Bien que prophète en Israël, Osée rattache plutôt son message aux rois de Juda (Jotham, Achaz et Ézéchias), et passe sous silence la plupart des descendants de Jéhu en Israël (Joakhaz, Joas et Zacharie), pour ne mentionner que Jéroboam II.
Dieu est juste, soit pour récompenser, soit pour juger :
En fait, le jugement de Jéhu était aussi celui du peuple d’Israël, qui se conclura par la déportation en Assyrie.
Dieu demande au prophète à s’unir à une femme de mauvaise vie (probablement une prostituée sacrée) 1, dont la conduite morale était l’image de celle du peuple. En abandonnant l’Éternel, en effet, la nation d’Israël s’était prostituée : spirituellement, elle avait trahi ses engagements vis-à-vis de Dieu, celui qui l’avait épouséeJérémie 31. 32. Pourtant, les relations légitimes d’alliance entre Dieu et son peuple terrestre subsistaient encore, ce qui rendait le cas de ce dernier d’autant plus grave.
Cette infidélité d’Israël envers son Dieu n’est-elle pas l’image de celle de l’Église du Seigneur sur la terre ? Comme Israël a péché sous la loi, de même, l’assemblée a péché sous la grâce. L’Écriture emploie les mêmes termes terribles de “prostituée” et de “mère des prostituées” Apocalypse 17. 1, 5 pour caractériser l’état de la chrétienté professante, la fausse épouse, après l’enlèvement de la vraie épouse de Christ dans le ciel (qui aura lieu dans un avenir très proche).
En obéissance à l’injonction divine, Osée prend donc pour femme Gomer, fille de Diblaïm2. Le premier enfant qui naît de cette union est appelé “Jizreël”. C’était à l’évidence un appel à la conscience du peuple, car “Jizreël” signifie “Dieu sème” ou “Dieu disperse”. Ville de Juda, lieu d’origine d’Akhinoam, femme de David1 Samuel 25. 43, Jizreël était aussi une ville d’IssacarJosué 19. 18, où avaient séjourné Achab et sa femme Jézabel1 Rois 18. 45. Là, celle-ci avait connu son terrible jugement, décrété par Dieu, et accompli par Jéhu1 Rois 21. 23 ; 2 Rois 9. 30-37.
À l’occasion de ce jugement, Jéhu, homme méchant et sans scrupule, avait tué les 42 frères d’Achazia, roi de Juda2 Rois 10. 12-14. Maintenant, par le prophète Osée, Dieu réclame vengeance. Avec l’extinction de la maison de Jéhu, le royaume des dix tribus d’Israël a pratiquement cessé : c’est ainsi que “l’arc d’Israël” (c’est-à-dire sa puissance) a été brisé dans la vallée de Jizreël (verset 5). Cette vallée sera toutefois le lieu du relèvement et de la bénédiction du peuple (verset 2. 2 ; 2. 24, 25).
Gomer enfante alors une fille, dont le nom Lo-Rukhama signifie : “elle3 n’a pas obtenu miséricorde”. Le mot hébreu “rukhama” est très fort et signifie tendresse, amour. Le temps du jugement de la nation d’Israël avait sonné. Toutefois, Dieu ferait encore miséricorde à la maison de Juda, à cause de David, son serviteur. La défaite de Sankhérib devant Jérusalem, où l’Ange de l’Éternel a frappé 185 000 hommes de son armée, a été le terrible accomplissement de cette prophétie (verset 7 ; 2) Rois 19. 35.
Enfin, un second fils est ajouté à cette famille impure du prophète ; son nom, “Lo Ammi”, signifie : “pas mon peuple”. Mais maintenant, la sentence divine du rejet de son peuple s’étend à l’ensemble de la nation, Israël et Juda. Le peuple ne peut plus se réclamer de la présence de son Dieu au milieu de lui (“je ne serai pas à vous”, c’est-à-dire je ne serai pas votre Dieu). Cette sentence allait s’accomplir longtemps après, au moment de la déportation à Babylone, lorsque la gloire de l’Éternel a quitté, comme à regret, le temple, la sainte ville et le paysÉzéchiel 10. 18 ; 11. 23.
