conséquences des victoires (verset 24). Aucune trace de rancune ni de ressentiment n’apparaît. C’est le triomphe de la grâce surabondante sur le mal. Paul, bien que persécuté par les Juifs, ses frères selon la chair, avait une grande tristesse et une douleur continuelle en pensant à leur perditionRomains 9. 1-3.
C’est un merveilleux final avant le dernier refrain. L’évocation de l’amour pur et désintéressé de Jonathan bouleverse le cœur de David. Aucune femme ne l’avait aimé à ce point. Il ne se souvient que de l’attachement de Jonathan, même si celui-ci a montré ses limites.
Que le chant de l’Arc nous instruise ; nous y trouvons quelque chose de la douceur et de la débonnaireté de Christ qui a oublié les faiblesses de ses disciples pour parler du secours qu’ils lui avaient apportéLuc 22. 28.