Colosses était une petite ville de la province de Phrygie, en Asie mineure, la Turquie actuelle. Située à 160 km à l’est d’Éphèse, elle était proche de Laodicée et de Hiérapolis, deux autres villes mentionnées dans l’épître (2. 1 ; 4. 13, 16). L’apôtre Paul avait traversé la Phrygie à deux reprisesActes 16. 6 ; 18. 23, mais il ne semble pas qu’il se soit arrêté à Colosses ; en effet, les Colossiens ne connaissaient pas son visage (2. 1).
L’évangile avait donc été prêché dans cette région par d’autres que Paul, notamment Epaphras, fidèle serviteur du Christ et compagnon de service de l’apôtre (1. 7). Les assemblées formées à la suite de son travail entretenaient d’heureuses relations de communion (4. 15, 16).
Paul a écrit cette lettre au cours de sa première captivité à Rome (dans les années 62-63). Il jouissait alors d’une certaine liberté, entouré de quelques fidèles amis : Timothée, Luc, Aristarque, Tychique et Epaphras. Ce dernier lui avait apporté des nouvelles récentes de Colosses. L’état général de l’assemblée était très bon, comme le montre le début de la lettre ; l’apôtre reconnaît tout le travail de la grâce de Dieu qui entretenait chez les Colossiens la foi, l’amour et l’espérance.
Mais de faux docteurs essayaient de propager parmi eux des erreurs dangereuses qui ont causé plus tard de grands ravages dans l’assemblée. Chez les Galates, des docteurs judaïsants avaient déjà prêché le retour à la loi (l’obligation de la circoncision en particulier), en annulant ainsi la grâce de l’évangileActes 15. 1-5 ; Galates 2. 12 ; 5. 2, 11, 12. A Colosses, le danger était différent, et tout aussi subtil. D’un côté, les faux docteurs étaient aussi des judaïsants qui voulaient imposer les ordonnances de la loi aux chrétiens. Mais, de l’autre côté, sous le couvert de différentes philosophies (grecque, égyptienne, perse et hindoue), ils propageaient des idées gnostiques1 et s’attaquaient aux gloires de Christ. Ils accordaient aux anges une puissance excessive dans le monde invisible, tandis qu’ils rabaissaient la personne de Christ au rang inférieur d’une créature, osant ainsi nier même sa prérogative et ses gloires de Dieu Créateur. Ils affirmaient que la matière est la vraie source du mal dans le monde ; par suite, ils niaient que la création soit l’œuvre de Dieu. Pour se libérer de la nature mauvaise, il fallait se soumettre à un ascétisme2 poussé à l’extrême. Ils propageaient ainsi des enseignements de démons, en interdisant de manger des viandes et de se marier1 Timothée 4. 3. Chose étrange, cette recherche d’une fausse spiritualité s’accompagnait d’une vie dissolue (ce qui est souvent le cas des faux docteurs dans tous les temps).
La lettre que Paul écrit aux Colossiens, (l’une des quatre qui datent de la première captivité de l’apôtre à Rome3) répond à ces dangers et développe les ressources de la grâce de Dieu en Christ pour nous en garder. Dieu a laissé le mal doctrinal se propager dans les assemblées déjà du temps des apôtres ; ainsi, des instructions morales nous sont données par l’enseignement même de leurs épîtres, pour nous avertir et nous garder de tels dangers.
A notre époque, le légalisme remplace le judaïsme, tandis que l’intellectualisme et le mysticisme remplacent le gnosticisme. Pour ne pas nous laisser entraîner par ces deux courants, notre sécurité est de revenir toujours à la simplicité quant au Christ2 Corinthiens 11. 3, en tenant ferme à ce qui nous a été enseigné dès le commencement1 Jean 2. 14.
Les écrits de Paul montrent les résultats de l’œuvre de Christ (sa mort et sa résurrection) et de son élévation dans la gloire : former pour Dieu un peuple céleste destiné à habiter le ciel pour l’éternité. Le Saint Esprit présente cette vérité sous deux aspects différents, bien qu’inséparablement liés :
Ces deux points de vue sont développés simultanément dans l’épître aux Colossiens. Ainsi, dans son état antérieur, le croyant y est vu à la fois comme étant autrefois mort dans ses fautes (2. 13), mais aussi comme vivant dans ce qui appelle la colère de Dieu (3. 7). L’épître aux Colossiens établit ainsi le lien entre les deux épîtres aux Romains et aux Éphésiens.
Pour Israël autrefois, le Jourdain, image du fleuve de la mort, séparait le désert du pays de la promesse. Après avoir sacrifié la Pâque et traversé la mer Rouge, le peuple racheté d’Égypte a passé le Jourdain en laissant le désert derrière lui pour entrer dans sa terre. Le chrétien, lui, est encore dans le monde (le désert spirituel), mais se tient déjà par la foi dans le pays (les lieux célestes) jusqu’à la réalisation de son espérance, la venue de Christ. L’épître aux Romains (comme celle aux Hébreux et les épîtres de Pierre) montre le croyant encore dans le monde. L’épître aux Colossiens le montre comme venant de traverser le Jourdain. Il est ressuscité avec Christ (le symbole des douze pierres placées à Guilgal) 4, ayant passé par la circoncision du Christ (2. 11), le secret de la liberté chrétienne. Toutes les instructions pratiques de l’épître en découlent. Mais une espérance est aussi réservée au chrétien en Christ dans les cieux (1. 5, 27). L’épître aux Éphésiens complète le tableau des desseins de Dieu à notre égard. Les croyants sont déjà vus dans les lieux célestes, là où Christ se trouve ; ils sont bénis en lui, assis avec lui, rendant témoignage devant les autorités célestes, et ils sont engagés dans un combat pour acquérir la jouissance de leur héritage. Là encore, l’épître aux Colossiens relie les deux épîtres aux Romains et aux Éphésiens.
Dans l’épître aux Éphésiens, le Saint Esprit tient une place importante. On le trouve successivement mentionné en rapport avec :
Dans l’épître aux Colossiens, au contraire, le Saint Esprit n’est mentionné qu’une seule fois, et encore d’une manière incidente (1. 8). Mais Christ est présenté avec beaucoup de détails, comme étant la vie du croyant (3. 4), ce qui est d’une importance égale.
L’apôtre présente plutôt aux Éphésiens la position des chrétiens (“nous en Christ”), aux Colossiens, le caractère de leur vie et de leur marche (“Christ en nous”). Toutefois, le caractère de ces deux épîtres est très proche.
Les trois épîtres de Paul aux Éphésiens, aux Colossiens et aux Corinthiens présentent les croyants formant ensemble le corps de Christ, unis indissolublement à lui, la Tête, le Chef. Chaque épître montre un aspect particulier de ce joyau des desseins éternels de Dieu :
Un tableau (page suivante) résume cette comparaison entre les épîtres.
Dans sa sollicitude pour les Colossiens, l’apôtre doit reprendre point par point toutes les erreurs déjà infiltrées parmi eux, et qui les détachaient de la personne de Christ, voilant ses gloires merveilleuses à leurs yeux.
Avant de le faire, il se plaît d’abord à reconnaître tout ce qu’il y avait de bon parmi eux ; puis, il prie pour eux et leur parle de Christ, le Créateur, le centre de l’univers et des desseins éternels de Dieu.
Alors, il les met en garde contre tous les dangers qui les guettaient (c’est le but principal de sa lettre) ; puis, il déploie devant eux le tableau le plus complet de la vie de Christ dans la marche des croyants sur la terre.
Cet ordre moral de l’épître conduit ainsi naturellement au plan suivant, adopté pour le commentaire :