En redescendant de la montagne le jour suivant (verset 37), le Seigneur et les disciples qui l’accompagnent retrouvent le monde tel qu’il est : soumis à la puissance de Satan. La foule, avide de miracles, dispute avec les scribesMarc 9. 14 ; les disciples, aux prises avec un démon, subissent la défaite (verset 40).
Ce chapitre évoque la souffrance morale du Seigneur devant tant d’incompréhension et d’incrédulité chez ses disciples : leur incapacité est relevée (versets 13, 42), leur faiblesse (verset 32), la bévue de Pierre (verset 33). La suite du chapitre complète ce triste tableau : les douze ne comprennent pas le sens de ses paroles (verset 45), ils se disputent la première place (verset 46), trahissent leur intolérance (verset 49) et leur ignorance du service chrétien (verset 54).
Le contraste est grand entre les trois disciples qui étaient avec le Seigneur et les neuf qui, restés en bas, sont incapables de maîtriser un démon particulièrement violent (verset 39) Marc 9. 29. Marc donne les raisons de cet échec : ils ne cultivaient pas assez la prière et la discipline personnelle. Ils avaient déjà chassé des démons mais maintenant ils se reposaient sur leur expérience pour pouvoir libérer les autres. Il faut avoir rompu le contact avec le monde et avec son “moi”, comme le suggère l’image du jeûne. Il faut aussi rechercher par la prière la capacité pour exercer la puissance divine qui a été donnée (verset 1). Le père de l’enfant démoniaque s’adresse alors à Jésus. Luc ne détaille pas le récit comme le fait Marc, mais il insiste sur l’intérêt que le Seigneur porte aux personnes. L’intimité des relations familiales avait été ruinée par le démon (verset 38). Jésus, après avoir libéré l’enfant de l’emprise satanique, restaure ces relations : il “le rendit à son père” (verset 42).
On peut aussi établir un parallèle entre cette guérison du démoniaque et le peuple d’Israël. En descendant du Sinaï, Moïse avait autrefois trouvé Israël dans un désordre completExode 32. 6, 7. Le Seigneur, descendant de la montagne, fait la même expérience. Israël était tombé sous la puissance satanique et avait perdu ses relations privilégiées avec DieuDeutéronome 32. 5, 15, 19. Pour les restaurer, il fallait une nouvelle révélation de Dieu. Pour réveiller sa conscience et parler à son cœur, Dieu envoie “son Fils bien-aimé”. Rejeté, le Sauveur doit mourir “entre les mains des hommes” (verset 44). Dans un temps futur les Juifs fidèles (représentés par les neuf disciples restés au bas de la montagne) auront à lutter, après l’enlèvement de l’Église, contre un déchaînement de la puissance satanique. À ce moment-là, le Seigneur délivrera son peuple et le rendra à son Père.
Moïse rayonnait lorsqu’il descendit pour la deuxième fois du SinaïExode 34. 29. Ici le Seigneur apporte dans ce monde de ténèbres un reflet de la majesté divine révélée sur la montagne : “Tous furent étonnés de la grandeur (litt. la majesté) de Dieu” (verset 43).
Jésus invite ses disciples à retenir les paroles entendues. Après sa mort ils comprendraient ce qu’il disait alors. Ce principe a une application pratique. Si nous retenons la parole de Dieu dans notre cœur, le Saint Esprit peut s’en servir. Elle devient cette épée qui repousse l’assaut que l’ennemi nous livreÉphésiens 6. 17, ou cette lumière sur notre sentierPsaume 119. 105.
Le Seigneur place alors devant eux un nouveau sujet d’étonnement : celui qui avait terrassé le démon allait être livré entre les mains des hommes (verset 44). La puissance divine ne pouvait trouver d’autre moyen pour changer le cœur de l’homme.
Il fallait que la mort, “salaire du péché” Romains 6. 23, ou juste sanction pénale contre le péché, fût vaincueHébreux 2. 14. Elle ne pouvait l’être que par la mort du Fils de l’homme (verset 44). Cette faiblesse apparente de Dieu qui se livrait aux hommes était en réalité “plus forte que les hommes” 1 Corinthiens 1. 25. La mort de la croix n’était pas un obstacle malheureux et imprévu sur le sentier de la gloire mais l’expression de toute la sagesse et de tout l’amour de Dieu.
Le Seigneur continue à enseigner ses disciples. Fiers de leurs succès auprès des foules (verset 6), ou jaloux des trois ayant accompagné Jésus sur la montagne, les disciples veulent savoir “lequel d’entre eux était le plus grand” (verset 46). Jésus ne discute pas avec eux. Il prend un petit enfant et leur dit : “Celui qui le reçoit en mon nom, me reçoit” (verset 48). Autrement dit, que j’envoie un apôtre ou un enfant n’a pas d’importance. Le plus grand en apparence, comme le plus petit, représente celui qui l’envoie. Vous me représentez, et moi, je représente mon Père.
Enfin, Jésus démasque le péché de sectarisme dans le service. Voir quelqu’un réussir ce que nous n’avons pu faire (comp. versets 40 et verset 49) est parfois difficile à admettre. Jean voulait même interdire à cet homme de chasser les démons (verset 49). C’était accepter de laisser des hommes prisonniers de Satan. Le Seigneur répond : « La puissance de Dieu peut seule chasser les démons. Laissez ce serviteur accomplir son ministère. »