Les pensées qui précèdent conduisent au second point, le jugement. L’apôtre s’adresse à la conscience des croyants et même à celle de tous les hommes.
Paul, quant à lui, recherchait dans sa vie ce qui est agréable au Seigneur, quelle que soit l’issue de sa course. Que le Seigneur, à sa venue, le trouve présent (c’est-à-dire vivant ici-bas), ou absent (c’est-à-dire endormi en Jésus), peu lui importait. Il révèle le motif de son ardeur, et l’étreinte de son cœur : c’est le tribunal du Christ (versets 10, 14).
On peut penser que ce tribunal concerne tous les hommes, qu’ils soient justes ou injustes, car il est question de persuader les hommes, tous les hommes, c’est-à-dire aussi les incrédules. Mais il faut bien savoir qu’il y aura deux comparutions à ce tribunal, correspondant à deux résurrections. La première comparution sera celle des croyants, ceux qui auront part à la résurrection de vie. Puis, il y aura la deuxième comparution, celle des morts, qui seront passés par la résurrection de jugement. Paul, devant le souverain sacrificateur Ananias, rappelle que cette résurrection, tant des justes que des impies, faisait partie de l’espérance juiveActes 24. 15. Le Seigneur lui-même, s’adressant aux Juifs, annonce que “l’heure vient en laquelle tous ceux qui sont dans les sépulcres entendront sa voix ; et ils sortiront, ceux qui auront pratiqué le bien, en résurrection de vie ; et ceux qui auront fait le mal, en résurrection de jugement” Jean 5. 29.
C’est la première comparution qui nous intéresse surtout ici. Il n’y aura pas de jugement à proprement parler, ni de condamnation, mais il y aura “manifestation”. Les croyants seront déjà glorifiés, semblables à Christ. La pensée de ce tribunal ne doit pas nous alarmer. L’offense de nos péchés contre Dieu ne sera plus sous ses yeuxHébreux 10. 14 ; Psaume 103. 12, mais nos actes, paroles, pensées, désirs, mobiles seront entièrement dévoilés.
Quel événement extraordinaire, que cette mise au point avant l’éternité ! La lumière divine projetée sur nos vies, loin de nous effrayer, nous prosternera dans l’adoration. C’est le moment merveilleux où l’Église, la femme de l’Agneau, s’apprête pour les nocesApocalypse 19. 7, “préparée comme une épouse ornée pour son mari” Apocalypse 21. 2.
Quant aux incrédules ou injustes, ils comparaîtront tous :
La perspective de ce tribunal du Christ a plusieurs effets pratiques pour l’apôtre et pour nous tous. Elle doit produire de la crainte dans nos consciences et l’amour dans nos cœurs :
Premièrement, l’apôtre ne craint pas de se placer dans la lumière de ce tribunal. Elle éclaire déjà sa marche sur la terre. “Nous avons été manifestés à Dieu”, dit-il.
Mais deuxièmement, il désire aussi être manifesté aux Corinthiens. Sa vie est transparente. Il avait déjà exprimé cela (4. 2).
Enfin, troisièmement, il est urgent d’avertir les incrédules, de les supplier (verset 20). Il est vital de “fuir la colère qui vient” Matthieu 3. 7 ; Luc 3. 7. Quelle chose terrible que de tomber entre les mains du Dieu vivantHébreux 10. 31, et de paraître seul avec ses péchés dans la lumière d’un Dieu juste et saint1 !
Comme au verset 11, l’apôtre espère que sa marche soigneuse sera pour les Corinthiens un motif de gloire par opposition à l’attitude orgueilleuse et ostentatoire de certains. Paul ne vit pas pour lui-même.
Il est vrai qu’il est parfois “hors de lui-même”. Il a d’heureux moments de relations étroites et secrètes avec Dieu, tout son être étant absorbé dans une bienheureuse contemplation. Il vivait par avance, en esprit, cette position : “présent avec le Seigneur” (verset 8). Il ne faut voir là rien d’extatique, ni de mystique.
Cependant, dans l’intérêt des Corinthiens, il était de sens rassis, disponible, accessible, dévoué et plein d’amourActes 26. 25.
L’amour qui remplissait le cœur de Paul et l’étreignait n’était pas le sien, mais celui de Christ, source de l’amour. Celui-ci, versé dans nos cœurs, devient notre amour. Paul avait été acheté à prix1 Corinthiens 7. 23. D’où son zèle pour l’évangile dont il va être question dans la fin de ce chapitre.
Son ministère ne concernait pas seulement l’assemblée. Il se déclarait serviteur de l’assemblée mais aussi de l’évangileColossiens 1. 23, 25. “Malheur à moi si je n’évangélise pas”, avait-il dit1 Corinthiens 9. 16. Il lui fallait avertir “tous les hommes”, les persuader, les supplier.
L’évangile prêché ici n’est pas celui de la gloire comme au chapitre 4, mais celui de la mort. Tous les hommes sont morts dans leurs fautes et dans leurs péchés. La propitiation est donc à l’intention de tous. “L’homme Christ Jésus s’est donné lui-même en rançon pour tous” 1 Timothée 2. 6. La justice de Dieu est manifestée “envers tous” Romains 3. 22. Le Seigneur avait dit : “Si je suis élevé de la terre, j’attirerai tous les hommes à moi-même” Jean 12. 32 ; 1 Jean 2. 2.
Mais lorsqu’il s’agit de l’application de la croix aux âmes, c’est-à-dire de la substitution d’une victime sainte à un être coupable, il n’est pas question de tous mais de “ceux qui vivent” (verset 15), les croyants seulement. Quelqu’un a écrit : « L’intention est envers tous, mais l’application est sur tous ceux qui croient ».
Résumons les points forts de ces versets : le chrétien a conscience par le Saint Esprit qu’il possède la vie de Jésus Christ. Cela est tellement vrai que la mort n’est qu’une absence passagère du corps et une heureuse présence immédiate avec le Seigneur. La pensée du tribunal de Christ, loin de nous alarmer, produit un effet moral sanctifiant. Elle fait naître dans le cœur une sainte crainte et un désir d’être agréable à Dieu. Enfin, l’évangélisation apparaît au chrétien comme une urgence ; il est responsable d’avertir les hommes.