Le peuple d’Israël vient de demander un roi ; ce chapitre va décrire comment Saül sera choisi et présenté à Samuel. Ainsi, le peuple va passer de Samuel à Saül pour qu’il le juge et le conduise. Va-t-il gagner à cet échange ?
Par sa généalogie, Saül appartient à la tribu de Benjamin, et non pas à Juda, la tribu royale. En effet, “le sceptre ne se retirera point de Juda”, avait prophétisé JacobGenèse 49. 10. C’est déjà un indice que Saül ne serait pas le roi que Dieu avait en vue.
En dépit de son territoire restreint, Benjamin contient des villes de renom, telles que Jérusalem, Béthel, Mitspa, Rama. Au demeurant, aussi dignes que soient nos ancêtres ou nos parents, nous ne pouvons en aucune manière nous prévaloir devant Dieu de leur qualité morale ; elle ne nous confère aucun mérite, mais une responsabilité supplémentaire.
Dieu choisit précisément un homme qui ne pouvait lui plaire, mais dont les qualités naturelles répondront aux désirs du peuple charnel (verset 20). Israël ne pourra donc pas se plaindre : Saül est fort, vaillant, beau, grand, un homme d’élite, surpassant tout le peuple (9. 2 ; 10. 23). Sans être tout jeune – il a déjà un fils en âge de porter les armes (13. 2) – il contraste tout de même avec Samuel que les anciens avaient traité de vieux (8. 5).
Saül possède en outre des caractères moraux attachants : soumis et affectueux à l’égard de ses parents (verset 5), humble (10. 22), petit à ses propres yeux (9. 21 ; 15. 17), magnanime (11. 13), disposé à écouter les conseils de ses serviteurs (verset 10). Un homme, même incroyant, peut ainsi montrer des qualités naturelles morales qui rappellent qu’il a été créé à l’image de Dieu. C’était en apparence le bon choix. Mais pour Dieu, la belle apparence physique et même morale ne suffit pas : “Ne regarde pas à son apparence ni à la hauteur de sa taille… l’Éternel regarde au cœur” (16. 7).
Quand la Bible parle pour la première fois d’un homme, ce qu’elle dit de lui, et en particulier de son activité à ce moment-là, est souvent très significatif de ce que sera plus tard cet homme pour Dieu. Ici, Saül poursuit en vain des ânesses perdues. Plus tard, il poursuivra David d’une haine implacable. En contraste, David, que Dieu choisira pour paître son peuple, sera occupé à garder et protéger le petit bétail quand commencera son histoire (17. 34, 35). Peut-être le peuple d’Israël ressemble-t-il davantage ici à des ânesses sans sagesse, puisqu’il a rejeté l’ÉternelJob 11. 12, qu’à des brebis dociles aux soins d’un berger.
Il est étrange que Saül ignore l’existence de l’homme de Dieu, alors que Samuel était connu dans tout Israël (3. 20) et que Guibha, domicile de Saül (10. 26), n’est pas loin de Rama de Tsuph (1. 1). Sans doute n’y avait-il jamais eu chez Saül un besoin des choses célestes et spirituelles.
Ce récit peut aussi être lu comme une sorte de parabole : l’homme est en recherche permanente mais vaine. Quand, à bout de ressources, il se tourne vers Dieu, il a bien souvent la pensée de conclure un marché avec Dieu, comme Saül qui veut rémunérer le prophète. Or l’homme doit apprendre qu’il est par nature sans ressource (verset 7), mais que Dieu offre gratuitement sa grâceÉsaïe 55. 1, 2. Le peu que possède le serviteur est en argent (un quart de sicle). Cela peut évoquer la rédemption ou l’expiation selon la grâce souveraine de Dieu. C’est en effet déjà cette grâce qui nous tire vers Dieu. Mais si on s’approche de lui, combien cette grâce sera multipliée !
Appeler un prophète un “voyant” n’est pas la marque d’une haute spiritualité (verset 9). Le sens du mot “prophète” est plus large : il est celui qui paraît et parle comme oracle de Dieu. Dans un temps de déclin, on prend garde aux effets plus qu’à la source.
Pour aller à la ville du voyant, il faut “monter”, comme souvent quand la Bible parle des lieux de communionHabakuk 3. 19. Puis les deux hommes rencontrent des jeunes filles qui seront de remarquables témoins. Dans l’humilité de leur tâche (puiser de l’eau), elles symbolisent ceux qui s’abreuvent à l’eau de la vie, c’est-à-dire qui sondent les Écritures. Elles connaissent parfaitement l’homme de Dieu, sa demeure, ses occupations, ses intentions et sont heureuses d’en parler. Elles engagent Saül et son serviteur à aller à lui sans crainte. Quelle belle image du croyant heureux de parler de celui qui mène au ciel !
Samuel vit dans l’intimité de l’Éternel qui lui révèle ses secretsPsaume 25. 14 ; 32. 8. Contrairement à Saül qui ignore tout, rien ne le surprend. Il a attendu la désignation du roi et il l’accueille maintenant au lieu du sacrifice, là où tout est préparé1. La part réservée à Saül rappelle, mais en partie seulement, celle du sacrificateurLévitique 7. 31-36 ; Exode 29. 27. En effet, seule l’épaule est pour lui, symbole de la force : il est bien investi du pouvoir, mais celui-ci sera dur et arbitraire, car il manque l’autre portion, la poitrine, qui parle de tendresse et d’amour pour le peuple de Dieu.
Dieu révèle à Samuel que Saül sauvera Israël de la présence oppressante des Philistins. Dans sa miséricorde, Dieu se sert de qui il veut en faveur de ceux qu’il appelle encore “son” peuple, bien qu’il soit sous la discipline. Nous “considérons la bonté et la sévérité de Dieu” Romains 11. 22. Il agit toujours envers les siens en gouvernement (la sévérité) et en grâce (la bonté).
Saül rencontre Samuel à quatre endroits :
L’injonction du verset 27 nous parle aussi : il est essentiel de nous arrêter et d’écouter la parole de Dieu avant toute autre action.