Au début de ce dernier chapitre, Paul appelle encore une fois “frères” les destinataires de cette lettre1. Malgré ses paroles sans équivoque, presque dures, il n’oublie jamais de leur rappeler qu’il les aime comme ses frères en Christ.
A la fin du chapitre précédent, il leur avait décrit les œuvres de la chair et le fruit de l’Esprit, leur enjoignant de marcher par la force du Saint Esprit, car c’est ainsi qu’ils pourraient être gardés des ruses du diable et de l’activité de la chair comme du légalisme.
Que faut-il faire cependant lorsque quelqu’un tombe quand même dans un péché ? Quand un croyant se laisse surprendre par une faute, c’est alors le devoir des chrétiens spirituels de le redresser. La loi ne peut que condamner, mais la grâce sait restaurer.
Un chrétien spirituel2 n’est pas quelqu’un qui appartient à une certaine catégorie spirituelle, ou qui possède de grandes connaissances bibliques, mais plutôt un croyant soumis à son Seigneur qui se laisse conduire par le Saint Esprit1 Corinthiens 2. 15 ; 3. 1 ; 14. 37. A l’opposé, le chrétien charnel se laisse diriger par ses propres désirs. Le chrétien spirituel vit dans un constant jugement de lui-même. C’est pourquoi il n’ira pas vers son frère avec sévérité et dureté, mais avec un esprit de douceur (qui est un fruit de l’Esprit), car il sait qu’il n’est pas meilleur que lui.
Le Seigneur avait déjà expliqué ce redressement fraternel à ses disciples, dans le cas d’une faute envers un frère : “Si ton frère pèche contre toi, va, reprends-le, entre toi et lui seul ; s’il t’écoute, tu as gagné ton frère” Matthieu 18. 15 ; Jacques 5. 19, 20. Le cas est ici plus général, et Paul y ajoute une mise en garde supplémentaire : “prenant garde à toi-même, de peur que toi aussi, tu ne sois tenté”. Ce service qui consiste à relever ceux qui sont tombés est très utile, mais également très difficile. Le chrétien spirituel a conscience de sa propre faiblesse. Il sait bien qu’il a lui-même souvent manqué et qu’il est toujours en danger de tomber. Ainsi, c’est seulement après s’être jugé lui-même, et avec beaucoup d’humilité, qu’il ira voir son frère.
L’exhortation : “portez les charges les uns des autres”, est souvent associée au fait de porter ensemble les besoins matériels et spirituels3. Mais il ne s’agit pas uniquement de cela. Difficultés, manque d’expérience ou de connaissance, sans oublier les soucis, les peurs et les détresses, constituent des charges que nous avons à porter ensemble, et les uns pour les autres. C’est une bénédiction qu’apporte la communion chrétienne de ne pas devoir nous charger seuls de nos fardeaux, mais de les porter avec l’aide de nos frères et sœurs. Dans la suite du verset, c’est comme si l’apôtre voulait dire : s’il vous faut absolument une loi, alors en voici une, celle de Christ. Sa loi, c’est-à-dire sa ligne de conduite sur la terre, était de se donner entièrement pour les autres, en premier lieu pour son Dieu et Père, puis aussi pour les hommes. Il était venu pour servir et pour donner sa vie en rançon pour un grand nombre d’hommes. On peut aussi voir dans cette loi du Christ le commandement qu’il donna à ses disciples : “Je vous donne un commandement nouveau, que vous vous aimiez l’un l’autre ; comme je vous ai aimés, que vous aussi, vous vous aimiez l’un l’autre” Jean 13. 34 ; 15. 12.
Celui qui accomplit la loi du Christ et porte les charges des autres n’aura pas une haute opinion de lui-mêmeRomains 12. 3. Il reconnaît qu’en présence de Dieu, il n’est rien et que personne ne peut penser avoir de l’importance. C’est seulement par sa grâce qu’un être humain, qui, de nature, n’est que poussière, est pour lui comme une pierre précieuse. Mais tout homme (le croyant aussi) estime facilement pouvoir se passer de l’aide des autres et se place alors au-dessus de ses frères. Celui qui pense ainsi se trompe lui-même. Il ne voit pas qu’il a aussi des faiblesses et des fardeaux, que d’autres pourraient porter avec lui. Dans le livre de Néhémie, les principaux des Thékohites sont un exemple de personnes qui ont une trop bonne opinion d’elles-mêmes. Tous les Juifs avaient été appelés pour reconstruire la muraille de Jérusalem, y compris les habitants de Thékoa. “Mais les principaux d’entre eux ne plièrent pas leur cou au service de leur Seigneur” Néhémie 3. 5. Ils pensaient être supérieurs à leurs frères et n’étaient pas prêts à les aider à porter ces charges. Ce sont les humbles qui ont été les plus actifs et utiles : ils réparèrent en plus une deuxième portion de la murailleNéhémie 3. 27.
Le danger de s’estimer supérieur à d’autres est particulièrement grand quand on commence à se comparer à eux. C’est pourquoi Paul recommande d’éprouver sa propre œuvre. Chacun doit examiner ce qu’il a fait ou ce qu’il est en train de faire à la lumière de Dieu, et non pas se former une estimation subjective de son propre état en se comparant aux autres. Le mot “œuvre” désigne ici l’ensemble de ce qui est fait pour Dieu. Dans le N.T. nous sommes invités à examiner nos pensées, nos paroles et nos actes à la lumière de DieuRomains 12. 2 ; 1 Corinthiens 11. 28 ; 2 Corinthiens 13. 5 ; Éphésiens 5. 10 ; Philippiens 1. 10. L’examen et le jugement de soi-même sont essentiels pour toute croissance spirituelle. Celui qui éprouve ainsi son œuvre trouve de quoi se glorifier en lui-même, et non en se comparant aux autres. Il ne s’agit pas de vanitéPhilippiens 2. 3 ; Jacques 4. 16, par laquelle l’homme s’élève lui-même et cherche les flatteries de son entourage. Quand Paul parle de se glorifier, il s’agit de ce qui contribue à la gloire de Dieu. Il écrit aux Corinthiens que sa gloire était de savoir, en toute bonne conscience, qu’il avait vécu et travaillé auprès d’eux avec simplicité et sincérité devant Dieu, et non pas de manière charnelle2 Corinthiens 1. 12-14 ; Philippiens 2. 16 ; 1 Thessaloniciens 2. 19. L’examen de sa propre œuvre devant Dieu fait prendre conscience de sa responsabilité personnelle, mais aussi de ses fautes et de ses manquements, de sorte qu’on a soi-même aussi un fardeau à porter. Au verset 2, le mot “charges” désigne quelque chose d’oppressant. Ici, le mot fardeau désigne une chose qu’il faut porter.