Mais si Dieu exerce la colère et le juste jugement, “son œuvre étrange… son travail inaccoutumé” Ésaïe 28. 21, il se plaît aussi à faire grâce. “Car il y a un moment dans sa colère, il y a une vie dans sa faveur” Psaume 30. 6. Aucun prophète n’a jamais prédit le jugement d’Israël sans le faire suivre de la promesse d’une bénédiction. Aussi, le prophète annonce-t-il dès maintenant le relèvement futur du peuple : le Dieu de jugement est aussi le Dieu des promesses, qui “sont sans repentir” Romains 11. 29.
La première bénédiction assurée concerne l’importance numérique du peuple d’Israël dans l’avenir : “comme le sable de la mer, qui ne peut se mesurer”. C’est une allusion aux promesses inconditionnelles faites par Dieu à Abraham après le sacrifice d’IsaacGenèse 22. 17. Contrairement à d’autres promesses soumises à des conditions d’obéissance à la loiDeutéronome 28. 1, cette assurance de l’accroissement futur du peuple n’est basée que sur le sacrifice de Christ, que préfigure IsaacGalates 3. 16.
Une autre promesse, plus remarquable encore, est ajoutée : “dans le lieu où il leur a été dit : Vous n’êtes pas mon peuple, il leur sera dit : Fils du Dieu vivant” (verset 2. 1). Cette promesse concerne directement Israël. Mais, dans sa lettre aux Romains, Paul l’applique à l’introduction future des nations dans la bénédiction divineRomains 9. 26. Christ est le “Fils du Dieu vivant” Matthieu 16. 16 pour bâtir son assemblée et pour réveiller la conscience de l’Église responsable devenue infidèleApocalypse 2. 18. Dieu, le Dieu vivant, appelle aussi Israël son fils : “Israël est mon fils, mon premier-né” Exode 4. 23 ; Malachie 1. 6.
Mais “les vases de miséricorde… préparés d’avance pour la gloire” Romains 9. 23 ne sont pas seulement tirés du peuple juif ; ils viennent aussi d’entre les nations. C’est l’annonce de voies de Dieu envers le monde jusque-là inconnues. En effet, Dieu n’avait eu auparavant de relations qu’avec son peuple Israël, à l’exclusion des autres nations de la terreAmos 3. 2. Il est beau de voir le prophète annoncer déjà de façon voilée, avant sa pleine révélation, le mystère de l’assemblée formée des croyants juifs et d’entre les nations ; ceux qui, comme “fils” et “enfants”, ont Dieu comme Père. La fin du chapitre 2 reprendra ce thème du point de vue des relations de l’Éternel avec son peuple terrestre.
Après avoir annoncé la bénédiction future des nations, le prophète revient à Israël et contemple le rassemblement à venir du peuple tout entier. Unis sous la bannière de Christ, leur seul chef, Juda et Éphraïm ensemble “monteront du pays”. Autrefois, l’homme avait semé la misère et l’avait moissonnéeJob 4. 8. Jizreël avait été le lieu du jugement et de la sanction. Maintenant, Dieu sème pour lui dans le pays (2. 25), et la récolte est tout autre. Ce qui monte du pays fertile est une moisson de bénédiction pour le peuple ; et celui-ci est comme une moisson pour Dieu, une source de gloire et de joie pour luiSophonie 3. 17. Jizreël prend alors son vrai sens (“Dieu sème”), et sa journée est grande.
Ce premier chapitre donne donc un résumé du passé et de l’avenir d’Israël et de Juda. Ayant abandonné Dieu, le peuple tombe sous son jugement et toutes les relations avec lui sont interrompues. C’est l’occasion pour la miséricorde divine d’étendre les bénédictions aux nations, puis finalement de relever Israël et de le rassembler sous la bannière de Christ ressuscité.