Les Corinthiens manifestent encore leur état charnel par des querelles qu’ils portaient jusque devant les tribunaux de ce monde (verset 6). Paul s’oppose à ce comportement inconvenant pour des enfants de Dieu en posant la question : “Quelqu’un de vous, lorsqu’il a une affaire avec un autre, ose-t-il entrer en procès devant les injustes et non devant les saints ?” (verset 1) Ce passage est en relation avec le chapitre précédent (verset 12) : “Vous, ne jugez-vous pas ceux qui sont de dedans ?”
Si des injustices se produisent dans l’assemblée de Dieu, c’est le devoir des frères de s’en occuper avec les caractères de grâce et de vérité du Seigneur Jésus, dans la conscience de la sainteté de Dieu et le désir de convaincre les cœurs.
Mais à Corinthe, les frères entraient en procès devant les tribunaux, manifestement dans l’intention d’obtenir justice. L’expression “devant les injustes” (y compris les juges incroyants), montre à ces frères qu’ils ne doivent pas attendre la justice de la part de ce monde. Dans la dernière partie du verset, l’apôtre indique que les procès entre frères doivent être réglés par les saints, c’est-à-dire par les croyants. Ainsi la justice humaine n’interviendra pas et cette manière de faire correspondra à la volonté de Dieu.
La question : “Ne savez-vous pas” (verset 2), répétée encore quatre fois dans ce chapitre (versets 9, 15, 16, 19) est toujours teintée de reproche ; Paul rappelle par là aux destinataires de sa lettre des choses qu’ils savaient ou qu’ils auraient dû savoir. Précédemment (4. 8), il avait déjà parlé du règne des croyants avec Christ durant le millénium ; ce règne sera précédé du jugement des vivants auquel les croyants participeront égalementMatthieu 19. 28 ; 25. 31-46 ; Apocalypse 20. 4-6. La Parole de Dieu ne reconnaît pas le principe actuel de la répartition des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaireÉsaïe 33. 22 entre des personnes différentes. En effet, l’exercice de l’autorité divine ne peut se concevoir sans la justice. Ainsi le jugement et la justice vont de pair ; ce sont les bases du trône de DieuPsaume 89. 15.
C’est d’ailleurs le seul passage de l’Écriture qui nous révèle que les croyants ne jugeront pas seulement le monde, mais également les anges. Intrinsèquement, les anges sont des êtres supérieurs à l’hommeHébreux 2. 7. Mais tous les hommes qui croient au Seigneur Jésus et qui sont de ce fait un avec lui ont acquis une position supérieure aux angesHébreux 1. 6, 14 ; Éphésiens 1. 21-23. Dans la perspective d’une mission future aussi élevée, les “affaires de la vie” ne sont-elles pas ramenées à leur véritable place ?
Ces paroles montrent que le croyant ne doit jamais perdre de vue sa vocation céleste. Paul indique maintenant (verset 4) la voie spirituelle à suivre pour résoudre les problèmes juridiques qui se poseraient entre les croyants. Il invite les Corinthiens à confier le règlement de leurs différends aux frères peu estimés par ceux qui avaient une haute pensée d’eux-mêmes. En effet, pour résoudre de tels problèmes, une grande connaissance de la vérité n’est pas nécessaire, pas plus qu’un don de grâce particulier, mais plutôt de l’honnêteté, de la justice et de l’impartialité. Par là, l’injonction de l’apôtre confondait les Corinthiens au milieu desquels il ne se trouvait manifestement pas une seule personne assez sage pour régler les disputes entre deux frères (verset 5). Ainsi, des frères se rendaient ensemble auprès des juges de ce monde pour plaider leur cause devant des incrédules. Quelle image opposée nous offre Abraham confronté aux querelles entre les bergers de Lot et les siensGenèse 13. 7 ! Relisons le sage conseil d’Abraham à son neveu Lot : “Qu’il n’y ait point, je te prie, de contestation entre moi et toi…, car nous sommes frères !”
Cependant, l’erreur des Corinthiens n’était pas uniquement l’entrée en procès devant les incrédules, mais la querelle elle-même ! Inimitié, querelles, jalousies, colères, intrigues et divisions sont des œuvres de la chairGalates 5. 20, qui ne conviennent pas à des saints, appelés à la paix. Un frère se dispute avec son frère : si ce dernier est vraiment spirituel, il manifeste, dans la puissance de la nouvelle vie, les sentiments de son Seigneur “qui, lorsqu’on l’outrageait, ne rendait pas d’outrage, quand il souffrait, ne menaçait pas, mais se remettait à celui qui juge justement” 1 Pierre 2. 23. L’état charnel des Corinthiens se révélait donc dans le fait qu’ils n’étaient disposés ni à supporter avec débonnaireté et humilité les injustices, ni à se laisser faire tort ; au contraire, l’un commettait l’injustice et faisait tort à celui même qui était son frère dans le Seigneur !
Pour la deuxième fois dans ce paragraphe, Paul emploie les paroles d’exhortation : “Ne savez-vous pas” (verset 9). Les injustes n’hériteront pas du royaume de Dieu. C’est un principe divin souligné par le sérieux avertissement : “Ne vous y trompez pas”. Dans le règne de justice du Seigneur, les injustes n’auront pas de part au royaume, ni sur la terre ni dans le ciel. Seuls y participeront ceux qui ont été lavés dans son sang. Un croyant régénéré peut agir injustement ou tomber dans les péchés mentionnés aux versets 9 et 10, mais son cas est tout différent de celui qui vit dans ces péchés. Celui qui par sa conduite se révèle comme “un injuste” ne peut pas compter sur un héritage dans le royaume de Dieu. Nous n’avons pas le droit de changer la grâce de Dieu en dissolutionJude 4.
Cela ne signifie nullement qu’un authentique enfant de Dieu peut perdre son salut s’il pèche. Ce passage montre une nouvelle fois que la grâce de Dieu et la responsabilité de l’homme ne doivent pas être confondues.
Paul présente donc aux Corinthiens les vérités qui, précisément, traitaient de leur conduite légère en présence du péché. En même temps, il leur rappelle que quelques-uns parmi eux avaient vécu avant leur conversion dans les péchés les plus grossiers, mais qu’ils avaient été lavés, sanctifiés et justifiés au nom du Seigneur Jésus, et par l’Esprit de Dieu (verset 11).
A la sérieuse mise en garde du verset 9, succède ainsi le rappel de l’immense grâce de Dieu qui leur avait été faite.