Même s’il est bouleversé par le triomphe apparent du mal et la perspective de ce que son peuple va endurer, Habakuk ne se replie pas sur lui-même. Il ne sombre pas dans le scepticisme mais se rapproche de Dieu. Sa confiance en son Dieu est plus forte parce qu’il a appris à mieux le connaître. Aussi peut-il attendre patiemment la réponse divine à sa deuxième question : “Pourquoi gardes-tu le silence quand le méchant engloutit celui qui est plus juste que lui ?” Comme le Seigneur Jésus à l’heure suprême, ce “pourquoi” n’est pas lancé dans le vide. Il s’adresse à celui qui, même aux heures les plus sombres et terribles, est resté “mon Dieu” !
Habakuk est certain que Dieu va répondre. Son comportement est exemplaire : il se tient à l’écart et au-dessus du tumulte, veillant dans la prière, et attendant que Dieu se manifeste. Belle position d’un croyant, qui le rend dépendant et apte ainsi à recevoir des communications de son Dieu. Pour se tenir sur une tour, il faut d’abord la gravir, y monter, s’élever. Que de fois Dieu nous invite à nous tenir dans sa présence et dans sa communion pour mieux ensuite considérer les choses d’après sa perspective.
Habakuk attendait une réponse, Dieu la lui donne et elle dépasse toutes les attentes du prophète. Il lui montre que si les Chaldéens sont bien l’instrument du châtiment d’Israël, leur méchanceté se retournera impitoyablement contre eux. Le tyran sera jugé à son tour. La vision doit être conservée, parce qu’elle est certaine même si elle est différée dans le temps ; elle est donc gravée dans l’argile avec un burin métallique selon l’usage de l’époque en OrientÉsaïe 8. 1. C’était une bonne nouvelle puisqu’elle annonçait l’anéantissement de l’adversaire, mais son accomplissement fixé est tellement lointain qu’il va exiger persévérance et foi. Les croyants que nous sommes n’ont pas besoin de tablettes pour pouvoir courir : ils ont Celui qui est toujours devantHébreux 12. 2, le chef et le consommateur de la foi. Ils n’attendent pas non plus la réalisation d’une vision, mais bien la venue d’une Personne, de leur Seigneur. Ils ont aussi à disposition la parole prophétique du Saint Livre.
Dans sa réponse à Habakuk (verset 4), Dieu lui montre comment l’orgueil des Chaldéens les fera tomber, alors que le juste, lui, doit continuer à porter ses regards vers l’Éternel afin de vivre. C’est là le verset clé du livre et même de l’Écriture, le message de Dieu aux humains de tous les temps. Le Talmud dit que ce texte résume les 613 préceptes donnés par Dieu à Moïse sur le mont Sinaï (sans avoir néanmoins la même signification). C’est le seul passage de l’A.T. où le mot foi (mentionné seulement ici et dans le verset 66 du Psaume 119) se trouve lié au mot juste ; l’expression “le juste vivra par sa foi”, se retrouve trois fois dans le N.T. :
Quelle annonce, quelque 600 ans avant l’œuvre de la croix ! Quelle densité dans cette déclaration de Dieu à Habakuk, déclaration aussi pour nous et pour tous les croyants de tous les âges. Oui, le juste est celui qui a été justifié par un autre, il vit d’une vie nouvelle par la foi en un évangile unique.
Le fidèle doit attendre l’accomplissement de la prophétie (la question du temps revient souvent dans le livre), mais l’heure viendra où les Chaldéens, dont les passions ont été utilisées par Dieu pour châtier Israël, seront à leur tour punis.
Cinq malheurs sont prononcés contre eux (versets 6-19), et tous les peuples (versets 5 et 17) qui ont subi les cruautés de ce conquérant insatiable agiront de même à leur tour. Ces malédictions ne pourraient-elles pas s’adresser dans cette fin de siècle à ceux qui mettent leur confiance dans les biens matériels (versets 9 et 19) dont ils font leurs idoles, ou qui fondent leur pouvoir sur les injustices sociales (versets 6, 12, 15) ?
Le chrétien sait, par la parole prophétique, que de sévères jugements doivent frapper le monde. Mais il appartient à celui qui vaincra et établira son règne sur toute la terre (verset 14), à celui (verset 20) qui est dans le ciel, seul Saint et juste Juge, de rétribuer selon les mobiles que lui seul connaît. Le dernier mot est à lui ! Car la gloire de l’Éternel est la finalité de tout. Et pour que la gloire du Seigneur remplisse la terre, il faudra que la gloire humaine, tout ce dont les hommes se vantent, disparaisse, soit anéantie. Ne l’oublions jamais. Et cette gloire sera connue de tous, reconnue par toutes les créatures qui confesseront “que Jésus Christ est Seigneur à la gloire de Dieu, le Père” Philippiens 2. 11.