La prophétie est “la parole de l’Éternel” ; elle a été donnée par le moyen de Joël, fils de Pethuel, sans que rien ne soit ajouté pour situer le prophète et le moment où il a parlé. Cela donne à son message un caractère particulièrement grave pour tous les temps. Il faut attendre le début du chapitre 2 pour savoir qu’il s’adresse aux habitants de Jérusalem et de Juda.
De mémoire d’homme on n’a entendu parler d’une telle invasion de sauterelles. Les vieillards peuvent l’attester et ce sont eux d’abord, les plus responsables, qui doivent comprendre que ce n’est pas une simple conjoncture, mais un avertissement que Dieu envoie. Ils doivent le dire aux générations suivantes.
Toute la végétation a été détruite par les quatre vagues successives de ces insectes1.
Ce cataclysme a entraîné une grande pénurie. Le prophète interpelle vivement les ivrognes, et leur enjoint de se réveiller de l’effet abrutissant du vin. Ils doivent se lamenter car la source de leur plaisir a été détruite.
Cinq fois, ce chapitre parle de lamentations, celle des sacrificateurs, celle du pays, et celle des laboureurs (versets 5, 8, 9, 10, 11). L’ivrognerie est le seul péché mentionné dans ce livre2, qui caractérise l’état du peuple coupable. Cet état n’est pas décrit aussi sévèrement que par d’autres prophètes (Ésaïe 1 par exemple). Mais il est dénoncé par le châtiment que l’Éternel envoie sur le peuple : l’invasion de sauterelles annonce3 le prochain déferlement de l’armée d’une nation puissante qui va ravager le pays.
L’Éternel appelle Israël : “ma vigne” et “mon figuier”. Ces termes évoquent d’une part la sollicitude dont l’Éternel a toujours entouré son peuple4, d’autre part la responsabilité de celui-ci de répondre à ses soins en portant du fruit pour sa gloire. Ésaïe 5. 4 ; Psaume 80. Il ne peut voir son peuple ainsi ravagé sans en être affligé. Même l’adoration dans la maison de l’Éternel a cessé. Quels ravages produit le péché dans tous les domaines de la vie !
Ceux qui travaillent les champs, laboureurs et vignerons, image de ceux qui ont la charge de nourrir le peuple, sont appelés à ressentir la honte et la tristesse.
Alors que dans d’autres livres prophétiques, les sacrificateurs sont désignés comme les premiers coupables de la déchéance du peuple, Joël leur adresse de la part de Dieu un vibrant appel à montrer le chemin du deuil et de l’humiliation. Ils doivent d’abord le rechercher pour eux-mêmes, et ensuite rassembler le peuple pour l’humiliation collective et la supplication.
Cet appel sera développé au chapitre 2. 15-17. Il est la preuve qu’il y a encore de l’espoir pour que le jugement soit écarté, tout au moins différé, si ceux qui l’entendent y répondent. Dieu demeure le Dieu de son peuple.
Quoi qu’il en soit, la pensée du prophète ne s’arrête pas aux circonstances de son temps. Il contemple ce qui arrivera lorsque le jugement déferlera sur le peuple à la fin. Ce sera “le jour de l’Éternel”, expression caractéristique dans l’A.T. Ésaïe 2. 12 ; 13. 6 ; Jérémie 46. 10 ; Ézéchiel 30. 3 qui correspond au
L’instrument n’est pas nommé ici ; “c’est une destruction du Tout-Puissant”. Cette affirmation montre la gravité du jugement comme aussi sa justice. Rien ne pourra y faire obstacle. Mais il est rassurant de savoir que c’est l’Éternel lui-même qui dirige les instruments du châtiment. Il aime celui qu’il châtie et il le fera avec mesure.
La destruction décrite ici prophétiquement dépasse celle qui est décrite au début du chapitre. Non seulement les récoltes ont été dévorées, mais les semences ne peuvent germer, les cours d’eau sont à sec et le feu a consumé les pâturages et les arbres.
Les quatre mots hébreux du verset 4 rendus par : chenille, sauterelle, yélek, locuste dans la version J. N. Darby désignent peut-être les états successifs de la métamorphose de l’insecte (notamment les deux premiers), ou différentes variétés de sauterelles.
Les invasions de sauterelles peuvent dévorer toute plante verte sur des milliers d’hectares, en laissant le sol comme brûlé.
Certains pensent que l’invasion des sauterelles ne serait pas un événement historique, mais une description imagée de l’invasion à venir de l’armée assyrienne (comp. 2. 11, 25). Toutefois, on peut voir qu’une description très directe et détaillée en est donnée au chapitre 2.
On remarquera que le prophète Nahum compare aussi les guerriers de l’Assyrie à des sauterelles, d’une part à cause de leur accroissement rapide, d’autre part à cause de leur disparition subite : “L’yélek se répand puis s’envole” (Nahum 3. 15-17).
L’Éternel compare plusieurs fois Israël à la vigne et au figuier. Ces deux arbres dont le bois est sans usage (Ésaïe 15) ne valent que par le fruit qu’ils portent.
La vigne a peu de hauteur et nécessite beaucoup de soins attentifs de la part du vigneron en vue d’obtenir du fruit. Dieu compare Israël à une vigne pour souligner les soins vigilants qu’il a dispensés à ce peuple qu’il avait tiré de l’esclavage. Mais il a été frustré du fruit qu’il en attendait (Psaume 80. 9 ; Ésaïe 5. 1-7). En Jean 15, Jésus se présente comme le vrai cep, en contraste avec Israël. Les croyants sont alors les sarments qui, attachés au cep, sont appelés à porter du fruit pour Dieu, le Père, présenté comme le cultivateur.
Le figuier est un arbre qui a plus d’apparence que la vigne. Adam et Ève ont employé ses feuilles pour essayer de cacher leur nudité. Ses fleurs paraissent avant les feuilles et laissent présager du fruit. En l’absence de celui-ci le feuillage abondant est l’image d’une apparence de piété sans vie réelle qui a caractérisé Israël. La parabole de Luc 13. 6-9 montre la patience avec laquelle Dieu a supporté son peuple jusqu’à la croix. Cette patience a eu son terme ; le Seigneur a maudit le figuier stérile (Marc 11. 12-14, 20, 21)