Les trois chapitres 9 à 11 forment comme un appendice des huit premiers. Ils se rattachent au grand sujet doctrinal de l’épître, l’évangile de Dieu. Celui-ci apporte la lumière sur l’état de l’homme – pécheur – et y répond entièrement par la grâce. Ceux qui reçoivent cette grâce sont non seulement sauvés, mais justifiés, adoptés et glorifiés. C’est le plein état chrétien que nous a présenté le chapitre 8.
Cet évangile s’adresse à tous, c’est-à-dire qu’il efface la distinction entre Juifs et non-Juifs (appelés ici Grecs ou nations), qui sont tous pécheurs (3. 9 ; 2. 11). Or cette distinction avait été introduite par Dieu lui-mêmeExode 6. 7 ; Ésaïe 43. 21, par une promesse, sans condition sur l’état moral du peupleGenèse 12. 2, 3. Comment donc l’évangile de Dieu se concilie-t-il avec cette ancienne disposition divine ? La distinction est bien effacée pour l’instant, mais sera rétablie dans le futur. Ainsi, la miséricorde de Dieu envers tous se déploie et sa fidélité envers Israël et ses pères est maintenue en grâce. Ces trois chapitres développent ces deux thèmes, tous deux fondés sur la croix du Seigneur Jésus.
Ces sujets amènent aussi l’apôtre à souligner la souveraineté de Dieu et donc à traiter de l’
Ces chapitres s’occupent donc de l’évangile non plus comme moyen du salut individuel, mais comme élément central des grandes pensées ou desseins de Dieu envers le peuple juif et les nations. Le développement de ces desseins commence avant la loi et s’étend jusqu’à la bénédiction terrestre finale d’Israël. Aussi ces chapitres se terminent-ils par une louange remarquable, qui clôt en même temps la partie doctrinale de l’épître.
L’apôtre vient de conclure la description de la position chrétienne en établissant le triomphe de l’amour invariable de Dieu. Aussitôt le souvenir du sort du peuple d’Israël ravive la douleur du cœur de l’apôtre. Leur perdition lui cause une telle tristesse qu’il l’atteste de la façon la plus absolue et solennelle (versets 1-3). Puis il dresse la liste de ce qui leur revient comme droits et privilèges jusqu’au Messie. C’est qu’Israël dans sa totalité1 semble en effet mis de côté par l’établissement du christianisme comme seul moyen de salutActes 4. 12. Rappelons que Paul était l’apôtre des nations (11. 13) Actes 9. 15 ; Galates 1. 16 et qu’il s’était élevé contre le fait de leur imposer la loi2. On pouvait donc peut-être l’accuser de partialité en faveur des nations dans son enseignement ou son ministère. Or, le livre des Actes montre au contraire qu’il a toujours eu soin, jusqu’à sa captivité à Rome, de s’adresser d’abord aux Juifs dans les villes où il passait, avant de les abandonner à leur sort quand ils rejetaient l’évangile.
Dans ce chapitre, nous le voyons poussé, comme hors de lui, par un amour qui rappelle celui de MoïseExode 32. 32, le grand homme de Dieu de l’histoire d’Israël, par qui la loi leur avait été donnée. Il est bien normal que le cœur d’un croyant soit intéressé au salut de chaque membre de ce peuple juif3, de qui nous avons reçu le salut (11. 11) Jean 4. 22. Le Christ, le sauveur du mondeJean 4. 42, est en effet né Juif, comme l’attestent la généalogie de Matthieu 1 ou la douce expression “les siens” de Jean 1. 11. Sa généalogie comme fils de David établit qu’il était aussi le roi, le Messie attendu. Or l’A.T. attestait que celui-ci serait le Fils de DieuPsaume 2. 7 ; 1 Chroniques 17. 13, Dieu lui-même (verset 5). Aussitôt après sa conversion, Paul avait prêché Jésus, “disant que lui est le Fils de Dieu” Actes 9. 20. Les Juifs rejetaient le Seigneur, refusant ainsi l’évangile. Leur titre “d’enfants d’Abraham” ne leur servait plus de rien.
De même aujourd’hui bien des gens et des peuples sont appelés “chrétiens” sans connaître réellement l’évangile. Cette situation tragique doit réveiller nos cœurs pour prendre part à la présentation de l’évangile là où nous sommes placésPhilippiens 1. 5.
Pour établir la vérité, le Saint Esprit se sert ici d’un style de discours très particulier. L’apôtre entre en débat avec un hypothétique avocat des intérêts d’Israël. Il souligne aussitôt que la parole de Dieu prononcée autrefois n’est pas anéantie. Cependant le développement qu’il en fait montre que la bonne compréhension de cette parole, telle qu’elle est reçue par le Juif, suppose depuis le début la souveraineté de Dieu. C’est contre cette même souveraineté que ce Juif voudrait maintenant s’élever, parce qu’elle le met de côté en introduisant les nations. Ce Juif est placé en contradiction avec lui-même et doit donc admettre le rôle de l’élection.
La parole mentionnée aux versets 6 et 9 est celle des promesses en faveur de la descendance d’Abraham. Mais l’histoire des patriarches montre que seule une partie de cette descendance, les “enfants de la promesse”, est “comptée pour semence” (verset 8). Autrement dit, Dieu a choisi parmi la descendance d’Abraham Isaac et non son demi-frère Ismaël, fils de l’esclave Agar ; mais aussi Jacob et non Ésaü ; pourtant ils étaient aussi “égaux” que possible, étant jumeaux. Or le Juif tenait à ce choix, ne voulant pas partager ses privilèges avec les Ismaélites ni avec les Édomites (descendants d’Ésaü). Notons que l’élection choisit l’un pour une bénédiction (verset 12) mais n’exclut pas l’autre à l’avance4 ; c’est seulement à cause des actes d’Ésaü que, bien plus tard, l’Éternel dit par le prophète Malachie : “J’ai haï Ésaü” (verset 13).
Un chemin jusqu’à Dieu, qui “a tant aimé le monde” Jean 3. 16, reste toujours ouvert. Ce chemin passe par le repentir et l’humble acceptation de la grâce. Dieu a dit à Caïn : “Si tu ne fais pas bien, le sacrifice pour le péché est couché à la porte” Genèse 4. 7 ; et Pierre écrit : “Le Seigneur est patient envers vous, ne voulant pas qu’aucun périsse, mais que tous viennent à la repentance” 2 Pierre 3. 9.