Il est utile de remarquer que ni dans la première épître (chapitre 5), ni ici, l’apôtre ne s’adresse directement au coupable. Et il ne prend l’initiative d’aucune décision à son sujet. Il aurait pu faire l’un et l’autre en tant qu’apôtre et même “livrer un tel homme à Satan” 1 Corinthiens 5. 5. Mais une telle attitude n’aurait pu nous servir d’exemple, à nous qui ne possédons plus cette autorité apostolique.
Au contraire, en plein accord avec l’enseignement du Seigneur, Paul montre aux Corinthiens que c’est à eux, assemblée locale, de prendre toute décision au nom du Seigneur. Ils ont dû ôter le méchant du milieu d’eux. Ils doivent maintenant, dans la dépendance du Seigneur, exercer au moment convenable les soins d’amour envers celui qui n’est pas encore appelé “frère” 1 mais “quelqu’un” ou “un homme”.
Pour cette administration du pardon2, le Seigneur avait déjà annoncé : “A quiconque vous remettrez les péchés, ils seront remis ; et à quiconque vous les retiendrez, ils seront retenus” Jean 20. 23. Et pour ce qui est de l’action d’ôter ou de recevoir un chrétien à la communion, cela correspond à l’enseignement du Seigneur sur le fait de “lier” et de “délier” sur la terreMatthieu 18. 18.
Quand il sera reconnu que cet homme est relevé dans son âme par le Seigneur, l’assemblée locale aura le devoir et aussi la joie de le recevoir comme un frère dans la communion des saints. Dieu avait pardonné, les Corinthiens pardonnaient, et l’apôtre aussi pardonnait. Il est disposé par avance à être d’accord avec leur décision. Il les traite en adultes dignes de confiance.
Certainement, il n’y a qu’un pardon qui compte : celui de Dieu. Les frères n’avaient pas ici à pardonner comme un offensé le fait à son offenseur, selon l’enseignement du SeigneurMatthieu 18. 15 ; Luc 17. 3. Mais, avec discernement spirituel, ils ont à reconnaître et à déclarer que Dieu a pardonné.
De ce qui précède, nous retiendrons qu’il y a deux dangers, ou plutôt deux excès à éviter : trop de laxisme ou trop de rigorisme qui, tous les deux, manifesteraient un manque d’amour. Par ailleurs, ces deux extrêmes empêchent le relèvement du pécheur.
Obéissants pour exercer la discipline, les Corinthiens le seront maintenant pour relever le coupable. Et l’apôtre prend bien soin de dire qu’il respecterait de tout cœur l’action de l’assemblée et s’y associerait. En effet, ce n’est pas le moindre des desseins de Satan que de diviser.
Voilà donc la mise en garde de l’apôtre. Le diable avait en partie réussi une certaine division pour des questions d’écoles1 Corinthiens 1. 12. Un esprit de parti s’était manifesté. Mais ce ferment de division avait été dénoncé par Paul. Et maintenant encore il prévient ce mal. Il dit, en quelque sorte : Non ! Satan n’opérera pas de désaccord entre vous et moi, nous poursuivrons ensemble “l’unité de l’Esprit par le lien de la paix”.
Les buts de Satan étaient et sont toujours :
Il est toujours l’accusateur des frèresApocalypse 12. 10. On le voit à l’œuvre à propos de Job ou de JoshuaZacharie 3. 1. Il veut empêcher le pardon, car le pardon est le triomphe de la grâce sur le péché. Notre adversaire a été vaincu à la croix et il ne peut détruire l’assemblée du Seigneur. Mais il “rôde autour de nous”, est-il dit3. Il s’en prend aux points faibles afin de ruiner un témoignage local. En effet, c’est là qu’on célèbre la victoire du Seigneur sur lui.
Il y a lieu de s’arrêter sur l’expression : “le grand nombre” (verset 6). La décision avait été prise par l’ensemble du corps en général, ou le “nombre le plus grand” (du grec : pleionon). Pourquoi pas à l’unanimité ? A Corinthe, nous l’avons déjà remarqué, il n’y avait pas que des fidèles mais aussi des pécheurs non repentis (12. 21), des faux prophètes, des ouvriers trompeurs (11. 13). Déjà l’heureux état de l’Église, quand “la multitude… était un cœur et une âme” Actes 4. 32, s’était dégradé. Nous devons toujours désirer que les actions d’une assemblée locale soient faites avec l’accord de tous et il faut être patient et plein d’amour pour atteindre ce but si possible. Mais nous comprenons par ce passage que l’accord général n’est pas obligatoire ; il se peut, par exemple, que les objections d’un frère ne soient pas fondées et que “le grand nombre”, dans la dépendance du Seigneur, doive ne pas s’attarder davantage.