Dans cette dernière partie du chapitre, Paul essaie encore de montrer aux Galates que leur attachement à la loi n’a aucun sens. Il utilise pour cela une scène de la loi (c’est-à-dire du Pentateuque : les cinq livres de Moïse), que les Galates connaissaient sûrement, sans toutefois en comprendre la signification profonde.
Les Galates voulaient se placer “sous la loi”, les ordonnances données à Moïse au Sinaï, comme les docteurs judaïsants qui les entraînaient. En leur demandant s’ils n’écoutent pas la loi, Paul donne à ce mot un sens plus étendu : il désigne l’ensemble des cinq livres de Moïse, qu’on appelait “la loi” Luc 24. 44. Le récit auquel Paul se réfère fait partie de la Genèse (Chapitres 16 et 21).
Paul rappelle1 aux Galates, qui revendiquaient tant être fils d’Abraham – mais pas de la bonne manière – que le patriarche avait eu deux fils : Ismaël et Isaac. La mère du premier était Agar, la servante égyptienneGenèse 16 alors que celle du second, Sara, la vraie femme d’Abraham, n’était pas une esclave. Ici, Paul ne nomme pas ces femmes, mais il insiste sur leur position sociale, qui est transmise à leur descendance : l’un des fils est libre, l’autre est esclave.
Une autre différence est visible dans leur origine (verset 23) : Ismaël, le fils de la servante, est né “selon la chair”, de manière naturelle, comme tout autre enfant. Cette expression montre aussi que des raisonnements humains ont précédé la naissance d’Ismaël. C’est à la suite d’un plan humain qu’Agar a mis son fils au monde. Par contre, la naissance d’Isaac fut suscitée uniquement par Dieu. D’un point de vue humain, Abraham, âgé de 100 ans, et Sara, à 90 ans, ne pouvaient plus espérer avoir d’enfants. Cependant, ils n’ont pas douté de la promesse de Dieu. Non seulement Abraham, mais aussi Sara a fait preuve de foi dans cette situationRomains 4. 19 ; Hébreux 11. 11.
Ces événements de l’A.T., historiquement vrais et crédibles, possèdent en outre une signification symbolique. Pour le lecteur d’aujourd’hui, nombreux sont les passages de l’A.T. qui contiennent un sens typique, figuratif, révélé à la lumière du N.T. Agar, la servante, et Sara, la femme libre, représentent donc deux alliances de Dieu avec les hommes. La première fut faite par Dieu au Sinaï, avec son peupleExode 19. 5 et Agar en est une image, elle qui, la première, donna à Abraham un fils, qui était cependant né selon la chair. Tout comme Ismaël était esclave, le peuple était sous l’esclavage de la loi. L’autre alliance, très peu expliquée ici, avait été conclue par Dieu avec Abraham beaucoup plus tôtGenèse 15. 18. Elle était uniquement basée sur la grâce de Dieu et Abraham n’avait qu’à croire, comme le passage de Genèse 15. 6 en témoigne. C’est Sara qui est comparée à cette alliance. Elle, la femme libre, était la véritable épouse d’Abraham, et elle mit au monde Isaac, le fils de la promesse, l’héritier. Ce n’est donc pas Sara, mais Agar, mère d’Ismaël, qui représente l’alliance de la loi, que les Galates estimaient tellement.
Ismaël, le fils de la servante, dut vivre en dehors du pays de Canaan et ne fut pas l’héritier d’Abraham mais devint le père des peuples arabesGenèse 21. 10. Or le mont du Sinaï est situé en dehors du pays de la promesse, en Arabie, et c’est donc dans le désert arabe qu’Israël s’est placé sous l’esclavage de la loi qui ne pouvait pas le faire parvenir à l’héritage promis (3. 18). D’autre part, le Sinaï va de pair avec la Jérusalem actuelle qui était encore, à l’époque où Paul écrivait cette lettre, sous la servitude de la loi.
Jusqu’à présent, Paul n’a expliqué que l’une des deux alliances, la loi, à l’aide de l’exemple de la servante Agar. De la même manière, il compare Sara à la Jérusalem céleste. Cette Jérusalem là est caractérisée par la liberté, comme son image, Sara, mais aussi par la grâce du côté de Dieu et la foi du côté de l’homme. Elle est donc la mère et la patrie de tous les croyants, toutes époques confondues, pas seulement des chrétiens2. La citation d’Ésaïe 54. 1 confirme le fait que Paul parle ici des croyants en général, et non pas des privilèges de l’Assemblée. Lorsque Dieu fit alliance avec Israël au Sinaï, il “épousa” en quelque sorte son peupleJérémie 31. 32. Les croyants de cette époque sont appelés ici les enfants de “celle qui a un mari”. Mais à cause de son infidélité, de sa désobéissance et de son idolâtrie, Israël fut rejeté par DieuJérémie 3. 7-8 et devint solitaire et stérile. Cependant, quand il reviendra à Dieu, celui-ci se liera à nouveau à son peupleÉsaïe 54. 6 ; Osée 2. 14, 15.
Au verset 28, Paul applique directement aux Galates cette image de l’A.T. Isaac était le fils de la promesse, parce que Dieu l’avait promis à ses parents, au contraire d’Ismaël, le fils selon la chair. Les Galates étaient aussi enfants de la promesse, dans un autre sens toutefois. Dieu avait donné la promesse à Abraham qu’en sa semence, c’est-à-dire en Christ, seraient bénies toutes les nations de la terre (3. 16). Cette promesse s’était réalisée en faveur des Galates qui, pour la plupart, venaient des nations. Isaac est donc considéré ici comme le modèle de ceux qui sont nés, “non pas de sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l’homme, mais de Dieu” Jean 1. 13.
L’histoire d’Isaac et d’Ismaël renferme un autre parallèle, que Paul va rappeler aux Galates : on lit en Genèse 21. 8, 9 que Sara a vu Ismaël rire et se moquer d’Isaac. Ceci peut être comparé à de la persécution. Paul pensait peut-être aux persécutions de la part de Juifs incrédulesRomains 15. 31 ; 2 Corinthiens 11. 26 ; 1 Thessaloniciens 2. 14-16 mais sûrement aussi à la conduite des judaïsants en Galatie. D’un côté, ils cherchaient à s’attirer la faveur des croyants, d’un autre, ils persécutaient par des soupçons et des calomnies ceux qui annonçaient l’évangile. Ils s’avéraient ainsi être ennemis de la vraie foi et de la grâce.
Cet exemple de l’A.T. nous livre finalement un dernier enseignement important, mentionné au verset 30. Après qu’Ismaël se fut moqué d’Isaac, Sara exigea d’Abraham qu’il chasse la servante et son fils, “car le fils de cette servante n’héritera pas avec mon fils, avec Isaac” Genèse 21. 10. Comme Abraham, qui avait dû éloigner Ismaël de sa maison, les Galates devaient renvoyer les judaïsants, avec lesquels ils ne pouvaient pas avoir de communion. Ceux-ci sont en dehors du royaume de Dieu et ne peuvent donc pas hériter de la bénédiction promise.
Paul conclut cette partie consacrée à l’enseignement en réaffirmant la position bénie des Galates, auxquels il se joint aussi. Eux tous ont été autrefois des esclaves – dans des sens différents, certes – mais par la grâce de Dieu, ils sont tous devenus libres et enfants de la Jérusalem céleste.