Pour la première fois, le Prédicateur s’adresse à nous directement. Il nous avertit d’un piège fort dangereux, une religion de formes sans véritable contact avec DieuMatthieu 15. 8. La sensibilité morale fait défaut (verset 3. 17) ; on prétend avoir une relation avec Dieu mais on n’écoute plus sa Parole (verset 1), on a oublié sa grandeur (verset 1). Ce piège nous guette tous. Pourquoi est-il si grave ? Parce qu’il conduit à mépriser Dieu. Et quand nos rapports avec Dieu sont défaillants, toutes nos autres relations s’en trouvent perturbées.
“Prends garde à ton pied”. Notre comportement public comme privé doit être soigné, en harmonie avec une recherche sincère de Dieu. Nous devons être encore plus vigilants quand nous allons dans le lieu de la présence de Dieu.
“Ne te presse point d’ouvrir ta bouche”. Le Prédicateur ne condamne pas la prière mais rejette la précipitation et le flot de paroles qui traduisent souvent un manque de réalité. En effet le rêve1, l’irréel, vient de trop d’occupations. De même le manque de poids moral résulte de beaucoup de paroles. Tout s’évapore, c’est la vanité (verset 6).
“Ne tarde pas à accomplir ton vœu” (verset 4). Si la loyauté exige que l’on tienne parole envers son prochain, cela est dû à Dieu encore davantage. Plutôt que de faire des vœux qui ont toujours un caractère légal, consacrons-nous entièrement au Seigneur en réponse à son amourRomains 12. 1
Soyons donc prudents, pleins de respect, dans nos activités religieuses. Elles engagent le nom de Dieu qui ne tient pas pour innocent celui qui montre de la légèreté ou une exaltation mystique. Là, plus qu’ailleurs, une conclusion s’impose : “Crains Dieu” (verset 6).
Le Prédicateur reprend le thème de l’oppression politique qui l’avait rendu si pessimiste (4. 1-3). Maintenant, il a compris que cela ne doit pas soulever la question fréquente : “Pourquoi Dieu permet-il cela ?” Non, il sait que Dieu est au-dessus des hommes et, s’il laisse faire le mal, il voit tout et note toutLamentations de Jérémie 3. 34-36. Non seulement, il jugera les hommes en son temps (3. 17) mais il permet que chacun trouve, pour ainsi dire, son maître sur la terre. “Il y en a de plus hauts qu’eux”. Par ailleurs, celui qui est haut placé, dépend plus qu’il ne pense de ceux qui lui paraissent placés plus bas. Par exemple, chacun a besoin des ressources des champs2. L’agriculture, si humble soit-elle, a une place de choix car elle est nécessaire à l’entretien de la vie.
Lorsque la passion de l’argent habite un homme, il n’est jamais satisfait. Quelle que soit sa possession, il languit toujours. La faim de l’argent renvoie à un autre désir, le désir de puissance et de sécurité. Mais l’argent n’apporte aucun apaisement. Il ne le peut pas, c’est une puissance mensongère. Elle semble combler (10. 19) et apporter la sécurité (7. 12). Mais elle ne tient pas ses promesses, “ne rassasie pas”.
De plus, l’argent exerce ses ravages dans le cœur même de l’homme ; il captive sa confiance, le pervertit et prend la place de Dieu. L’amour conduit à une assimilation entre celui qui aime et ce qu’il aime. Aimer Christ attire nos cœurs là où il est. Aimer l’argent nous lie au sort de ce dernier qui est la destruction. “Là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur” Matthieu 6. 21.
“Avec l’augmentation des biens, ceux qui les mangent augmentent aussi”. Et c’est un cercle sans fin. Notre époque en est un bon témoin. Si l’on gagne davantage, on a toujours plus de charges, d’obligations et d’envieux qui cherchent à soutirer quelque chose. Il reste à l’homme riche un avantage bien léger, que ses richesses s’évaporent ou lui soient conservées, “il le voit de ses yeux” (verset 10) !
L’accumulation de biens s’accompagne souvent d’un appauvrissement des valeurs que l’argent ne peut procurer comme la tranquillité d’esprit, la paix et la joie (versets 11, 16). De plus, les richesses peuvent être perdues en un instant (verset 13). Tant d’années d’efforts qui s’en vont en fumée en quelques heures. Finalement l’argent ne préserve pas de la maladie et n’apporte rien à l’homme en face de la mort (versets 14, 16).
Le N.T. nous dit comment briser le pouvoir de cet argent périssable. C’est en le donnant. Le don nous libère de la tyrannie de l’argent, et introduit autre chose, la grâce, la gratuité. Nous pouvons alors nous amasser comme trésor, un bon fondement1 Timothée 6. 19. Voilà la seule véritable sagesse par rapport à l’argent.
Ce paragraphe constitue un petit sommet qui brille au milieu de ce livre parfois sévère. Il commence par la beauté (verset 17) et finit par la joie (verset 18). Le Prédicateur nous résume ce qu’il a trouvé de bon dans la part que Dieu a réservée aux hommes. Non seulement de bon mais aussi de beau. En effet, il sait contempler ce que Dieu fait et donne, et qui contient toujours un rayonnement de beauté et de gloire. Cette part consiste à recevoir toute activité comme un don de Dieu (verset 17) et considérer toute richesse surajoutée (verset 18) comme un cadeau supplémentaire, “une réponse dans la joie du cœur”. Oui, sur cette terre de vanité, il y a une joie qui vient de Dieu.
Ainsi le bien-être et la richesse ne deviennent mauvais que si nous en faisons le but de notre vie. Si nous les recevons comme un don de Dieu, ils peuvent contribuer à un bonheur simple, concret. Mais ce bonheur ne découle pas automatiquement de la prospérité. Nous sommes toujours tentés de penser que nous avons gagné, mérité ce que Dieu nous donne. Ce serait oublier que Dieu en a la souveraineté, qu’il en est le propriétaire. C’est lui qui nous donne la santé et les facultés pour les acquérir et pour en jouir (2. 24 ; 3. 13 ; 5. 18). De plus Dieu veut aussi nous donner de maîtriser notre attitude envers la richesse au lieu de nous laisser dominer par elle (verset 19).