Le Seigneur est proche
“Il s’est abaissé lui-même” ; cela nous parle aussi du point que le Seigneur a atteint : “jusqu’à la mort, et à la mort de la croix” (Philippiens 2. 8). Le point le plus profond de son abaissement est aussi le point suprême du mépris et de la haine du monde. Jésus est là, tout seul, cloué sur le bois maudit, dépouillé de tous ses vêtements, traité comme un malfaiteur, accusé d’avoir déplu à Dieu, accablé d’outrages, et déclarant devant tous – nous osons à peine le répéter – qu’il est “un ver, et non point un homme” (Psaume 22. 6). Reste-t-il là quelque trace de grandeur humaine ? N’est-ce pas au contraire un abîme insondable de honte et d’humiliation qui laisse nos âmes confondues ? Eh bien, c’est cet homme-là que nous reconnaissons comme Seigneur, c’est ce Dieu que nous adorons dans cette scène toujours présente devant les yeux du Père qui n’a pas oublié le crime commis contre son Fils – cette scène qui devrait être toujours présente aussi devant nos cœurs. Au Calvaire, le monde s’est entièrement démasqué ; toute sa haine, sa violence et sa corruption s’y sont donné libre cours. Et aujourd’hui, malgré ses dehors hypocrites, sa tolérance moderne, les flatteries qu’il décerne au chrétien et les honneurs terrestres par lesquels il cherche à le lier, ce monde est toujours le même, le même qu’aux heures de la croix.
Alors une unique occasion nous est donnée pendant cette vie de nous ranger du côté de Christ, c’est-à-dire moralement contre le monde. Nous n’en recevrons rien d’autre que ce que lui-même en a reçu : l’opprobre, la haine, le mépris. Mais “le disciple n’est pas au-dessus du maître, ni l’esclave au-dessus de son seigneur” (Matthieu 10. 24). Si nous voulons le suivre, ce n’est pas un autre chemin qui nous est proposé. Son chemin d’abaissement est celui qui s’éloigne sans regret de tout ce que le monde peut offrir ; celui aussi qui descend vers les pauvres, les humbles, les malades et les pécheurs conscients de leur ruine, vers tous ceux qui ont des besoins et pour qui le monde, à cause de cela, n’a pas de considération. Le jour de la gloire viendra. Jésus le Nazaréen, “l’homme de douleurs” (Ésaïe 53. 3), paraîtra dans sa majesté pour prendre son royaume. Celui qui est sorti, “portant sa croix” (Jean 19. 17), entrera comme “roi de gloire” (Psaume 24. 7) et, à chacun de ceux qui auront partagé son opprobre, “l’entrée dans le royaume éternel de notre Seigneur et Sauveur Jésus Christ” leur sera “richement donnée” avec lui (2 Pierre 1. 11). Le chemin se termine dans ce pays glorieux. Mais il passe d’abord à la croix.