Comment pouvons-nous juger ou mépriser notre frère, si nous réalisons que nous devrons tous un jour comparaître devant le tribunal de Dieu ? (verset 10). Huit passages du N.T. (quatre dans les Évangiles et quatre dans les épîtres de Paul) parlent de la manifestation des choses cachées. La vie entière, les actes, les paroles et les secrets des cœurs de tous les hommes seront un jour révélés devant Dieu1.
“Il n’y a rien de couvert qui ne sera révélé, ni rien de secret qui ne sera connu” Matthieu 10. 26.
“Il n’y a rien de secret qui ne soit manifesté, et rien de caché n’arrive, si ce n’est afin de venir en évidence” Marc 4. 22.
“Il n’y a rien de secret qui ne deviendra manifeste, ni rien de caché qui ne se connaîtra et ne vienne en évidence” Luc 8. 17.
“Mais il n’y a rien de couvert qui ne sera révélé, ni rien de secret qui ne sera connu” Luc 12. 2.
“Dieu jugera par Jésus Christ les secrets des hommes, selon mon évangile” (2. 16).
“Car nous comparaîtrons tous devant le tribunal de Dieu… Ainsi donc, chacun… rendra compte pour lui-même à Dieu” (versets 10, 12).
“Ne jugez rien avant le temps, jusqu’à ce que le Seigneur vienne, qui aussi mettra en lumière les choses cachées des ténèbres, et qui manifestera les conseils des cœurs” 1 Corinthiens 4. 5.
“Il faut que nous soyons tous manifestés devant le tribunal du Christ” 2 Cor 5. 10.
Ces passages présentent ensemble trois grandes vérités :
Le tribunal est appelé celui de Dieu dans l’épître aux Romains, car tout est rapporté à Dieu dans cette épître (la colère, la justice, le salut, la paix, etc.). Le tribunal est donc divin, et non pas humain. Les hommes comparaissent devant Dieu et non pas devant des hommes.
Dans l’épître aux Corinthiens, le même tribunal est appelé celui du Christ, pour désigner celui qui y siège. C’est devant Dieu, le Fils, que tous comparaissent. Le tribunal de Dieu ou du Christ n’est pas pour les chrétiens un tribunal de jugement (judiciaire ou guerrier). Le juste jugement de Dieu qui devait atteindre les croyants a été entièrement porté par Christ à la croix. Pour eux, le tribunal est déclaratif : là, leur vie entière est manifestée dans la pleine lumière de Dieu. Les croyants, serviteurs du Christ, rendent compte de l’administration de ce qui leur avait été confié. Mais le tribunal est aussi le lieu des rétributions, car le maître récompense ses esclaves.
La pensée du tribunal de Christ étreignait le cœur de l’apôtre envers les âmes perdues dans le monde2 Corinthiens 5. 14 : nous aussi devons proclamer Christ pendant le temps de la grâce.
La perspective du tribunal de Dieu doit aussi étreindre notre cœur à l’égard de la vie collective des croyants sur la terre (versets 10-13). Nous devons cesser de nous juger les uns les autres dans nos habitudes de vie, tout en évitant d’être en scandale à nos frères.
Le Seigneur avait déjà mis ses disciples solennellement en garde vis-à-vis des scandales à l’égard des petits du troupeau (ceux qui sont “faibles” dans la compagnie chrétienne) Matthieu 18. 6, 7 ; Luc 17. 1-4. Aucun aliment n’est souillé en soi (versets 14, 20) : le mal n’est ni dans la matière, ni dans l’organisme humain et ses facultés. La pierre de touche2 est dans l’état du cœur et l’usage que le croyant fait des éléments de la nature (les aliments en particulier). Si la conscience de quelqu’un considère une chose comme souillée, même par un scrupule qui n’est pas fondé, cette chose est souillée pour lui – mais pas pour les autres ; il doit s’en abstenir, sans l’imposer à d’autres.
L’apôtre était pleinement persuadé de cela pour lui-même, connaissant la pensée du Seigneur. Son cœur était “affermi par la grâce” Hébreux 13. 9, de sorte qu’il pouvait s’élever au-dessus de ces questions matérielles. En même temps, la liberté qu’il avait en Christ le gardait de profiter de quoi que ce soit comme d’une occasion pour la chairGalates 5. 13. L’amour pour Christ et pour les frères opère ainsi un contrôle constant de notre marche dans les détails de la vie chrétienne. Dans notre vie personnelle, nous sommes conservés dans “la liberté de la gloire des enfants de Dieu” (8. 21). Vis-à-vis de nos frères, nous éviterons d’attrister l’un ou l’autre par notre conduite (verset 15).
Paul était prêt à se passer de viande plutôt que d’être une occasion de chute pour son frère1 Corinthiens 8. 13. Agir autrement serait un sujet de peine pour ce frère, qui risquerait d’entraîner aussi sa chute : ce frère serait détruit (verset 15), il périrait1 Corinthiens 8. 11. Notre conduite risque ainsi d’annuler “l’œuvre de Dieu” (verset 20). Quelle responsabilité pour nous ! Il ne s’agit pas ici du salut de l’âme de “celui pour lequel Christ est mort”, mais de son état moral présent et des résultats de sa course chrétienne. Pousser un frère (par notre exemple) à faire violence à sa propre conscience sous le prétexte de liberté peut, en pratique, l’éloigner de Christ, qui est mort pour lui, et ruiner sa vie chrétienne dans ce monde.
La liberté en Christ est bonne. Mais notre conduite ne doit jamais laisser même l’impression que c’est celle de la chair. Imposer un mode de vie aux autres sous le couvert de la liberté, ce n’est plus marcher selon l’amour. Personne ne peut me blâmer si je m’abstiens d’user de ma liberté personnelle pour respecter la conscience de mes frères et contribuer ainsi à leur bien. Un peu de renoncement vaut plus que beaucoup de connaissance, surtout pour le bien de mon frère.