Le premier homme, après sa désobéissance, avait été chassé d’Éden, premier jardin où Dieu se rencontrait avec lui et se promenait “au frais du jour” Genèse 3. 8. Mais la pensée divine fut toujours de trouver un lieu de rencontre avec l’homme.
Le Cantique des cantiques développe, avec une grande sensibilité, ce sujet cher au cœur de Dieu. On y trouve, en effet, trois autres jardins symboliques visités par le bien-aimé, après la chute du premier homme.
Nous l’avions déjà considéré dans le cadre du troisième cantique. Ajoutons quelques détails en rapport avec sa portée morale et spirituelle. Comme le maître d’un grand domaine se réserve, pour sa jouissance personnelle, un espace privé, intime, le bien-aimé du Cantique des cantiques a lui aussi son jardin clos avec ses sources d’eau, sa fontaine scellée du cachet royal, ses fruits exquis, ses plants embaumés, le tout cultivé ou gardé pour lui : ce jardin clos, c’est la bien-aimée.
De même, il y eut de tout temps sur la terre, parmi les croyants des
Comme la fiancée, quelques-uns de ces croyants ont eu leurs défaillances, mais leur cœur resta pur, non partagé, un lieu de délices pour leur Dieu. Aujourd’hui encore, un chrétien marchant humblement avec Dieu, peut goûter une telle part.
C’est, en réalité, un ensemble de jardins, de vastes espaces où le bien-aimé aime aller faire paître son troupeau et cueillir les lis odorants.
Il y eut quelques rares périodes où le peuple d’Israël fut comme ces jardins pour le cœur de Dieu ; telles furent les premières traites d’Israël vers la terre de la promesse : “Je me souviens de toi, de la grâce de ta jeunesse, de l’amour de tes fiançailles, quand tu marchais après moi… Israël était saint à l’Éternel, les prémices de ses fruits” Jérémie 2. 2, 3.
Telles furent également les meilleures périodes des règnes de David et de Salomon, puis le royaume de Juda sous des rois pieux, Asa, Ézéchias, Josias. Dieu, pardonnant les murmures et les chutes, trouva alors de la joie dans son peuple élu, comme le berger du Cantique des cantiques faisant paître son troupeau dans les prairies fleuries.
Mais revenons à ce jardin intime du bien-aimé (verset 2 a). La fiancée n’a pas pu saisir en son temps le sens spirituel très fort de ce qu’elle exprimait. Ce jardin n’évoque-t-il pas pour nous celui où fut couché le corps de notre Seigneur, après sa crucifixion : “Jardin aux parterres d’aromates” ! Deux hommes embaument le corps de Jésus d’une mixtion de myrrhe et d’aloès et le mettent dans le sépulcre. Mais le jardin de la sépulture devient celui de la résurrection, du triomphe de la vie sur la mort. Saintes femmes, vos aromates sont inutiles ! Tout est désormais vie nouvelle, joie, paix et lumière.
Comme le bien-aimé passe du jardin des aromates dans d’autres jardins où il fait paître son troupeau, notre Seigneur ouvre à ses disciples – ce petit troupeau de l’Église future – l’accès aux jardins nouveaux (encore inconnus dans le Cantique des cantiques) où ils auront à faire paître le troupeau du grand pasteur des brebis ramené d’entre les morts par le Dieu de paixHébreux 13. 20. Ces jardins s’étendent “jusqu’au bout de la terre” Actes 1. 8 ; 13. 47. Peuple d’Israël, “ton bien-aimé, où est-il ?” Nous l’avons trouvé. Il t’attend.
Prophétiquement, ce grand domaine dont le bien-aimé surveille l’éveil, que représente-t-il ? Probablement le royaume d’Israël (dit d’ÉphraïmÉsaïe 7. 2, 9, 17 après la scission en deux royaumes1). Que de fois Dieu avait envoyé des prophètes – Élie, Élisée et bien d’autres – pour soigner le jardin d’Israël et susciter un printemps spirituel, mais en vain ; la dégradation s’était aggravée, suivie de la dispersion de tout un peuple. Aujourd’hui, les dix tribus sont encore disséminées parmi les nations, comme endormies. Les premiers mouvements de vie spirituelle de ce peuple éclaté seront un merveilleux moment. Le troisième livre des Psaumes l’annonce d’une façon touchante : comme l’hirondelle, au retour du printemps, vient retrouver son nid pour y mettre ses oisillons, ce peuple rentrera dans sa terre, marchera “de force en force” pour paraître en SionPsaume 84. 4-8, accueilli par son Messie triomphant.
La vie chrétienne a aussi ses saisons, mais dans le jardin d’un croyant fidèle on devrait pouvoir cueillir des petits fruits de printemps, d’été et d’automne : ce sont ces mille riens, fruits de l’amour, de la patience, du dévouement, du contentement, que le Seigneur apprécie autant que les deux pites – tout son avoir – qu’une pauvre veuve jeta un jour au trésor du templeMarc 12. 42-44.