L’apôtre fait appel maintenant à la responsabilité des chrétiens au milieu de ce monde. Avec tendresse, il sollicite de leur part une conduite digne du Seigneur. Ces croyants juifs de la dispersion étaient parmi les nations comme des étrangers (1. 1) et en subissaient l’opprobre. Mais surtout, leur appel céleste faisait d’eux des gens de passage et des étrangers pendant le temps de leur séjour ici-bas (1. 17) ; ils n’avaient point de demeure permanente, mais attendaient l’héritage céleste (1. 4). À ce titre-là aussi, les gens des nations les méprisaient1.
De tout temps, les croyants fidèles ont manifesté ce caractère céleste. Abraham demeura en Canaan comme dans une terre étrangère, bien qu’elle fût son héritage. Par la foi, il contemplait déjà les gloires de la cité préparée pour les saintsHébreux 11. 8-10 ; 13. 16. Il pouvait dire aux occupants du pays : “Je suis étranger, habitant parmi vous” ; mais le témoignage qu’il rendait était tel, que ceux-ci pouvaient lui répondre : “Tu es un prince de Dieu au milieu de nous” Genèse 23. 4, 6.
Aujourd’hui aussi le monde nous observe ; montrons-nous une “conduite honnête” ? Accomplissons-nous les “bonnes œuvres” que Dieu a préparées à l’avance sur notre chemin (verset 12) Éphésiens 2. 10 ? Nous ne serons fidèles en cela, rappelle l’apôtre, qu’en nous abstenant des convoitises charnelles qui font la guerre à l’âme ; celles-ci proviennent du monde qui nous entoure1 Jean 2. 16, 17. La corruption qui est dans le monde (4. 4) attire l’homme charnel ; l’impureté pénètre par les sens. L’orgueil de l’homme et son ambition le détournent des choses de Dieu. Le croyant fidèle a laissé tout cela à la croix de Christ (verset 24) ; il vit désormais pour Dieu (4. 2) et marche par l’EspritGalates 5. 16, 24.
Les incrédules perdent leur âme en satisfaisant toutes leurs convoitisesMatthieu 16. 26. Le croyant connaît le prix payé pour son salut (1. 9, 19) ; par amour pour Jésus son Sauveur, il se préserve de tout ce qui corrompt. Sa conduite pure et droite devrait convaincre les incrédules qu’il y a un secret dans sa marche. Une lumière venue d’ailleurs émane du chrétien fidèleMatthieu 5. 16 ; cette lumière juge la conduite de ces incrédules et les porte à la calomnie (verset 12). Veillons à confondre de tels hommes par nos bonnes œuvres ; le jour viendra où ils devront rendre gloire au “Dieu des rétributions” Romains 2. 6 ; 1 Corinthiens 4. 5.
Dieu a détruit l’homme au temps du déluge, parce que la violence et la corruption se manifestaient sans frein. Depuis Noé, un certain ordre a été établi afin que l’homme soit tenu en bride et le mal puni. C’est à ces institutions humaines que l’apôtre fait allusion ; elles sont le fondement d’une société organisée. Le croyant reconnaît les autorités comme étant ordonnées de DieuRomains 13. 1-7. Il leur est soumis en toutes choses, non par simple obligation mais parce qu’il a égard au Seigneur qui est au-dessus d’elles. Les croyants de Crète pouvaient estimer que les autorités de leur île étaient injustes, oppressives ; leur affaire n’était pas de les juger, encore moins de les contester, mais de se soumettre à ellesTite. 3. 1.
Le chrétien fidèle laisse le monde choisir ses responsables. Il fait confiance à Dieu qui est au-dessus de tout et agit toujours pour son bien, quelles que soient les apparences. Le chef d’une nation (le roi) et ses subordonnés (les gouverneurs) ont la mission de maintenir l’ordre et la justice dans le pays, pour le bien de tous : c’est un principe divin que l’apôtre rappelle, bien que dans la pratique l’homme soit en général défaillant. En effet, pour louer le bien et punir le mal en toute conscience et justice, il importerait d’être bon, droit et juste soi-même ; ces vertus n’ont vraiment cours que dans le royaume de Dieu.
Le croyant qui aime le Seigneur se détourne du mal et fait le bien (3. 11). Il ne se mêle pas aux gens remuants et contestataires ; il sert son roi et son DieuProverbes 24. 21, 22. Faire le bien, dans ce passage, est essentiellement se conduire d’une manière droite et juste aux yeux des hommes, se soumettre aux lois de l’État et à toutes ses ordonnances. Il y a une limite cependant, celle de l’obéissance à Dieu, car nous sommes avant tout ses serviteurs (verset 16) Actes 4. 19 ; 5. 29.
L’insensé (verset 15) ignore le secret de la conduite de l’homme de bien, mais doit s’incliner devant les faits. Le croyant pieux n’est moralement asservi à personne dans ce monde : il est libre. Il accomplit le bien pour le plaisir de Dieu, il est heureux d’être son serviteur. Cela le conduit à aimer son prochain et à se mettre au service des hommes.
Chacun de nous se souvient du triste esclavage dont il a été libéré : du péché qui domine, de la loi qui condamne, et de Satan qui asservitRomains 6. 17-19 ; Galates 5. 1, 13 ; Hébreux 2. 14, 15. Si le chrétien léger use de cette liberté pour mal se conduire (verset 16), donnant ainsi aux incrédules l’occasion de médire2 Samuel 12. 14 ; Romains 2. 24, le fidèle, lui, se souvient qu’il a été “acheté à prix”, et il sert son Dieu avec crainte. De même, dans ses paroles comme dans sa conduite, il honore le roi ou le gouverneur de son peuple. Il s’abstient de tout propos irrespectueux ou méprisant et s’éloigne de toute contestation.
L’apôtre ajoute : “Honorez tous les hommes” ; les occasions en sont multiples. Les Juifs avaient eu tendance à mépriser les gens des nations, et maintenant la pareille leur était rendue. Celui qui est animé de l’Esprit de Christ reconnaît en tout homme, même le plus avili, la dignité que Dieu confère à tout être humain. Il lui porte honneur en accordant le respect voulu à la personne humaine, mais aussi en le secourant avec miséricorde. L’apôtre ajoute : “Aimez tous les frères”, les frères dans la foi. Ceux-ci sont considérés ici comme un ensemble, une famille au sein de laquelle l’amour fraternel (1. 22) peut se déployer continuellement, à la gloire de Dieu le Père.